Interview de JORDAN MINTZER à propos de son livre sur le cinéaste JAMES GRAY

Interview de JORDAN MINTZER à propos de son livre sur le cinéaste JAMES GRAY

C’est un beau livre d’Art et de Cinéma sur le Cinéma et l’un de ses talents les plus prometteurs quoique déjà reconnu : JAMES GRAY.
Jordan Mintzer publie le premier grand livre sur ce réalisateur unique qui a marqué les esprits de tous ceux qui ont vu ses films. A lire, à offrir.


1. Vous publiez chez Synecdoche un livre d’Art et de Cinéma sur James Gray, le premier dans le genre. Ce livre bilingue de conversations avec le cinéaste bénéficie de la préface de Jean Douchet et d’une introduction de Francis Ford Coppola et il y a aussi des interviews de Tim Roth, Mark Wahlberg, Eva Mendes, Gwyneth Paltrow (...). En quoi James Gray mérite t-il un si bel hommage ?

James Gray a déjà une carrière assez "longue" pour un jeune réalisateur, avec 4 films en 20 ans, et le premier (LITTLE ODESSA) réalisé quand il avait seulement 23 ans. Donc même s’il est peut-être au milieu de sa carrière, avec plein d’autres films devant lui (j’espère !), je pense qu’on peut déjà parler d’une œuvre, et d’un auteur — c’est d’ailleurs ce que Jean Douchet explique dans la préface du livre. Le fait que Gray n’est pas connu du grand public - et je trouve que par rapport aux Etats-Unis, il est bien plus connu ici en France - ne nous a posé aucun problème, surtout que pour les cinéphiles de ma génération (c’est à dire ceux qui ont entre 25-40 ans aujourd’hui), Gray reste un cinéaste essentiel, un cinéaste qui nous a marqué, et qui nous marque avec chaque nouveau film.

2. Quel est le style, la patte, de James Gray, qu’est-ce qu’il apporte de plus au Cinéma américain et mondial ?

Je pense que James lui-même résume assez bien sa "patte" quand il parle de APOCALYPSE NOW dans le deuxième chapitre du livre, et de sa mélange de "vérité et spectacle." Dans tous ses films, il y a un désir de rentrer dans le cœur émotionnel de son sujet (la famille, les classes sociales) à travers une histoire du genre : un polar avec du suspens, des fusillades, des courses-poursuites, etc. Alors que les plupart des films du genre aujourd’hui — surtout ceux venant d’Hollywood — s’intéressent seulement au côté spectacle, les films de Gray utilise le genre pour parler des choses plus profondes, et plus personnelles. C’est la même chose au niveau de son style : un style très posé et jamais surfait, où chaque plan est utilisé pour mieux exprimer les émotions de l’histoire et des personnages. Il n’y a pas de trucage : tout est à voir dans le cadre.

3. Est-ce que James Gray finalement n’est pas un peu l’anti Quentin Tarantino ?

Je crois que Gray et Tarantino ont beaucoup des choses en commun : ce sont des cinéphiles qui ont grandi avec le cinéma des années 70, qui ont fait des premiers long-métrages très jeunes (LITTLE ODESSA et RESERVOIR DOGS) qui ont bien marchés et bien lancés leurs carrières. Après, c’est sûr que le cinéma soi-disant "classique" de Gray est loin du cinéma "post-moderne" de Tarantino, et qu’ils ont des façons très différentes d’aborder le cinéma du genre, où de rendre hommage aux films qui les ont marqués. La différence entre les deux me fait un peu penser à celles entre le hip-hop des deux côtes des Etats-Unis : les films de Gray (qui a grandi à NY) sont plus proches du rap intello et sérieux de la côte est, alors que les films de Tarantino (qui a grandi en Californie) sont proches du style flashy de la côte ouest. Mais comme j’aime Dr. Dre autant que A Tribe Called Quest, je crois que les films de Tarantino sont aussi forts que ceux de Gray.

Conversations avec James Gray, Jordan Mintzer, 239 pages, Synecdoche Books, 49 euros.

http://www.synecdoche.fr