Portrait de Binh Regibeau

Portrait de Binh Regibeau

Next (F9) vous propose des portraits de personnalités connues ou inconnues, des poètes ou des vendeurs de boutons, des gauchos ou des gauchers. L’important est de rêver. Chacune des personnalités est contactée personnellement, décide de sa photo à publier et raconte à Patrick Lowie un rêve marquant. Précision d’usage : ce portrait est un portrait onirique, et donc, ce n’est qu’un portrait onirique et imaginé. Par conséquent, l’histoire qu’il raconte n’est pas une histoire vraie.

Binh Regibeau ouvre soudainement ses yeux ronds. Étourdi, étonné, encore surpris par ces portes entrouvertes sur des mondes oniriques. Il sort d’un rêve farfelu à peine descriptible. Il a des airs d’astronaute à l’entraînement avec ces câbles blancs, noirs et colorés sortis de nulle part patchés sur le corps, le visage, agrafés sur l’âme. Il ne dit rien. M’observe avec soin, scrupuleusement. En m’observant longuement, il prend l’esprit réfléchi et se donne la faculté de s’observer soi-même. Dans la vraie vie, Binh étudie la psychomotricité en Belgique et il transmet le sentiment de merveilleux aux enfants. N’est-ce pas merveilleux justement ? Patrick Lowie, me dit-il, ouvrez cette porte, entrez, vous allez découvrir un monde étrange. Je m’y précipite. La porte en bois s’ouvre sur une forêt en plastique, des frigos remplis de brocolis, je m’assieds aux pieds du séquoia géant, l’impression d’être dans un studio de cinéma, je vois des projecteurs, des écrans plasma, des néons blancs et bleus qui font office d’éclairage onirique, des costumes d’une autre époque. Une musique electro-rock psychotique de David Lynch, Crazy Clown Time. Des sangliers et des cerfs empaillés clignent des yeux. Mais cela ne dure pas cinq secondes, nous voici, lui et moi, dans le parking souterrain d’une clinique, au -3, peut-être plus bas, plus j’avance plus cela ressemble à une grotte plus j’ai la sensation de faire de la spéléologie. Pas de berline, pas de phares, pas de pneus qui crissent dans les virages. Pas vraiment peur non plus. On entend les gouttes d’eau. On entend le caoutchouc de mes chaussures neuves. Les néons bleus et roses sont là. Ça clignote un peu de partout. Des ombres de fantômes apparaissent sur les murs tapissés. C’est sombre, lugubre, des fissures dans les murs laissent passer de la lumière, les ombres des feuilles d’un arbre. Ces ombres se projettent sur son visage, tel un mascara. Il ouvre la bouche, des libellules, trois Lydiennes, s’échappent de son sourire mélancolique. Retrancher le merveilleux de la vie de l’enfant, c’est procéder contre les lois mêmes de la nature écrivait Georges Sand. Il marche devant moi, son allure désinvolte, son pas en apesanteur. Il se retourne et me dit : ça vous dirait, de grimper avec moi ? Je cherche quelqu’un pour grimper les falaises des îles Kalymnos. Je savais que tout cela n’était qu’un rêve et je lui ai dit Oui, bien sûr. Parce qu’ici, tout est possible. On retrouve le séquoia géant. On est assis et on voit arriver des chasseurs qui s’exécutent avec une splendeur triomphale, et grâce au cor, jouent un admirable hallali. Le chasseur au cor s’approche : Verdict ! Vingt-trois micro-réveils par heure. Binh me dit : Vous avez un don de précognition, n’est-ce pas ? J’acquiesce. Dites-moi ce qu’il va m’arriver ? Je me transforme en miroir que j’oriente en avant de son corps. Il s’observe, se voit dans mille ans, voit ses amours, ses réussites, ses voyages. Il ouvre ses yeux ronds, heureux de le voir se réveiller je lui dis : Je vous souhaite une belle journée.

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