No pasarán ! Le F’Haine dans le canton Nord Médoc !

No pasarán ! Le F'Haine dans le canton Nord Médoc !

Le FN victorieux dans mon canton, pose forcément questions. C’est pour y répondre qu’une cinquantaine de personnes diverses et riches dans leurs motivations se sont rencontrées à Saint-Yzans en Gironde, le 7 avril 2015 pour débattre et tenter une riposte à long terme, par des réflexions et actions futures. Je vous cause de cette réunion, il était une fois, qui n’a rien d’un conte de fée, tant la situation est très grave mais pas encore désespérée !

Le canton Nord Médoc est l’un des cantons qui fut conquis par le F’Haine au second tour : http://www.infos-bordeaux.fr/2015/actualites/gironde-le-front-national-simplante-dans-le-medoc-6982
Je passe sur la plupart des listes en lice qui n’annonçaient pas clairement la couleur de leur étendard et je n’aurai pas l’outrecuidance de revenir sur la légèreté de leurs arguments. Quant au F’Haine, il se surpassa. Un simple slogan repris au niveau national, l’argumentaire habituel et banal, sans tenir nul compte de la spécificité rurale du Nord Médoc, et vas-y que je t’embrouille dans les gargouilles. Une présence sur le terrain, des collages sauvages et « L’espérance bleu marine », selon sa langue de bois habituelle
Alors que c’est tout le contraire qu’il propose si j’en crois l’analyse du philosophe Bernard Stiegler sous le titre « Les gens qui perdent le sentiment d’exister votent FN ! » Puisque… « Aujourd’hui, la désespérance est le fond de commerce du Front national ».
http://blogs.mediapart.fr/blog/brigitte-pascall/280315/stiegler-les-gens-qui-perdent-le-sentiment-d-exister-votent-fn
Je n’ai pas oublié non plus les fascistes espagnols sous la houlette de Franco et leur cri de ralliement : « Viva la muerte » (vive la mort) en attaquant la République assiégée !
J’y ai retrouvé les expressions de haine raciale similaires et du pathos qui sévit au FN, au même titre que la censure contre toutes les expressions libres et fraternelles.

Forcément intriguée, toutes ces figures de rhétorique me clouaient la chique, d’autant plus que par chez moi en Afrique, chez mon groupe de singes dans la forêt, nous vivons en totale harmonie libertaire, sans dieu, sans maître et sans aucun bulletin de vote à nous colleter ! C’est aussi pourquoi, quand le Bartos me fit l’invite de nous rendre à une réunion mardi 7 avril au presbytère désaffecté des soutanes rances de Saint-Yzans pour discuter, on fait quoi, avec le FN implanté chez nous ? Curieuse, je décidai de l’accompagner.
A l’initiative du maire du village Segundo Cimbron et son binome Fanny Audard, tous deux se sont présentés sur la liste « Un médoc ambitieux » et ont remporté au premier tour 8,33 % des maigres suffrages exprimés. Dites 33, docteur, on est en Gironde pardi !
Je tiens tout de suite à préciser, que Fanny enthousiaste et active n’est pas une potiche figurative, comme sur la plupart des listes, où les hommes au nom de la parité ont voulu troquer une partie de leur testostérone et laisser une maigre place aux femmes à leurs côtés.
Une cinquantaine de personnes de tout le Nord Médoc, en majorité âgées de plus de 60 ans, s’était déplacée, suite aux appels sur les réseaux sociaux et le bouche à orteil.
Fanny a remercié les personnes présentes et a indiqué que le territoire n’était « pas passif et que résister c’est créer ». Segundo a embrayé que la durée de mandat des frontistes élus était de 6 ans, « qu’un ressort était cassé, qu’il serait difficile à retendre. Qu’il y avait beaucoup de choses à réinventer pour travailler les uns avec les autres sans laisser quelqu’un au bord de la route ». Il a insisté et en cela rejoignait Bernard Stiegler, sur le fait que les causes profondes provenaient d’une souffrance, d’un mal être social et d’un grand désespoir. Une piscine qui ne fuit pas à Lesaparre serait aussi la bienvenue.
Louis, président de la LDH (Ligue des Droits de l’Homme, section de Saint-Vivien de Médoc) a indiqué que le Nord Médoc était un territoire sinistré et le plus pauvre de la Gironde. Que le travail de sape du FN consistait à torpiller la laïcité pour la récupérer à son compte, massacrer le droit des femmes et jurer par l’islamophobie, comme thèmes majeurs de leur discours. Une « soirée laïcité »serait organisée je jeudi 6 mai 2015 à la bibliothèque de Grayan.
Un retraité de l’éducation nationale a pointé les abstentionnistes.
Daniel, fameux artiste multipiste : http://www.lemague.net/dyn/spip.php?article8772 a tonné pour que les élus favorisent des débats sociaux et culturels, de se préoccuper de la petite enfance et prévenir l’esclavagisme dans les vignes et ne pas avoir peur de combattre.
Un monsieur de Naujac a regretté le manque de débat citoyen autour de l’éolien.
Jean-Louis élu de Saint-Vivien et membre de la LDH a déploré que la démocratie ne fonctionne pas et qu’elle soit juste un théâtre où les acteurs sont considérés comme des mimes passifs.
Claudine sur la liste de Fanny et Secundo a soulevé le cas du collège de Soulac délaissé qui mériterait au minimum une bonne rénovation.
Une assistante sociale de Pauillac a parlé d’une filière mafieuse de logements à Pauillac pour les plus démunis et son ras le bol de cet état de fait.
Un conseiller régional PS a voulu redorer le blason de son parti, sans jamais analyser les causes du vote FN vis-à-vis de la politique du PS en Médoc !
Conchita est revenue sur l’esclavage des travailleurs immigrés à la vigne par les grands châteaux.
Un militant du Secours Populaire de Pauillac a renchéri, sur l’état de grande pauvreté des vendangeurs marocains, passés par l’Espagne pour aboutir à Pauillac l’eldorado de l’extrême pauvreté.

