Le Sida nouveau est arrivé !

Le Sida nouveau est arrivé !

Une équipe de chercheurs français a découvert un variant du virus HIV qui leur permet de penser que le syndrome de déficience immunitaire identifié chez des singes a franchi la barrière des espèces et se transmet désormais à l’homme.

Les chimpanzés ont longtemps passé pour être à l’origine de l’épidémie provoquée par le virus HIV. Il vient d’être identifié chez une femme originaire du Cameroun une contamination par un virus d’un nouveau type, proche du SIV, ou Simian Immunodeficiency Virus, proche de celui que les scientifiques ont détecté en Afrique chez des gorilles, puis des chimpanzés atteint d’une maladie semblable à celle qui affecte leurs cousins humains depuis presque trente ans.

Le SIV passe pour être la variante simiesque du virus qui affecte les déficiences immunitaires chez l’homme. Il en serait d’ailleurs à l’origine, y compris pour les partisans d’un scénario différent de la thèse officielle. Mais l’équipe du Pr Jean-Christophe Plantier, du Centre hospitalier de Rouen, considère à présent que le virus a également pu passer du gorille à l’homme, selon une étude publiée dans la revue Nature Medicine.

La patiente à l’origine de l’étude est une femme de 62 ans, testée positive au VIH en 2004, peu après s’être installée à Paris en provenance du Cameroun. Elle a vécu près de la capitale Yaoundé, mais dit ne pas avoir été en contact avec des singes ou de la viande de brousse. Les chercheurs ignorent encore si ce variant du virus est très répandu ou non. Ils pensent qu’il pourrait se propager sans avoir été remarqué. Sa reproduction rapide montre qu’il est adapté aux cellules humaines, soulignent-ils.

Un réseau français de laboratoires étudie la diversité génétique du VIH depuis 2001. Au cours de cette surveillance, l’attention des chercheurs a été attirée par cette personne, dont les tests aux anticorps ont clairement fait remarquer une infection au VIH. Mais ce n’est qu’au moment où ils ont analysé l’ensemble du patrimoine héréditaire du virus qu’ils lui ont trouvé une grande similitude avec le virus SIV repéré chez les gorilles. La preuve par les protéines, à l’aide desquelles on peut déterminer la souche du HIV, n’a cependant pas donné les résultats escomptés.

On connaît jusqu’à présent deux sortes de virus VIH : HIV-1 et HIV-2, nés de virus différents provenant de différentes souches simiesques. Le HIV-1 est pour le moment le plus fréquent, et sa souche est divisée en trois groupes : M, N et O. Le virus porté par cette patiente, qui n’est pas atteinte du Sida, paraît cependant se différencier de ces trois groupes. C’est en analysant la totalité de son génome que l’équipe du Pr Jean-Christophe Plantier a trouvé la correspondance avec le virus SIV.

Cette découverte "montre qu’il faut continuer à surveiller étroitement l’émergence de nouvelles variantes du VIH, particulièrement en Afrique de l’Ouest et centrale", estime l’équipe du service de virologie générale du CHU de Rouen. Avec la plus grande probabilité, le virus est passé du gorille à l’homme, et les chercheurs proposent aujourd’hui de d’identifier un nouveau groupe du virus par la lettre P. Selon eux, cette femme n’est probablement pas un cas isolé, l’avancement des recherches ne permettant pas de dater la transmission par-delà la barrière des espèces.

Toutefois, son développement dans l’organisme de la patiente indique une adaptation au corps humain de longue date. Ce nouveau groupe de virus doit par conséquent se trouver chez d’autres cas d’infection au HIV au Cameroun ou peut-être aussi dans d’autres pays, selon les scientifiques. Des recherches complémentaires devraient permettre de le découvrir. Une infection au VIH se traduit par un taux de lymphocytes CD4 et une immunité de plus en plus faibles. Ensuite se déclare le Sida. Malgré un grand nombre de virus dans son organisme, cette patiente n’a pas encore besoin d’un trop grand nombre de médicaments.

Mais selon l’équipe du Pr Jean-Christophe Plantier, d’autres cas devraient pouvoir être observés dans le centre et l’ouest de l’Afrique, d’où proviennent les groupes déjà répertoriés de virus HIV, et les chercheurs sont dès lors incités à mieux surveiller la naissance de nouvelles souches de virus. En ce qui concerne celui qui affecte les primates, il était jusqu’à présent largement considéré comme inoffensif. Mais des scientifiques américains ont remarqué récemment que les chimpanzés peuvent aussi présenter les symptômes du Sida avec une infection au virus SIV.