La construction de Port 2000 a entraîné la destruction de près de 1000 hectares de zones humides (vasières, frayères...). Aucune mesure compensatoire n’a limité les dégâts. Les avocettes, oiseau emblématique de l’estuaire protégé par une directive européenne, nichaient là par centaines il y a une dizaine d’années. Il n’y en a plus qu’une poignée... Le projet d’extension des infrastructures portuaires et le prolongement du grand canal du Havre a de quoi inquiéter. « Contrairement à ce qu’il clame, ce n’est pas un projet écologiquement responsable, explique SOS Estuaire, une fédération d’associations et d’individus pour la protection des espaces naturels de l’estuaire de la Seine. La destruction de près de 500 hectares de zone humide serait un énième coup porté par le grand port maritime du Havre (GPMH). Les multiples maux dont souffre notre estuaire (compartimentalisation, artificialisation, continentalisation) vont encore s’accentuer et entraîner la dégradation de sa biodiversité. »

La zone humide menacée est exceptionnelle. Aujourd’hui, elle accueille une faune et une flore menacées, dont le râle des genêts, oiseau menacé au niveau mondial. La mare plate est le refuge de près de 200 espèces patrimoniales, insectes, amphibiens, plantes, oiseaux, mammifères. Demain, elle deviendrait une vaste zone logistique bétonnée où l’on ne croiserait plus que des conteneurs pleins de produits fabriqués au bout du monde dans des conditions sociales et environnementales pas très recommandables.

Le prolongement du grand canal pose aussi de gros problèmes. « Il aurait des incidences notables, pour ne pas dire plus, sur le fonctionnement hydraulique et hydrogéologique de l’ensemble de la réserve naturelle, reprend SOS Estuaire. L’importante compartimentalisation qui comble et assèche les zones humides de l’estuaire serait renforcée par ce projet et ce malgré les éventuelles mesures environnementales et compensatoires que le GPMH sortira de son chapeau. »

Pour contrer le projet du GPMH, les écologistes proposent une idée alternative : l’aménagement du canal de Tancarville et le rehaussement de ses ponts pour développer le trafic fluvial. « La solution préconisée par SOS Estuaire serait de nature à épargner une des dernières zones humides rares de l’estuaire et aussi de réduire massivement le coût financier d’un tel projet budgétivore d’argent public (plus de 250 millions d’euros). » Seront-ils entendus ? Rien n’est moins sûr tellement le « débat public » est bidon, là encore… Quatorze rencontres ont été programmées entre le 8 octobre 2009 et le 7 février 2010. Des rendez-vous tellement mis en scène, amidonnés, biaisés, tronqués, chloroformés, chronométrés qu’ils ne mènent à rien. Et gare aux gorilles plantés devant la scène pour le cas où de dangereux ultra-écolos-autonomes auraient la mauvaise idée de kidnapper le micro ! Quant aux « cahiers d’acteur » rédigés par diverses associations, ils ne pèsent pas lourd face aux moyens considérables déployés par le GPMH.

Dimanche 31 janvier, journée internationale de la protection des zones humides, les écologistes normands vont organiser une grande manifestation-randonnée pédagogique. Rendez-vous à 10 heures sur la route industrielle (à l’est de l’usine Lafarge, face à l’entrepôt Sea Invest, sur la commune de Saint-Vigor d’Ymonville). Une banderole de SOS Estuaire servira de point de repère. La marche sera animée par des naturalistes. Prévoir bottes, vêtements chauds, jumelles et pique-nique. À 14h30, un film sur l’estuaire sera projeté dans une salle de la mairie de Saint-Vigor d’Ymonville. Entrée libre.

Cette initiative est organisée par SOS Estuaire, Écologie pour Le Havre, la Ligue de protection des oiseaux Haute-Normandie, le CHENE, Haute-Normandie Nature Environnement, Éco-Choix, Estuaire Sud... Au fait, 2010 a été proclamée année de la biodiversité en France... Un détail qui a dû échapper au GPMH...

Informations sur la manifestation au 02 35 42 11 98 ou au 06 16 70 41 90. Vous pouvez lire le cahier d’acteur de SOS Estuaire sur son site Internet.

Les deux dernières réunions du « débat public » auront lieu le jeudi 28 janvier, à 19 heures, salle Arthur-Fleury (rue Maurice-Thorez) à Gonfreville l’Orcher et le jeudi 4 février, à 19 heures, aux Docks Océane (rue Marceau) au Havre. Pour avoir une idée de la chose, visitez le site du débat public.

Dessin : CPIG