Je vais me gêner et je me permets une incise poétique à la Prévert sur la misère sociale et économique pour appuyer les derniers propos.
« Il est terrible / le petit bruit de l’œuf cassé sur le comptoir d’étain / il est terrible ce bruit / quand il remue dans la mémoire de l’homme qui a faim… »
(in La grasse matinée, 1937)

Le Bartos est intervenu (il ne manquait plus que ça, le cave !). Il a cité Bernard Stiegler et l’importance de donner la parole pour agir : « Aujourd’hui, la désespérance est le fond de commerce du Front national. Pour redonner de l’espoir, il faut donner la parole à ceux qui ont quelque chose à dire et qui sont prêts au débat public – et par là reconstruire une pensée, des concepts et des perspectives, et les socialiser ». Il a causé des combats antifascistes des années 90 avec les réseaux Ras l’Front, lorsque les fachos étaient facilement identifiables, puisque militants et bien réels. Et toute la difficulté aujourd’hui de les identifier, à part les têtes connues, puisqu’ils peuvent se révéler chez nos propres voisins ou collègues…. ! Il a explicité les casseroles du FN dans les cités où elles géraient la crise avec incompétence et les mesures liberticides prise pour garantir la paix sociale et bourgeoise des nantis du centre-ville en créant des ghettos en banlieue sans moyen de transport pour y accéder.
http://www.mediapart.fr/journal/france/010914/reportage-audio-frejus-ville-fn-les-centres-sociaux-trinquent
Il a insisté sur le manque de médias locaux libres et ouverts puisque la presse locale est phagocytée par les annonceurs et les lobbys locaux du vin et du tourisme. La nécessité de créer des médias libres, telle une radio véritablement associative libre qui donnerait la parole à toutes les actrices et les acteurs de la région et cultiverait la richesse de nos différences dans la multiplicité des expressions plurielles et créatives. Pas, comme celle qui existe actuellement : Aqui FM, dont il était animateur culturel et dont il s’est barré avec deux autres personnes, pour cause de censure déguisée, coupure de l’émetteur lors de deux émissions et les pressions subies pour que Daniel Gapin ne puisse pas s’exprimer librement ! Sur sa lancée, le Bartos a voulu signifier qu’une piscine à Lesparre c’était bien, mais autant se mouiller avec des livres en culture dans une médiathèque, pour muscler son esprit critique et combatif, puisque comme par hasard, le Nord Médoc n’en était pas doté.
La bibliothécaire de Pauillac lui a répondu du tac au tac, qu’il fallait mieux avoir moult bibliothèques dans nos villages qui fonctionnaient, qu’une médiathèque. Elle a donné l’exemple de travailleurs étrangers dans les vignes qui sont venus dans sa bibliothèque, y ont pris plaisir et fini par apprendre le français dans les livres.
Deux ouvriers agricoles ont pris la parole. L’un a expliqué que les travailleurs de la vigne sur le terrain étaient très pauvres et qu’ils se radicalisaient en votant FN à cause de toutes les charges qui les assomment et les empêchent de vivre décemment. Son confrère a lu attentivement les différentes professions de foi des candidats qu’il avait reçu dans sa boite aux lettres, entres des pubs pour la barbaque d’une grande enseigne commerciale. Ses collègues ont préféré la viande à la lecture et votent FN. Ils accusent le « basané » de prendre leur travail. Ce à quoi il leur répond que leurs acquis sociaux, carte vitale, 5 semaines de congés payés… ne tombent pas de la cuisse de Marine. Ses collègues entendent son discours.
Une dame âgée a regretté qu’il n’y ait pour ainsi ne dire aucun jeune de présent à la réunion et que l’étude de l’histoire et de la politique étaient nécessaires pour se battre. Malgré tout elle a passé un sourire d’espoir et une chaleur humaine peu commune.
Enfin, je voulais dire que c’est Vivi toujours et plus que jamais militante culturelle, qui fut la passeuse de parole à travers le micro tendu à toutes les personnes qui voulaient intervenir. Environ une bonne quinzaine au total dont je n’ai pas pu tout relayer par manque de place.

