Interview de Julien, militant naturiste parisien ! (1)

 Interview de Julien, militant naturiste parisien ! (1)

Julien Claudé-Pénégry a été élu vice-président de la FFN (fédération française de naturisme) en 2018. C’est un aussi un homme jeune et engagé aux valeurs fraternelles et humanistes. Il fut à l’origine (et ce n’est qu’un début) de moult événements naturistes parisiens. Il nous conte ses aventures dans cette interview et l’esprit qui l’anime. Il représente la nouvelle génération naturiste. A suivre la seconde partie…

Il existe actuellement plusieurs formes de naturismes. Le naturisme de vacanciers au sein de structures commerciales, qui mélangent les naturistes aux textiles en toute impunité, comme le Bartos le relate dans l’épisode 8 de mon feuilleton : http://feuilleton-les-aventures-de-la-singette.over-blog.com/
La révolte gronde au CHM de Monta, le premier grand centre naturiste canal historique dont les valeurs sont bafouées : http://respect-sante-nature.fr/chm/500-deja/
Des associations naturistes avec ou sans terrain, aux périphéries ou non des villes restent actives et respectent l’éthique naturiste. C’est aussi pourquoi, suite à mon article intitulé « Le naturisme urbain fait sa révolution à Paname » : http://www.lemague.net/dyn/spip.php?article9546 , j’ai voulu interviewé Julien, activiste joyeux et fraternel aux multiples casquettes constructives et naturistes, qui réside à Paris.

La Singette : Bonjour Julien, peux-tu te présenter en quelques mots ?

Julien : Parisien de 40 ans, 25 ans de naturisme, un poil curieux, de caractère passionné et cultivant un esprit libre.

La Singette : Pour reprendre la métaphore gauloise, comment es-tu tombé dans la potion du naturisme et quel a été ton déclic ?

Julien : Je passais des vacances avec mes parents -non naturistes- sur la Côte Sauvage en Charente-Maritime, et nous fréquentions une plage textile qui se trouvait être mitoyenne d’une naturiste. J’avais 15 ans, âge où l’on se pose des questions sur soi. Intrigué par le plaisir et le bonheur de ces personnes qui se baignaient nu et profitaient de bains de soleil. Je me suis laissé tenter, me suis mis en retrait de mes parents. Je me suis dévêtu et je ne me suis plus jamais rhabillé. Et avec le temps, ma quête de bien être, de moi, faire corps avec ma nature et la nature, j’ai fait du naturisme mon quotidien.

La Singette : Le naturisme ça représente quoi pour toi ?

Julien : Le naturisme, c’est moi, mon intégrité, mon humanité. Ce sont des valeurs, celles qui nous lient à notre place sur terre, l’essentiel de l’être, sans artifice, vrai, simplement soi. Le naturisme, c’est prendre conscience de qui l’ont est, se défaire du regard de l’autre, être l’autre dans l’égalité la plus totale.

La Singette : La FFN (à ne surtout pas confondre avec le F Haine), c’est qui c’est quoi ?

La Fédération française de naturisme est une association nationale à but non lucratif qui a pour objectif de promouvoir et défendre l’art de vivre naturiste et des naturistes. Elle est composée de bénévoles qui représentent les naturistes, les structures et associations à travers toute la France.

La Singette : quelles sont tes responsabilités au sein du mouvement naturiste ?

Au niveau national, je suis l’un des deux Vices-Présidents de la Fédération Française de Naturisme. En charge de la communication de la FFN. Je suis à titre régional, Président du Comité régional Ile-de France de la FFN. Côté local, je suis porte-parole, co-responsable communication de l’Association des Naturistes de Paris. Je suis aussi en charge du Développement des naturistes Urbains, comme l’Espace naturiste du Bois de Vincennes. Je tiens aussi le rôle de communiquant au sein de d’IMAGINAT, association culturel et artistique qui œuvre autour de la nudité et des valeurs du naturisme. Secrétaire général de l’Association pour le Développement du Naturisme en France, structure qui sous l’égide de la FFN œuvre à réfléchir, imaginer, impulser, soutenir des initiatives naturistes sur le terrain local. Membre fondateur du collectif A222-32, qui travaille à des formats naturistes urbains, comme du clubbing, des apéros collaboratifs, des dîners,…

La Singette : Autrefois, il a y a déjà longtemps, j’avais interviewé un président de la FFN (28 juin 2008 : http://www.lemague.net/dyn/spip.php?article5001) . Mais place à la nouvelle génération. Toi qui est jeune, tu as été élu vice-président de la FFN. Quelles sont les nouvelles orientations que tu vas essayer d’insuffler à la FFN ?

