L’estuaire de la Gironde : tout un monde !

L'estuaire de la Gironde : tout un monde !

Contrairement à Paname qui se croit l’épicentre d’un univers clos pollué et pullulé, où la rive droite tire la tronche à la rive gauche, l’estuaire vivant de la Gironde a parfaitement illustré à la Pointe du Médoc, un courant convergeant solidaire des deux côtés soulevant un mascaret* capable de vaincre le projet inique d’un terminal méthanier au Verdon. Symbole fraternel par-delà les clivages, les particularités géographiques de ce gens authentiques des deux bords, ce Guide de l’estuaire de la Gironde pas du tout bling bling leur rend un vibrant hommage et vous invite bien cordialement à découvrir, flâner à pied, à vélo, en bateau, à cheval ou en tapis volant au grés des deux rives. Bienvenue !

Avec l’estuaire, vous allez en apprendre du vocabulaire ! Le mascaret* justement : ce sont les vagues engendrées par la rencontre entre la marée montante (le flot), lors des marées à fort coefficient, et la masse d’eau du fleuve (page 164). Alexandrine Civard-Racinais pour le texte et Thierry Racinais à la photographie, ces deux là nous régalent d’un guide qui ne laisse rien au hasard les moindres lieux les plus reculés de l’estuaire, avec leurs mots propres et leurs focales. Quelle bonne idée de nous gratifier d’un lexique de l’estuaire en fin de guide, pour vous autres pékins demeurés au tirant d’eau d’une barge de Seine. Désormais : esquire, filadière, haveneau, jalle, marrainaud, matte, carrelet, conche vous embelliront la jactance dans les salons parigos où on cause rance.

Quand la Garonne et la Dordogne tissent leurs eaux. De cette union charnelle du Bec d’Ambes à la Pointe de Grave et Royan, qui peut atteindre jusqu’à 12 km de large, naît un estuaire géant de 75 km de long ! Au bout du compte, l’Océan Atlantique n’a plus qu’à se dorer la chique et aller se jeter un godet géant derrière le paletot, déclarer ouvert son cycle des marées et lever les trombes d’eau à déferler sur ses côtes. Mais revenons en amont toute et restons au courant. L’estuaire charrie entre 2 et 8 millions de tonnes de particules en suspension dont une part se repose en banc de sable et même que parfois, de loin on dirait une île ! Telle cette « Ile mystérieuse » d’une superficie de 4 hectares surgie des eaux en 2009, dans l’axe du phare de Cordouan et dont la tempête Xynthia a renié les ailes de 3 hectares lors de son passage éclair. Pour que plus jamais des fonds de pension amerloches se creusent la bourse en cinoche à vouloir construire un port méthanier ou une toute autre saloperie similaire, la création d’un Parc naturel marin (PNM) entre l’estuaire de la Gironde et le pertuis Charentais est né dans la têtes des gens concernés, à commencer par l’association Une Pointe pour tous (voir mes précédents articles dans ma rubrique « Gens du Médoc) mais pas seulement. Ainsi Jean-Marc Thirion directeur de l’association Objectifs Biodiversités, « découvreur » d’île souligne : Son évolution témoigne que l’estuaire de la Gironde est bien vivant et demeure le dernier plus grand et sauvage estuaire d’Europe ! Tout un symbole pour le futur Parc naturel marin. (page 17)

Dix chapitres, rien que cela, révèlent la richesse de l’estuaire dans ses diversités ! L’estuaire en majesté / Le verrou de l’estuaire / Phares : les vigies de l’estuaire / La route de la Corniche / La route Verte / A la rencontre des troglodytes / Entre vignes et estuaire / Ports, pêches et carrelets / Des îles et des hommes / Faune et flore des marais côtiers. Avec une carte à la fin du livre et à la fin de chaque chapitre le Plus si affinités qui donne toutes les informations nécessaires, telles que les coordonnées des offices du tourisme, les circuits cycliste, les associations locales, quelques adresses pour se restaurer et ou se loger, pour embarquer … Très complet, à ce guide où il ne manque presque rien si ce n’est l’air marin, mine de rien de l’estuaire en sirotant une bonne bouteille de Médoc, pour sûr ! Et pour celles et ceux qui comme moi adorent lire, il y a même une bibliographie d’ouvrages, de revues et d’un DVD. Dommage que les auteur(e)s du Médoc n’y figurent pas ! D’autant plus étrange que l’éditeur du Guide, les éditions Sud-Ouest sont celles la mêmes qui ont racheté le Journal du Médoc qui édite chaque année en période estivale un numéro spécial toujours très intéressant, dont le dernier numéro s’intitule « Un grand bol d’estuaire », étonnant non ? Le dossier Le Médoc en toutes lettres dans le dernier numéro 2010 complètera parfaitement la bibliographie avec les noms de ce très cher Eric Holder et ceux que j’ignorai encore telles les Eric Corbeyrand dessinateur, Dominique Pénide écrivaine, Los Tradinaires, Christian Coulon dont j’ai commencé à me régaler avec Le cuisinier médoquin qui me botte et que j’ai très envie de rencontrer, Bernard Duporge, sans omettre les honnêtes hommes éternels Etienne de la Boétie et Michel de Montaigne, les deux incomparables et toujours actuels ! Dommage encore que l’éditeur de Libre d’images, Bruno Loth, fameux dessinateur créchant à Macau sur l’estuaire et auteur de l’excellente saga des aventures d’Ermo soit passé au garrot !

A part cette légère critique, le guide se lit à la flânerie joyeuse des deux bords de l’estuaire avec un égal régal. Je vous le conseille bien sincèrement et vous souhaite bon voyage et bon vent d’estuaire.

Guide de l’estuaire de la Gironde de Alexandrine Civrard-Racinais et Thierry Racinais, éditions Sud-Ouest, 168 page, 2010, 9,90 euros