LA FOLLE ET INCONVENANTE HISTOIRE DES FEMMES, DE LAURA LEONI AVEC DIANE PROST
Une sublime affiche colorée et ultra réussie et créative signée Cécile Pruyot, un titre vendeur, historique ambitieux et percutant qui se veut sans doute, de manière fort à propos, le pendant féminin d’un Mel Brooks, cette folle historique délirante, prenante et touchante autour du féminisme est un fabuleux voyage théâtral au coeur des Femmes avec un grand F. Laura Léoni Diane Prost et Laetitia Gonzalbes frappent fort et bien. Elles marquent tout simplement une petite historique de la grande création avec une pièce qui pourrait devenir culte ou qui, en tout cas, fera date.
Une femme, seule en scène, une belle femme mais qui sait jouer de tous les visages de la féminitén du plus aguicheur au plus militant en passant par tout ce que peut être une femme malgré les diktats du patriarcat, de ses parts complexes, sombres et subtiles se retrouve dès le début de la pièce face au Cercueil de sa grand-Mère décédée. Une jeune femme qui aime les femmes, une lesbienne, une goudou, une gouine, une crouteuse, une saphiste…qui parle de son coming out, de sa vie et de sa relation au désir et à la féminité. Une femme qui devient toutes les femmes, une incarnation saisissante, corps et âme. Dans ce faux dialogue post mortem entre femmes, elle dit tout et aussi se permet toutes les digressions autour de sa féminité, de sa différence et plus globalement sur le sort qu’a réservé ce monde aux femmes depuis la nuit des temps. Elle n’élude pas les châtiments, les viols, les interdictions, les humiliations et les persécutions qu’elles ont subies depuis des temps immémoriaux.
C’est une confession, digne, maitrisée, dosée, admirablement bien mise en scène où le joli déshabillé d’entrée de scène porté par Diane Prost se transforme en une dizaine de tenues historiques, symboliques ou de corporation.
Diane Prost envahit la scène avec une énergie folle, elle a une présence inouïe, une diction remarquable. Elle prend les voix, les morphologies et les attitudes de toutes les femmes qui ont fait l’histoire des femmes, de Jeanne d’Arc à Simone Veil en passant par Virginie Despentes et tant d’autres.
Diane Prost joue plus, joue mieux qu’une comédienne ordinaire, on sent un investissement hors norme sur ce projet. Elle chante, elle danse, se met à nu au sens propre et figuré d’une très belle manière, une nudité qui a une profondeur, du sens, une dignité et une élégance rares.
Diane Prost est une révélation de taille dans cette pièce qui même si elle utilise les ressorts de l’humour parle de sujets difficiles, de luttes complexes où les femmes ont été des victimes, des hommes et d’un système. Pourtant il n’y a ni prosélytisme exacerbé, ni leçons de morale, ni culpabilisation, ni destination ou encore moins haine de l’homme, c’est une spectacle qui réunit plutôt que de diviser, qui tape juste sans mettre mal à l’aise.
On est très vite séduit par l’ensemble de cette belle mécanique où Diane Prost est une superbe ambassadrice de la cause des femmes, une talentueuse lumineuse qui sert de manière très juste son propos. On ne peux qu’adhérer, elle nous amène dans son énergie, elle nous captive, elle nous entraine dans cette histoire étonnante, délirante et dérangeante dans le meilleur sens du terme.
En ces temps troublés, de virus, de violences faites aux femmes (et aux hommes) et de violences tout court, de déshumanisation et de pauvreté intellectuelle et artistique, ce spectacle est un vin de vigueur qu’il faut boire jusqu’à la lie. Qu’on se le dise. A voir absolument.
Teaser : https://www.youtube.com/watch?v=8kyxfEPbdjU
UNE PIECE DE LAURA LEONIN AVEC DIANE PROST. MISE EN SCENE DE LAETITIA GONZALBES. LE FUNAMBULE THEATRE.