Tout ce qu’on aime au Théâtre est dans cette production. Nicolas Briançon réussit le prodige de ne pas nous ennuyer une seconde pendant deux heures de spectacle , mais aussi de nous faire rire, de nous en mettre plein les yeux et de nous faire réfléchir sur l’Humain, sa cupidité, sa cruauté, ses manigances. A la fois metteur en scène et comédien épatant dans le rôle de Mosca, il est l’épicentre et le garant de cette réussite artistique totale qui marquera sans nul doute les esprits.

Roland Bertin est un VOLPONE grandiose, magnifique, il fait oublier de suite la version cinématographique et s’approprie avec un talent et une grande vérité ce rôle de Célibataire "Picsou" qui vit dans une maison transformé en coffre fort géant et s’amuse des vautours qui en veulent à son héritage.
Bertin est bluffant, c’est un "animal" théâtral dans la meilleure acception de ce terme, il vit le théâtre, il est le Théâtre, il est tout ce que l’on peut attendre d’un grand comédien, il fait penser à Sardou père, à Michel Simon, il est à ce niveau-là de génie.
"Volpone" est une farce à l’italienne tout à fait jubilatoire, irrésistible, magnifique. Cette comédie noire n’a pas pris une ride et Nicolas Briançon a eu la grande intelligence de créer à la fois une ambiance surannée et actuelle à la fois. Danseurs modernes en forme d’oiseaux noirs, new wave alternent avec les personnages en habits d’époque réalisés avec un grand savoir-faire par Michel Dussarrat.
Dans cette pièce on doit citer tout le monde, le décor de Pierre-Yves Leprince mérite à lui seul un Molière, il est inventif, audacieux, esthétiques et est une oeuvre d’art à lui tout seul. Les lumières de Gaëlle de maladive sont dignes du meilleur spectacle de Brodway. La musique savamment dosée accompagne parfaitement le bon déroulement des tableaux tous plus saisissants les uns que les autres.
Au niveau des comédiens le casting est également au niveau de l’ensemble, Bertin le prodigieux est secondé par un Nicolas Briançon valet de luxe machiavélique qui est le pivot principal de ce Volpone. Sans Briançon en incroyable valet, le jeu de Bertin ne serait pas aussi convaincants, les deux sont les héros de la relation maître-valet, on se rappellera longtemps de ce duo de ce face-à-face.
Le reste de la distribution est impeccable, Anne Charrier en tête, belle, convaincante, douée en prostituée tout de noir vêtue elle est la Révélation féminine de cette pièce. Dans une robe et un manteau taillés pour elle, elle prend toute la lumière, elle intrigue, elle séduit, on est sous le charme de tant de grâce et d’une si belle énergie.

Le jeune Matthias Van Khache confirme lui aussi tout le bien qu’on pensait de lui. Il est très juste et très crédible en jeune premier tout de blanc vêtu qui tente de sauver une belle personne de cette bouffonnerie noire autour de l’argent, le mensonge et la manipulation vile.

On pourrait écrire des pages et des pages sur un ton extrêmement laudatif sur cette pièce, mais franchement on a envie de vous dire, faites-nous confiance et SURTOUT ne loupez pas cette pièce, il y a fort à parier que c’est le Spectacle de l’année.

Cet humour noir, salvateur sur l’argent, le sexe, la cupidité est un vin de vigueur artistique. arrêtez toute affaire courante et courez au Théâtre de la Madeleine, j’y étais et croyez-moi j’y ai vu des gens heureux : d’un côté un metteur en scène et ses comédiens et de l’autre le public qui est ressorti avec un grand sourire et des "quelle belle pièce !", "j’ai adoré", "Sublimes Bertin et Briançon" et j’en passe et des meilleurs.

VOLPONE de Ben Jonson. Mise en scène de Nicolas Briançon. Théâtre de la Madeleine. Paris.