Pierre, le Barouh/deur, en chansons sur les quatre continents !

Pierre, le Barouh/deur, en chansons sur les quatre continents !

S’il est un des personnages dans la chanson française qui ne se laissera jamais compter la norme aux bornes des routes, c’est bien ce cher Pierre Barouh. Dans un barouf d’honneur mélodique cet éternel jeune homme au cœur pur a fêté il y a quelques années déjà les 40 ans de Saravah, sa maison d’éditions musicales et éclectiques. Acteur / auteur / compositeur / interprète / producteur / réalisateur, sportif, découvreur…. ce touche à tout de génie avec tact et amour s’ingénie à dresser des ponts entre les cultures et sa joie de vivre. Il était temps qu’une éditrice généreuse lui ouvre ses pages, afin que ce conteur né raconte pour notre plus grand plaisir enfin comblé : « Les Rivières souterraines ».

Barouh en hébreu signifie béni. (page 111), mais pas du tout béni ouioui, je vous rassure ! Il me rappelle "Le métèque " de Georges Moustaki ou Herbert Pagani par sa joie de vivre si communicative à passer les frontières. Du Portugal, au Brésil, Québec, jusqu’aux rives du Japon… pour rencontrer les vrais gens et leurs cultures. Puis revenir, des cadeaux plein les bras, de nouveaux sons métissés en musiques à partager avec tous ses amis en France. La musique du monde a toujours eu une longueur d’avance chez ce baroudeur qui se fiche des modes et du commercial carnaval. Il a la bougeotte réfractaire à l’étiquetage de son paquetage. Surtout pas marginal, lui se régale, un peu comme Jean-Roger Caussimon avec son "gauchisme à la mode" qui brocardait les mises en bière de la révolte étiquetée. « Marginal / Voilà que je suis marginal / Vous lisez ça dans le journal / Occident / Quand on veut te rentrer dedans / Tu nous enlises jusqu’aux dents / Sans passion / Tu choisis en toutes occasions / L’angle de la récupération  » (in Marginal Pierre Barouh  : 1976).

L’écologie c’est son credo avant que la mode au vert ne racole aux élections une partition tronquée. A quinze balais il se sent concerné par la banquise et met en chanson ses convictions : «  Quand j’étais phoque  » ! (1950). D’autres après lui avec le même talent suivront, je pense surtout à Nino Ferrer ou Dick Annegarn. Mais la chanson qui arrache des plaintes au Bartos, c’est « La forêt  » (1965) qui correspond à l’univers végétal dans lequel il me bouffe tout mon oxygène. L’orchestration de ses merveilleuse chansons frayent la baguette de compositeurs totalement inconnus à l’époque qui comme le bon vin bonifieront et se feront un nom : Francis Lai, François de Roubaix et tant d’autres tout aussi talentueux qu’eux !

Mais vous connaissez surtout Pierre Barouh pour ses succès indémodables d’ »Un homme et une femme  », Samba saravah  », La bicyclette  », «  Des ronds dans l’eau  »…
Saravah au début annonçait la couleur de la nonchalance : « Il est des années où l’on a envie de ne rien faire » trois ans d’avance déjà sur un mai 1968 paresseux. Depuis, comble du boulot et de l’humour de Pierre Barouh, déboula derrière cette annonce toute une tripotée d’artistes qui ont poussé la porte ouverte du studio pour graver leur galette : le regretté Alain Leprest, Brigitte Fontaine, Areski Belkacem, Jacques Higelin, David Mc Neil, Elisa Point, Fred Poulet, Jack Treese, Jean-Roger Caussimon (excusez du peu !), Mahjun (bien déjanté du violon), Maurane, Maurice Vander (le père du Magma tape dur), Nanà Vasconcelos, Pierre Akendengué, Pierre Louki, Yoshiro Nakamura…. J’en oublie qu’elles et ils me pardonnent ! Dès lors la rivière a pris son essor et c’est avec une délectation dans le sourire mâtiné de dérision que l’ami Pierre a rajouté cette note d’humour très personnelle « Les rois du slow-bizz  ». Vous l’aurez compris, Pierre Barouh n’est pas un homme pressé et encore moins intéressé par les valeurs des apparences.

La naissance de Saravah est le produit d’un malentendu à contre son. C’est de l’insuccès supposé de « Un homme et une femme » le film de Claude Lelouch à court de cartouches pour continuer le tournage, que Pierre Barouh sollicita un distributeur canadien qui prit le risque d’apporter l’oseille et grand bien lui en fit, quand on connait le succès phénoménal que ce film remporta dans le monde et à Cannes !
Mais mieux vaut l’écouter, pour ne pas trahir cette drôle d’aventure !


Pierre Barouh-Saravah©D.Michonneau par pierredavid

Il nous convie à toutes ses existences créatrices entre les lignes de son ouvrage « Les Rivières souterraines  ». L’acteur, le cinéaste, le compositeur lui ouvrent toujours de nouveaux chants et amitiés renouvelées. Une écriture spontanée tannée d’anecdotes et antidotes à la morosité ambiante. Pierrot rebondit et illustre ses propos avec des photos. Ne vous étonnez pas si dans son regard passe un sourire si communicatif. L’homme est vraiment agréable à la compagnie et ses pages se lisent comme le roman de sa vie. J’ai été très émue de retrouver la plume si littéraire de Jean-Louis Bory criant son enthousiasme au film « Ça va ça vient  » (1970) de Pierre Barouh  ! De telles plumes trempées dans les tripes ont totalement disparu du paysage critique cinématographique. Pour vous en donner juste un aperçu :

« Ça va ça vient, c’est 48 heures de la vie d’un ouvrier maçon, un Algérien qui bosse sur un de ces chantiers occupés à transformer le visage (et le corps et l’âme) de Paris. On tue le vieux Paris populaire, le Paris des bistrots, des marchés en plein air, des jardinets à lilas et à ruelle (dans le film de Barouh, il s’agit précisément de l’assassinat de Belleville) pour installer sur les ruines un Paris résidentiel, un Paris chic, qui ne comptera plus que des beaux quartiers  ». (Jean-Louis Bory pour le Nouvel Observateur)
Admirez encore l’œil visionnaire et le bon de Pierre Barouh sur le Paname des bobos qui se dessinaient déjà !

Des extraits de textes de ses chansons égrènent également tous ses propos. Vous les retrouvez aussi dans le CD. Les écouter tout en lisant le livre, exercice périlleux je vous l’avoue mais tout aussi savoureux d’un partage avec cet homme si riche de toute son humanité.
Un peu de « Samba Saravah »pour réveiller le Brésil qui sommeille et vous lever et danser devant votre écran sous le vent de la voix si chaleureuse de Pierre Barouh et ses musiciens à l’unisson.

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Samba Saravah par matcabs

On ne pourra jamais le cerner et tant mieux, homme de liberté des rencontres, c’est un pavé son existence, à chaque moment un nouvel émerveillement. Et en plus, je passe sous silence toutes ses autres aventures avec le théâtre innonvant d’Aleph comme le bonhomme tout le temps, pardi !

Bon voyage avec Pierre Barouh, à l’abordage de façon pacifique de ses « Rivières souterraines » intérieures qui jaillissent à la surface pour nous chanter une autre humanité d’un autre monde possible, avec ses mots, ses images, ses musiques, sa voix chaleureuse.

Les Rivières souterraines de Pierre Barouh, éditions A vos pages, 304 pages, avec plus d’une centaine de photos, octobre 2011, 24 euros

Divers, Dit Vert de Pierre Barouh, double CD / 37 titres, Saravah, octobre 2011

Saravah : http://saravah.fr/histoire/