Plongez en apnée « Dans l’œil du cyclone » de François Xavier !

Plongez en apnée « Dans l'œil du cyclone » de François Xavier !

Si les troubles convulsifs de l’amour vous chamboulent le calcif. Si ses déclinaisons sur le mode littéraire par un auteur attaché corps plaisir à la langue vous tanguent. Harangue de son héros X ! François Xavier auteur d’un premier roman nous narre sous toutes les facettes son personnage qui ne sait céder qu’à ses sentiments. Autant en emporte le vent de la tempête dans ce roman allusif qui ne laissera pas vos tifs indifférents, ni encore moins votre caboche. Un roman hors norme en somme et qui dégomme tous les poncifs de la rigueur ! Que de vigueur !

François Xavier n’est pas inconnu pour les vieux de la vieille qui ont suivi les circonvolutions du Mague depuis ses débuts. En effet, chroniqueur avéré, ce touche à tout génial du monde des arts et des mots en liberté, si attaché aux mondes méditerranéens, s’est toujours donné du cœur à l’ouvrage, pour vous conter ses univers métissés et si ouverts. Parmi ses nombreux écrits, ceux à teneur poétique furent salués en 1999 par le prix Théophile Gauthier de l’Académie française. Il a consacré deux essais au poète palestinien Mahmoud Darwich et sait aussi offrir ses images sous son œil caméra, à des plasticiens dont Gottfried Salzmann. Et comme si ce n’était pas encore suffisant, il s’adonne aussi à la critique littéraire avec sa bande d’aminches sur la toile et vous décoiffe la timbale : http://www.lelitteraire.com/ déclinaison également des éditions du Littéraire.

« The Roots dans l’œil du cyclone », étonnante cette appellation d’une rubrique musicale en page 27 du numéro de la revue Vibrations de février 2012, qui reprend à sa façon et selon sa propre coloration le titre du roman de François Xavier  ! Etonnant non ? Parfum de scandale pour ce groupe qui assure à la télé des interludes musicaux. Lors d’une émission très populaire, la chaîne NBC accueillit Michelle Bachmann, la sosie facho de Marine Lahaine avec des notes bien senties « Lysin’ Ass Bitch  » (« Salope de menteuse  »). Tsunami garanti !

Toute autre, la bande son entre les pages du roman de François Xavier  : Higelin, Gainsbourg, Mozart, Roger Waters, et tant d’autres…. accompagnent X le personnage principal protéiforme très en forme avec les femmes. A toute berzingue au volant de son Assomme-Martine, il pilote sa fureur de vivre. James Dean la mort aux trousses lui colle la frousse au derche dans son cinoche, avec un je éphémère narrateur qui relance la machine quand elle s’emballe.

X ne sait pas rester en place. Il déplace sa carcasse avec application et ostentation du Sud Est de la France aux accents de Pierre Vassiliu à ses débuts et sa « Marie en Provence  » qui était loin trop loin de lui, côté cour hors foule carnaval. Venise, les gorges du Verdon, New-York et même Hollywood… et j’en passe alpaguent X au passage.

A propos d’une certaine Marie, pas la pucelle qui se fit engrosser par le bœuf mironton, mais une bachelière « Droite comme l’obélisque, elle sort toisant du haut de ses un mètre soixante et un, la masse humaine qui grouille mais s’écarte néanmoins devant ce petit bout de femme, belle comme un ange qui marche sans se soucier de l’obstacle  ». (page 195)
Cette Marie qui dans ses lettres se réfère à Prévert, il l’a dans la peau. Lui le beau phraseur en public et en tête à tête. Lui l’hédoniste flamboyant et gambergeant à l’afflux de tous les plaisirs, il tombe raide dingue de cette Marie. « Se retrouver, sereine, dans l’œil du cyclone : s’y afficher avec une telle simplicité comme si les apparences étaient trompeuses  ». (page 25).