Julien : Un renouveau est en marche au sein de la FFN. Le naturisme est intergénérationnel. La jeunesse y prend désormais plus de responsabilités ainsi que la volonté de rendre plus paritaire la représentation des membres de la Fédération. Je fais parti d’une génération de naturistes qui ne veut pas se limiter le naturiste à des instants estivaux et donc épisodiques, mais le vivre pleinement au quotidien. Nous actionnons donc les moyens pour communiquer qui sont les nôtres. Aujourd’hui, pour être en phase avec nos attentes, ne pas se défaire de nos fondamentaux, mais composer pour créer un naturisme moderne, en adéquation avec notre époque, et rendre visible le naturisme. L’objectif : montrer que l’art de vivre et philosophique naturistes qui n’a rien à cacher, il doit vivre, transmettre des valeurs, se développer et prospérer dans la société.

La Singette : tu parles « art de vivre et « philosophie naturiste » qui n’aurait plus rien à cacher. Peux-tu développer ce que regroupe ce courant de pensée en actes de nudité affirmée et quels impacts va-t-il engendrer sur la politique de la ville et l’amélioration des conditions de vie des citoyennes et citoyens ?

Julien : La nudité, élément premier et le plus visible de l’art de vivre et de la philosophie naturiste, revêt aujourd’hui de nombreuses valeurs encore plus affirmées et revendicatives, dans une époque où l’étiquette et le paraître formatent les esprits. Véritable alternative à une vie, qui fidèle aux principes de la genèse du mouvement, remet l’homme au centre des actions et motivait une rupture à l’esprit ultra consumériste galopant d’une société industrialisée. En 2018 rien n‘a changé sur ces perspectives et ambitions. Le naturisme est plus que jamais un concept de vie qui privilégie l’homme et son environnement. Pour cela, la nudité est l’acte le plus affirmatif de la manière d’appréhender, de concevoir une vie saine fondée sur des valeurs de respect de soi, de l’autre et de l’environnement. Voilà pourquoi, bien plus qu’un instant de nudité, nous pouvons considérer que le naturisme en art de vivre du quotidien trouve des expressions alternatives et annexes pour se vivre pleinement, bien au-delà de l’instant estival dans lequel il est rangé.


La Singette : Concrètement, comme ça se déroule cet « art de vivre » dans la tête et le corps ?

Julien : Le naturisme est un mode de vie, une manière d’appréhender le quotidien, de repenser le vivre ensemble, de promouvoir une éducation populaire qui œuvre pour que l’égalité entre tous, la mixité, la tolérance, le respect. Véritable pensée humaniste, le naturisme est la vision la plus juste d’une société qui se défait des diktats imposés par un esthétisme borné et codifié. Il rend foi et force en l’homme, appuie l’esprit fraternel humain rendant vraie et tangible l’égalité homme-femme, apportant sérénité entre tous car se délestant du regard de l’autre pour être soi en accord et avec les autres.

La Singette : En bref, car j’y reviendrai, peux-tu nous donner quelques exemples concrets ?

Julien : Voilà pourquoi aujourd’hui à travers les clubs, associations, centres, initiatives individuelles mais aussi la présence du naturisme au cœur de la capitale avec l’ouverture de l’Espace naturiste du Bois de Vincennes, la visite du Palais de Tokyo, la journée au parc d’attractions Aventure Land, le naturiste s’ouvre à l’autre et travaille à rendre la nudité banale, ordinaire et simple. Car cette nudité est tout compte fait anodine et non un problème. La nudité porte des valeurs, celle d’une humanité qui s’accepte telle qu’elle est, dans sa diversité, sa richesse et sa beauté multiple. Un corps est un corps.

La Singette : Si je te suis bien, est-ce qu’on peut dire que les trois principes de la République apposés aux frontons des lieux publics et des écoles laïques sont-ils aussi des préceptes pour les citoyennes et citoyens naturistes ?

Julien : De cette manière nous agissons à faire de la nudité, principe d’égalité, de liberté, et de fraternité, un point à ne pas oublier dans notre République. La nudité tolérée, autorisée est un acte citoyen car les naturistes sont loin d’être des personnes à la marge, ce sont des êtres qui sont en phase avec leur époque, désireux d’un mieux vivre, en communion avec le réel, le présent, le temps, la société, la nature et les autres. La politique de la ville devrait ainsi être à l’écoute des naturistes et permettre aux naturistes de vivre, à travers plus d’attention à leur égard, avec des espaces de nature dans lesquels ils pourraient profiter de bains de soleil, des plages mixtes, des accès aux bassins de piscines mixtes ou dédiées dans chaque commune de France…

La Singette : Le Bartos me tance toujours avec son histoire du naturisme à la Belle Epoque en France où trois courants de pensée joignaient leurs forces dans un vaste mouvement de réforme de la vie très riche, autour des hygiénistes, spiritualistes et anarchistes. En 2018 que sont-ils devenus et ont-ils disparus où ont-ils muté dans une autre direction ?

