L’oligarchie, la sacro-sainte guerre des nantis !

L'oligarchie, la sacro-sainte guerre des nantis !

Gros succès en librairie « Le président des riches. Enquête sur l’oligarchie dans la France de Nicolas Sarkozy », au même titre que « Indignez-vous » de Stéphane Hessel, me font penser, avec mon optimisme habituel, à un proche sursaut du peuple sans plus attendre la grande messe de l’arnaque habituelle des élections pièges à cons ! Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot dans leur enquête minutieuse démonte point par point toute la logique d’un système. Bienvenue dans le monde merveilleux des riches pour les riches qui se shootent au pouvoir. Pour contextualiser les vérités assénées par les deux sociologues, je joue de la guitare avec un fameux médicament : le médiator. A lire cet ouvrage de toute urgence, histoire d’entrée en résistance par tous les moyens.

Depuis que ce fameux couple de sociologues écrit de concert, les beaux quartiers de la haute bourgeoisie, les quartiers d’affaires et autres grandes fortunes, tous les enjeux de la tune n’ont plus aucun mystère pour eux. La sociologie comme sport de combat prend son essor dans leur dernier ouvrage paru.

Rappelez-vous le conte de fée, tout a commencé le 6 mai 2007, à la grande sauterie ultra-select au Fouquet’s pour fêter l’intronisation du petit coq aux sévices commandés des grandes puissances d’argent. Tout le gotha du monde intello et culturel s’en fichait plein la panse, de Clavier, Laporte, Halliday, en passant par Minc dans le rôle du joyeux drille. « La fête au Fouquet’s et cette croisière ont marqué brillamment et bruyamment l’intronisation du nouveau président. Ces rites de passage ont indiqué le sens du changement. La rupture ne sera pas celle que l’on pouvait espérer. Elle sera bien plus proche de l’exhortation de Guizot au XIXe siècle, « Enrichissez-vous », que de la promesse de la campagne présidentielle selon laquelle on pourrait « travailler plus pour gagner plus ». » (page 19)

Et c’est le bouclier fiscal et autres niches fatales qui sortent les crocs du chapeau comme par magie pour asseoir encore plus les bénéfices des ami(e)s du président. « Le bouclier fiscal, la multiplication des niches, la défiscalisations des droits de succession et les paradis fiscaux sont autant d’offensives des plus riches pour manifester et revendiquer haut et fort, leur droit à accumuler toujours plus d’argent et de patrimoine, sans les contraintes de l’Etat redistributeur. Les dominants mènent la guerre à leur guise, et à leur profit ». (page 29) Tant et plus « Bien conseillé par des avocats fiscalistes, les plus riches peuvent multiplier les niches et se rapprocher de l’impôt zéro et parfois l’atteindre. » (page 32)

En contrepartie, les plus pauvres trinquent la misère noire à se saouler la perte élémentaire de leurs droits et de tous les acquis sociaux, avec en prime l’imposition des indemnités d’accident du travail ! Un comble !

Et pour gouverner sans encombre, rien de telle qu’une bonne oligarchie des familles ! « Lorsque tous les pouvoirs sont entre les mains de personnes qui entretiennent des liens étroits et forment un groupe de fait, on peut parler d’oligarchie. La politique, les entreprises, la finance, les médias, le marché de l’art sont contrôlés par des agents sociaux qui connaissent et se reconnaissent, au sens où ils se cooptent mutuellement dans les instances où ils se retrouvent ». (page 39)

Et puis, le système, en symbiose avec ses bons petits soldats de la politique toutes les tendances confondues, saura les remercié rubis sur l’ongle, lorsque l’heure aura sonné de se reconvertir dans la vie civile aux affaires ! Sarkozy intensifie juste cet état d’esprit au nom du lobbying flamboyant. Ainsi quelques exemples : « Florence Parly, secrétaire d’Etat au budget de Lionel Jospin, directrice du fret à Air France. Michel Roussin, ministre de la coopération sous Balladur, conseiller d’Henri Proglio à Veolia et EDF après avoir été vice-président du groupe Bolloré. Elisabeth Hubert, ministre de la santé sous Juppé, enquille depuis 1997 des postes à responsabilité dans l’industrie pharmaceutique » (In Marianne du 4 au 10 décembre : « Y a-t-il une vie après la politique ? » qui ne remet pas du tout en question l’affairisme en politique. Encore un média très libre de ses propos, vendu à ses annonceurs de luxe !).