Un terme générique pouvait rassembler toutes ces personnes contre le F’Haine : le collectif ! Former un collectif, se rassembler, unir leurs forces pour agir et résister. La résistance n’est pas un vain mot dans cette région qui a subi et beaucoup souffert jusqu’à son dernier souffle, de l’occupation nazie. Il serait bon de le redire et effectuer le parallèle avec notre actualité brûlante.

Les différents discours entendus montrent bien certains axes de la misère qui sévit et sur laquelle gravite la nébuleuse fasciste pour polir son pouvoir et gouverner.

Sauf erreur de ma part, aucun média n’était présent. Soit ils n’avaient pas été invités ou soient ils n’avaient pas voulu se déplacer.

A la lecture des témoignages, cette première réunion a pu paraitre décousue, tant les thématiques sont nombreuses et se chevauchent et touchent les problématiques des habitants du Nord Médoc dans leurs tripes. Les personnes présentes qui le souhaitaient ont décidé de rester en contact et poursuivre les réflexions. Qui sait pour se traduire par des actions concrètes dans un avenir proche.

Demain (à l’heure où j’écris ces lignes), 9 avril, une grève générale est annoncée partout en France, dans le public et le privé.

D’ores et déjà on sait que des écoles seront entièrement fermées, ainsi que des bureaux de poste et que le bac entre le Verdon et Royan sera perturbé. Ce ne sont que des exemples parmi tant d’autres. Les luttes continuent sur tous les fronts pour que les citoyennes et citoyens récupèrent leur dignité et se battent pour leurs droits fondamentaux entachés par le régime au pain sec et à l’eau que veut nous faire subir le PS aux affaires.

Les employés de Radio France entament leur quatrième semaine de grève, soutenus par leurs auditeurs dans la rue. Encore une fois, les médias vendus veulent nous enfumer. Heureusement que de rares médias encore indépendants nous livrent leurs analyses pertinentes, surtout de la part de Médiapart et de Hubert Huertas, ancien responsable de l’info à France Culture et qui connait dont bien son sujet.
Radio France : une crise très politique Hubert Huertas
http://www.mediapart.fr/journal/france/010415/radio-france-une-crise-tres-politique

Je voudrais achever mon article sur une touche de gaité et d’optimisme en chansons pour toucher au moins deux générations de lectrices et lecteurs. Avec deux titres pour nous serrer les coudes et continuer les luttes à tous les niveaux où que vous vous trouviez.
HK et les Saltimbanks « On lâche rien ».

HK et les Saltimbanks vont sortir le 20 avril 2015 un nouvel album « Rallumeurs d’étoiles », j’y reviendrai dans un prochain article pour manifester mon enthousiasme. Ils seront en tournée dans toute la France, à la fête de l’Huma de Bordeaux le 16 mai, le 17 septembre 2015 à St-Herblain pour les 120 ans de la CGT…
François Béranger : « Manifeste »

Un jour on pourrait chanter en chœur : on ne lâche rien !

A SUIVRE…