Julien : Je pense que les naturistes d’aujourd’hui sont une synthèse de ces mouvements de pensées. Le naturisme en 2018 est l’émanation de cette vision plurielle. Bien entendu, le naturiste tire sa source des réflexions hygiénistes et ne peut que s’en prévaloir à une époque où la multiplication des scandales sanitaires, la présence massive d’OGM et perturbateurs endocriniens ne peuvent que nous amener à réviser notre manière de composer notre assiette. Dans le même temps, le sport reste une manière de prendre soin de soi. Coté spiritualisme, n’oublions pas que le naturisme est un précepte laïque qui met l’homme au cœur de notre histoire, pour lui offrir par le naturisme un bien-être retrouvé en étant en osmose avec la nature qui l’entoure. Quant aux anarchistes et leur manière de vivre, que beaucoup ne comprennent pas, par ignorance ou préjugés, a tendance à s’amenuiser. Le côté ad hoc à la société demeure, mais le naturisme est en phase avec son temps et peut-être même plus en avance. Observateurs du monde et des déviations de son progrès haletant, il pointe du doigt les maux de notre époque et lui offre une alternative plus apaisée, saine et sereine. Cet anarchisme d’hier est une réponse sociétale aujourd’hui, un regard franc et clair sur notre avenir à repenser.

La Singette : Parmi tes nombreuses casquettes militantes et naturistes, tu es désormais chargé de la communication. Le Bartos et d’autres de ses aminches ont déjà subi sur des groupes de discussions naturistes y compris de la FFN, il n’y a encore pas si longtemps les affres et les censures d’une bande de quatre gaillards du côté de Marseille, qui font régner la terreur d’une parole unique voir inique et totalement clause. Désormais, j’ose espérer que les modérateurs / médiateurs naturistes seront formés à écouter et à la circulation de la parole libre et respectueuse, afin que toutes les voix et surtout celles minoritaires qui ne se réclament d’aucun groupe de pression puissent être entendues. Qu’en penses-tu ?

Julien : La Fédération doit représenter toutes les tendances du mouvement naturiste. Elle est le garant de l’esprit de notre art de vivre, de ses valeurs et de sa liberté. Il faut que les prises de paroles soient mesurées, argumentées. Nous savons tous que les réseaux sociaux sont désormais un médium le plus pratique pour cracher son fiel sans retenue sur n’importe quel sujet et que nombre de personnes réagissent à outrance sur tout et n’importe quoi. Simplement par ce qu’elles peuvent s’exprimer. Une équipe de modérateurs très actifs, bienveillants, composées d’hommes et de femmes veillent à la bonne tenue des échanges, au respect mutuel. La tâche est conséquente. Nous vérifions tous les profils. La censure que nous produisons est le fruit de décisions concertées entre tous pour évaluer le bienfondé de cette mise à l’écart si c’est le cas échéant, l’option requise. Rien n’est fait au hasard. Ces pages sont ouvertes aux commentaires, à la discussion. Il ne doit y avoir aucunement des propos racistes, homophobes, de jugements sur le physique, de harcèlement, de sexe. Les réactions seront immédiates et définitives. La liberté dans le naturisme et autour de la nudité ne sont pas des prétextes à tout et n’importe quoi.

La Singette : Autant je suis convaincue par tes arguments concernant les réseaux sociaux qui ouvrent à la grande récré des flatulences haineuses. Je suis bien placée pour en parler avec mon article « Le naturisme urbain fait sa révolution à Paname » sur Agora vox et ses187 réactions pour 5680 visites. J’ai dû batailler ferme seule contre des hordes d’incultes et d’obsédés sexuels qui dénaturaient sciemment le naturisme !
https://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/le-naturisme-urbain-fait-sa-205992
En revanche, je persifle et insiste sur le fait que des naturistes authentiques se sont fait rembarrer des réseaux sociaux naturistes pour leur singularité. Je pense au Bartos, qui pourtant dans ses écrits littéraires et certains articles sur des médias textiles donne la parole aux différentes facettes du naturisme. Je pense aussi à « Jean-Charles, gentleman artiste de la joie de vivre à Tahiti ! » : http://www.lemague.net/dyn/spip.php?article8557 Je pense encore à « Patrick de Marseille issu d’une famille pionnière et humaniste » : http://www.lemague.net/dyn/spip.php?article8550
Ces trois personnes cultivées et éduquées, ne sont pas des trolls ni encore moins des fouteurs de boxon ! Ils distillent juste une parole singulière sur le naturisme qui a droit d’être entendue.
Je pense que les réseaux sociaux naturistes entre les mains de quatre gus remettent la liberté d’expression naturiste en question. Et comme je suis toujours constructive, c’est aussi pourquoi je propose pour résoudre ces disfonctionnements patents et hélas bien réels, que la FFN propose des stages de formation des modérateurs à la fonction d’écoute attentive, du brassage de la parole dans le respect mutuel, comme ça existe déjà dans certaines associations laïques et fraternelles.
Je te laisse réfléchir sur le sujet et lire mes différents liens pour aiguiser ton esprit critique et ouvert sur cette question primordiale.


(A suivre la seconde partie de ce long entretien avec Julien Claudé-Pénégry)