A propos de la santé, ça peut rapporter gros, l’actualité brûlante illustre parfaitement les propos motivés de nos deux oiseaux en sociologie, les Pinçons, cousins des merles moqueurs au grand cœur du temps des cerises. Intéressons-nous brièvement au Médiator et ses ramifications avec le syndrome de Sarko ! Il était une fois un jeune avocat d’affaires qui s’appelait Sarkozy. Il fut le conseil du laboratoire de Jacques Servier (PDG du deuxième laboratoire français qui commercialise le Médiator), en matière de droit des sociétés. «  Sarkozy a donc cru bon réveiller ces doux souvenirs en juillet 2009 lors de la remise à Servier des insignes de la grande-croix de la Légion d’honneur. « Vous avez fait de votre groupe une fondation ; Raymond (Soubie conseiller social de l’Elysée entre 2007 et 2010) et moi y avons joué un rôle » s’est-il extasié dithyrambique. Un an plus tard éclatait le scandale Mediator ». (Grégoire Biseau in Libération du jeudi 23 décembre 2010, page 6)

Décorer ses amis, c’est dans sa mentalité généreuse selon ses us et coutumes et ses arrangements entre amis de biens. « Vous me reprochez, disait-il à ceux qui critiquaient cette initiative, de vouloir donner des hochets. Mais c’est avec des hochets qu’on mène les hommes ». (page 50)

Il a su s’emparer de la télé, ce formidable outil de décervelage du troupeau pour lui faire passer la pilule de son message subliminal en tant que remède de cheval. « Dans la bataille des idées, la télévision est un enjeu stratégique de premier plan : la boîte à images tend à devenir un formidable instrument de contrôle des esprits qu’il importe de faire fonctionner au service de l’oligarchie et de son président ». (page 69). Rendre les cerveaux disponibles à la connerie et à l’abaissement des consciences, c’est encore un axe de la guerre psychologique que se livre le président.

Cet homme est aussi très attaché à la sacrosainte famille. Il voyait déjà son fils le prince Jean Sarkozy à la tête de son fief du temps de sa jeunesse, et visait pour lui le quartier d’affaires de la Défense en 2009. Seulement, pour une fois son népotisme comme mode de gouvernance a échoué.

En conclusion, au lieu de nous laisser sur notre faim, Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot proposent quelques solutions pour endiguer cette catastrophe du règne de Sarkoléon. Connaitre, percevoir, analyser tout d’abord le fonctionnement du système Sarko, c’est apprendre à se défendre en connaissance de cause. Je reconnais parmi les solutions presque un appel à la grève générale illimitée entre les lignes de « on arrête tout » de « l’An 01 » de Gébé ! « Certes la classe dominante est mobilisée et organisée, mais elle est peu nombreuse. Si elle contrôle la planète financière, elle ne saurait se passer des classes populaires et moyennes qui font tourner la machine économique. Si les ouvriers cessent de couler l’acier, d’assembler les voitures, si les professeurs de mathématiques n’assurent plus leurs cours, si les techniciens et les ingénieurs ne conçoivent plus de nouveaux progrès technologiques, si les chercheurs ne pourchassent plus les virus, si les conducteurs de train et de métro ne conduisent plus leurs convois, la France ne fonctionnera plus. La planète financière s’écroulera bien vite, exsangue, titres et autres obligations n’étant plus que des bouts de papier sans valeur ». (page 189). Faites lire et relire ces lignes à vos chefs scouts des différentes confédérations syndicales, histoire aussi de leur fiche dans les ratiches l’échec des grèves de cet automne contre les retraites jusqu’à ce que mort s’en suive ! Virez les une fois pour toute, vous pouvez très bien vous passez d’eux et agissez par vous-mêmes !

Parmi les autres solutions envisagées qu’il me serait trop long de développer, (lisez donc le livre par vous-même !), j’ai retenu : mettre fin à l’oligarchie politique par l’abolition du cumul des mandats, changer la loi, se réapproprier les droits et les devoirs en tant que vigilance idéologique, rendre le vote obligatoire comme solution à l’abstention (et puis quoi encore, c’est dément de vouloir légiférer la délégation de pouvoir !), nationaliser les banques, supprimer la Bourse et limiter le cumul des mandats dans les conseils d’administration, un impôt progressif prélevé à la source…

Un fameux livre à digérer et à débattre dans l’agir, histoire aussi de redécouvrir en actes la lutte des classes !

Le Président des riches. Enquête sur l’oligarchie dans la France de Nicolas Sarkozy, de Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, éditions Zones, septembre 2010, 223 pages, 14 euros