Les bénéfices de Goldman Sachs font peur !

Les bénéfices de Goldman Sachs font peur !

Première grande banque américaine à publier ses résultats au 2ème trimestre 2009, Goldman Sachs a vu sa performance dopée par l’amélioration des marchés financiers et par une hausse des honoraires dans ses activités de conseil.

L’action Goldman Sachs a pris 0,6% à plus de 150 dollars en fin de matinée dans un marché en baisse à la Bourse de New York, après avoir progressé de 2% lundi sur l’anticipation d’excellents résultats de la première banque d’affaires de Wall Street. L’ambiance est nettement meilleure qu’à la fin de l’été dernier, avant même que 400 de ses employés, soit environ 1% de ses effectifs, prenaient la porte.

La banque a réalisé un résultat net de 2,7 milliards de dollars, ou 4,93 dollars par action, contre 2,05 milliards ou 4,58 dollars lors des trois mois clos le 30 mai 2008, époque à laquelle le calendrier de l’exercice de Goldman était différent. Le produit du trading a fait un bond de 93% par rapport à l’année précédente. L’activité de garantie d’émissions et autres augmentations de capital a réalisé un produit record de 736 millions de dollars. "Il y a moins de concurrence dans ce domaine", a expliqué le directeur financier de Goldman Sachs, David Viniar, lors d’un point de presse.

Goldman Sachs a réservé 6,65 milliards de dollars pour les salaires, les bonus et les primes du trimestre, presque moitié plus que ce qu’elle a mis de côté l’année dernière à la même époque. Ainsi, l’employé moyen est-il susceptible de gagner plus de 900.000 dollars en 2009. Son directeur exécutif Lloyd Blankfein, les cadres supérieurs et les commerçants d’étoile recevront probablement des dizaines de millions de dollars. La crise financière semble donc aujourd’hui n’être qu’un mauvais souvenir à Wall Street.

Ces résultats "font l’effet d’une explosion, mais je ne pense pas qu’ils surprennent vraiment quiconque", a commenté Keith Davis, analyste chez Farr, Miller & Washington, cité par l’agence de presse Reuters. Le produit dans la banque d’affaires est ressorti à 1,44 milliard de dollars, ce qui représente une baisse de 15% par rapport à l’année précédente mais une progression de 75% par rapport au premier trimestre de cette année. "L’environnement est très favorable pour ce genre d’activités. Les spreads sont très larges, les émissions d’obligations et d’actions sont plutôt fortes".

Toutefois, Goldman Sachs a inscrit une charge exceptionnelle de 426 millions de dollars pour le remboursement des fonds reçus dans le cadre du plan Tarp d’aide publique au secteur bancaire. Goldman a reçu au total 10 milliards de dollars du Trésor américain dans le cadre du TARP (Troubled Asset Relief Program). David Viniar a déclaré à la presse qu’il n’y avait "pas de calendrier" pour le rachat par la banque des warrants émis dans le cadre du plan de sauvetage américain du secteur financier. Demain, on rase gratis !

Paul Kanjorski, un représentant démocrate du House Financial Services Committee, estime que les bénéfices en augmentation sont un signe de reprise économique : "Existe-t-il une loi interdisant les bénéfices aux États-Unis" ? L’élu américain s’exprimait devant des journalistes en cherchant à leur démontrer l’excellence de la politique de subventions massives entreprise : "Cela prouve qu’il existe des fonds disponibles pour être investis et c’est un bon signe pour l’économie".

En fait, le décalage entre les bénéfices des activités de trading et les médiocres résultats dans l’investissement trahissent un défaut de concurrence actuel, avec la disparition de Bear Stearns et de Lehman Brothers, ainsi que l’absorption de Merrill Lynch par Bank of America. Des voix se sont donc faites entendre pour suggérer que les bénéfices dégagés par Goldman Sachs ont été subventionnés par les contribuables américains.

"Il devrait y avoir au moins un certain engagement moral de la part de Goldman Sachs parce que son paquet de bénéfice est soutenu par les contribuables, qui souffrent de l’économie la plus pauvre que nous avons vue depuis soixante-dix ans", a déclaré Rich Ferlauto, directeur d’un fonds de pension pour les agents de l’administration des États-Unis. Les démocrates du Congrès sont en train de réviser la réglementation du secteur bancaire.

Des mesures pour maîtriser un marché des produits dérivés en grande partie dérégulé sont à l’étude, et c’est justement une source importante des bénéfices de Goldman Sachs dans ce trimestre. Un autre programme devrait permettre la création d’une agence fédérale pour la protection du consommateur, afin de limiter la gabegie des crédits hypothécaires ou à la consommation.

"Nous pensons faire de bonnes choses", a prétendu David Viniar. "Nous aidons l’économie à récupérer". Matt Taibbi a fait paraître un long article controversé dans le magazine américain Rolling Stone au sujet de Goldman Sachs, sous le titre "La grosse machine à bulles américaine". Tout un programme !