Rebecca Wengrow nous offre « Trois quarts d’heure d’éternité »

Rebecca Wengrow nous offre « Trois quarts d'heure d'éternité »

Trois quarts d’heure d’éternité est le titre du dernier roman de Rebecca Wengrow. Un petit format, pour un grand livre, agréable à lire, à tenir en main et à emmener partout avec vous, dans une poche ou un sac.

Comme à son habitude, Rebecca Wengrow nous propose une œuvre recherchée, travaillée et bouleversante, qui nous invite à cheminer dans les couloirs gris et lugubres de la prison de Fresnes devenus, pour la circonstance, les couloirs du temps voire ceux de la mort carcérale d’êtres humains déshumanisés qui y déambulent tels des zombis sans âmes, par manque de vie.

Cette œuvre est un voyage, entre l’amour et la privation de liberté, dont on ne revient pas indemne, comme si l’auteur devenait le personnage d’Eva et nous criait toute sa souffrance liée à l’enfermement de son amour, à la désillusion, au désenchantement, durant toutes les pages de son très beau roman qui se dévore en un rien de temps et nous tient en haleine jusqu’au point final.

L’amour, ici, n’a plus son sens initial car les sentiments y sont bridés, bafoués, pour devenir purement platoniques. Eva et Seth semblent se contenter d’effleurements, de baisers sauvages, de regards intenses ou de quelques caresses échangées furtivement, en ayant peur d’être surpris par le maton du parloir, digne héritier machiavélique d’un gardien de stalag ou de camp de concentration. L’amour devient impatient, introuvable, invivable, douloureux, non consommé et ne dure que le temps d’une visite de trois quarts d’heure.

On peut condamner un individu à perdre sa liberté pour, dit-on, payer sa dette à la société mais doit-on pour cela le priver du droit d’aimer et condamner sa famille à la même peine. Comment réinsérer, dans cette atmosphère, un être humain dont on ne s’occupe plus et auquel on ne donne plus aucune valeur morale, pendant le temps de sa détention, l’invitant forcément à récidiver dans ses actes délictueux ou criminels. Où sont l’éducation ou la rééducation promises, où sont passées les valeurs de notre République lorsque la liberté d’être et d’exister est bafouée à ce point qui ramène les humains au rang de bête immonde et nuisible.
L’attente interminable d’un parloir de trois quarts d’heure, est la pire de toutes les peines. C’est malheureusement dans une prison que l’on fabrique de l’humiliation, de la souffrance, de la folie et du suicide.
Tous les mots, les lignes et les pages, de Rebecca Wengrow décrivent subtilement cette ambiance lourde et froide nous permettant de réfléchir à la condition humaine liée à la privation de liberté. Chacun pourra s’y voir, le temps du livre, et en tirer ses propres conclusions.

Seth, le détenu, semble moins souffrir de sa propre détention que sa compagne Eva, enfermée à l’intérieur de son corps de jeune femme privée d’amour. Lui se réfugie dans l’écriture dont il a toujours été friand, pendant qu’elle reste en attente de ces trois quarts d’heure qu’elle va pouvoir lui offrir, comme les bonbons de son bracelet ou ceux cachés entre ses seins, ne vivant que pour ce temps qui va se figer durant moins d’une heure.
Rebecca Wengrow sait nous captiver, à l’aide de sa plume agile qui oscille entre l’espoir et le désespoir.

Pour trouver le livre de Rebecca Wengrow, suivre le lien ci-dessous :

http://www.editionsfortuna.net/v3/livre.php?Titre=Trois%20quarts%20d’heure%20d’%E9ternit%E9&PHPSESSID=465c52fc4a1a3437389b76d1da2ecdeb