Pétri de littérature pour son turbin de chroniqueur connu et réputé, lorsqu’il croit toucher le fin fond avec elle, il débite ses visions lucides sur la société et se donne un rôle. « Comment ramener le troupeau vers l’essentiel et lui faire comprendre qu’il est en train de se convertir à l’abrutissement ? Comment dire aux gens, sans les braquer, que le capitalisme actuel, la société du spectacle, l’interactivité n’ont d’autres but que de les contrôler ? De les domestiquer. De les transformer en pions qui consomment et qui votent sur ordre  ». (page 95)

X excelle dans au moins deux domaines, l’amour sensuel et la culture de l’esprit, qui comme vous le savez fondent des frontières poreuses entre ces deux peaux sensibles. A chaque page, je découvre des trouvailles stylistique et même certaines touches d’humour qui savent me caresser.
Dans sa dédicace, François Xavier, le cave m’a cligné de l’œil avec l’histoire du petit singe en rut qui tringle au hasard une belle paire de miche, sauf que horreur, quand la gueule de l’impénétrable rugit, c’est la cata. Sauf qui peut, le singe veut sauver sa peau et se planque derrière les pages d’un journal. « Le lion arrive, essoufflé et lui demande : vous n’auriez pas vu un singe passer en courant ? Le singe qui a enculé le lion ? demande innocemment ce dernier. Comment ?!, s’exclame le lion, c’est déjà dans la presse ? » (page 113) Trop drôle !

Il y a aussi ce passage avec lequel je partage tous les points (avec X mais aussi bien naturellement avec son auteur), ma vision d’une certaine littérature chevillée au corps et qui est pour ainsi dire jamais clamée et éjaculée dans un roman. « Pour acheter un livre il faut aimer les mots. Se passionner pour une histoire. Etre attiré par un auteur avec lequel on partage des idées et dont on apprécie le style. Et non parce qu’il a une belle gueule ou un discours plaisant ! On doit savourer par avance l’imagination qui nous fera décoller et la jouissance physique que la musique de ses mots nous procurera  ». (page 171). « Dans l’œil du cyclone  », ce roman rentre justement en résonnance fort à propos. D’autant plus pour moi, qui suis totalement étrangère au milieu qui se vautre dans l’opulence, tiré au forceps d’un bouquin de socio du couple Pinçon-Charlot où évoluent les héros. Ma curiosité s’en voit ravie.

Un autre raison et pas des moindres, qui vaut aussi de lire ce roman réside dans une scène particulière d’un érotisme flamboyant, qui doit faire bander le père Henry Miller dans sa tombe. Jamais encore je n’avais lu une telle force du jouir dans le tantrisme littéraire qui flamberge entre les lignes de François Xavier. C’est un auteur qui a la capacité de se transmuter dans la peau d’une femme et ressentir comme elle cette volupté offerte par X, un homme qui connait l’anatomie et le fonctionnement sensuelle des présences féminines au doigt et à la langue fine, pour fusionner les filtres de l’amour physique à son apothéose. Annabelle est vraiment très belle. " Son cul ne lui prodiguait plus la moindre douleur mais une drôle de sensation venue d’ailleurs. C’était tout son corps qui s’embrasait. Elle aurait très pu ressentir cela par l’entremise d’une opiacé. Ou lors d’un accident de voiture, le corps broyé par les tôles. Elle n’était plus que nerf à vif. Brûlure. Limon. Ciel et terre. Soleil. (…) Elle succombait dans le délicieux désastre du jouir pur… De l’énergie. Une absolue infinité…" (pages 145 / 146 et 148, huit pages en tout d’une jouissance littéraire absolue !).

Pas facile l’amour à trois, un homme X et deux femmes Marie et Annabelle qui sont attachées à lui et, même complices entre elles et comme le laisse suggérer la quatrième de couverture « Finalement, ce n’est pas un roman d’amour mais plutôt un roman sur l’amour  ».
En tout cas un roman à la plume très affutée où le travail littéraire n’effraie pas son auteur. Il a du style et aime particulièrement nous entrainer avec lui dans les troubles de ses personnages. Il pousse loin devant le bouchon de leurs tempéraments tempétueux. Liberté, liberté de ton dans les propos et les corps à corps avec la vie, le vit en plus comme argument qui se veut à la hauteur et hâbleur à ses heures du jour au lendemain.

Si pour vous, la littérature consiste à une subtile déclinaison avec tact de « Ta cigarette après l’amour  » interprétée par Charles Dumont, composition révolutionnaire à l’époque charnière du mois de mai 68 fais ce qu’il te plait, alors ne lisez pas ce roman. Vous allez vous choper de l’urticaire. En revanche si vous avez la capacité de vous extasier à vouloir danser sur un volcan, foncez !

« Rock, rock, Haroun Tazieff / Nous dansons sur un volcan / Rock, rock, Haroun Tazieff / Il faut vivre avec son temps  » (Rock Haroun Tazieff, Costric / Pipin in Ramon Pipin’s odeurs, album 1980 : no sex !)

Dans l’œil du cyclone de François Xavier, Les éditions du Littéraire, février 2012, 239 pages, 17,50 euros.