Hadopi va devenir la Police du Web

Hadopi va devenir la Police du Web

Un nouveau projet de loi destiné à compléter le volet répressif de la loi Création et Internet, rejeté en dernière instance, est en passe d’être soumis au conseil des ministres. La censure du Conseil Constitutionnel est manifestement restée en travers de la gorge du pouvoir, qui a la main lourde.

Le site Internet de l’hebdomadaire Le Point donne les grandes lignes du prochain texte de loi destiné à suppléer aux mesures censurées par l’assemblée des sages. Il pourrait être présenté la semaine prochaine au conseil des ministres et "devrait, selon toute vraisemblance, se borner à quatre ou cinq articles", indique une source proche de Christine Albanel.

Les détracteurs du texte initial ont objecté qu’il ignorait que le délit de contrefaçon existe déjà dans le droit français, et qu’il est réprimé. Bien obligé, le ministère de la Culture s’y réfère désormais, et en confiant l’initiative de la sanction au juge, il laisse le téléchargement illégal dans le droit commun, avec une sanction pénale de 3 ans de prison et de 300.000 euros d’amende. Passer outre la décision de justice serait ensuite suivi de deux ans de prison et 30.000 euros d’amende.

Pour Pascal Rogard, le directeur général de la Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques (SACD), "la justice frappera peut-être moins souvent que l’Hadopi mais elle aura peut-être la main plus lourde". Alors que les professionnels du disque et du cinéma anglo-saxons s’orientent vers des ententes commerciales entre les distributeurs et les fournisseurs d’accès pour mettre le téléchargement illégal en échec, les pouvoirs publics français choisissent en définitive la répression. Un accord est en effet intervenu entre Virgin Media et Universal pour proposer une offre de téléchargement sur abonnement en contrepartie d’une coupure de l’accès Internet.

Il semble que les distributeurs français ne croient pas à l’essor du téléchargement et souhaitent préserver leurs parts de marché chez les disquaires et dans les salles de cinéma… Hadopi devrait se voir confier les fonctions de police sur Internet et délivrant deux avertissements à l’auteur de téléchargements frauduleux dans un premier temps, puis en lui dressant une sorte de procès-verbal, comme dans le cas d’un excès de vitesse ou d’un stationnement abusif sur la route.

Il s’agit d’une ordonnance pénale qui offre à l’autorité une procédure accélérée, afin d’éviter les lenteurs administratives. Pour autant, le système envisagé ne change rien au fond de l’affaire. D’un côté, les pouvoirs publics devront se doter de moyens importants pour contrôler le trafic sur Internet, des moyens en logiciels et en recherche qu’ils paraissent encore loin d’estimer… En réalité, l’autorité espère s’en décharger auprès des ayants droit, auxquels il est toujours demandé de dénoncer les internautes délinquants à la nouvelle autorité.

Comme Le MAGue l’a déjà signalé, l’Autorité de Régulation des Mesures Techniques (ARMT), mise en place après l’adoption des précédents textes destinés à réglementer le bon usage d’Internet, n’a jamais été saisie par les ayants droit en deux ans d’existence. "La complexité de la loi n’y est sans doute pas étrangère", reconnaissait son secrétaire général Jean Berbinau dans nos pages, "de même que la parution tardive des décrets d’application".

D’un autre côté, l’État souhaite encore avec la loi Création et Internet obliger l’internaute à garantir la fiabilité et l’honorabilité de sa connexion… Vœu pieux, qui sera certainement satisfait lorsque les pouvoirs publics contraindront les fournisseurs d’accès à vendre à leurs abonnés les fameux logiciels qu’ils nous demandent d’adopter afin de sécuriser les lignes.

 

 


Il faudra bien un jour sanctionner l’infraction,
Punir tous les méfaits virtuels de délinquance
Et présenter aux gens la note en conséquence
De leur conduite aussi funeste en cette action.

Un pauvre idiot n’a pas compris l’interdiction
D’écouter la musique hormis sur la fréquence
Autorisée en tout bien court dans l’éloquence,
Car un marchand n’a rien compris à la fiction.

Le cœur rompu ne n’avoir pu pour la musique,
Un homme a recouvert son refus d’amnésique
Car l’escroc n’entend pas entrer par effraction.

Mais l’âme a des ressorts devant cette aptitude
Pour voir la vie au mieux soumise à la caution
De l’injonction bien faite aux fins de servitude.