Dress code plouc de rigueur au Château de Versailles

Dress code plouc de rigueur au Château de Versailles

Jean-Jacques Aillagon administre le château et le domaine de Versailles et ne mégote pas sur les principes républicains. C’est la raison pour laquelle il a interdit l’entrée des jardins aux membres de l’association Le Bal de Versailles habillés à la mode du XVIIIème siècle. Plus sérieusement, ses motifs sont moins vertueux : il s’agit de faire de la résidence du Roi Soleil la cash machine dont le Trésor public a grand besoin.

Catherine de la Villesbrune anime une association regroupant des personnes bien dans leur siècle qui mettent leur énergie à faire revivre l’histoire de Versailles et de ses environs, à travers la danse, la musique et la fête. Un agenda très dense offre aux amateurs de multiples occasions pour se donner l’illusion de revivre les grandes heures de l’ère baroque, en revêtant les habits d’un marquis ou d’une courtisane… Le temps fort de cette communauté sympathique se déroule aux plus beaux jours du printemps, avec Le Bal de Versailles, le lendemain duquel les participants se donnent rendez-vous en costume du XVIIIème siècle dans les jardins du Château de Versailles pour y faire une balade.

L’idée de Catherine de la Villesbrune n’est évidemment pas de restaurer la monarchie absolue en complotant contre la république, en témoigne les nombreux courriers d’élus des communes du voisinage, qui apprécient l’esprit festif et bon enfant des membres de l’associations, qui pendant quelques heures à l’occasion d’un événement ou d’une commémoration, font revivre quelques pages d’histoire pour le plus grand bonheur de la population. L’association, poussée par le succès de ces opérations, entend d’ailleurs les présenter à travers la France, dans d’autres lieux chargés d’histoire. Mais toujours avec le soutien des autorités locales.

Cette année, les services de Jean-Jacques Aillagon donne une fin de non-recevoir à la requête de Catherine de la Villesbrune en ce qui concerne la promenade le 1er juin en costume d’époque dans les jardins du Château de Versailles : je regrette de ne pouvoir apporter de réponse favorable à votre demande, la présidence du Château de Versailles ayant pour principe de ne pas donner suite à de telles manifestations, qui ne font pas partie de l’offre culturelle que prépare les équipes de notre établissement, à l’attention de nos milliers de visiteurs quotidiens. Baste ! Tout le monde sait les Versaillais tellement attachés à la royauté, qu’ils mettraient la république en danger rien qu’en montrant au grand public le faste dont le pays était capable à l’époque…

En réalité, les craintes de Jean-Jacques Aillagon sont moins pures. L’offre culturelle à laquelle ses services font référence, consiste à conserver la haute main sur toutes les manifestations qui se déroulent dans le domaine dont il a la garde, moyennant espèces sonnantes et trébuchantes ! Depuis le passage de Christine Albanel à l’établissement public du Château de Versailles, la grande ambition des administrateurs est de transformer les monuments les plus visités en centres de profit.

Expositions payantes, mise en place de parkings, installation de baraques à souvenirs, péage pour accéder à une partie de plus en plus importante des jardins… Tout est bon pour mettre du beurre dans les épinards des fermiers généraux républicains ! Récemment, à l’occasion d’une exposition intitulée Fastes de Cour et Cérémonies royales, un studio photographique est installé afin que les visiteurs qui le souhaitent se fassent tirer le portrait en insérant leur visage dans un décor en carton pour apparaître avec le costume de louis XIV sur le cliché. Prix de cette offre culturelle : 18 €.

Le mois dernier, le maire de Versailles s’est fait l’écho d’une partie de la population pour s’inquiéter de la remise en question de la gratuité de l’accès aux jardins qui entourent le château. Alors que ces espaces verts, qui couvrent plusieurs hectares constituent pour les résidants de Versailles un lieu d’agrément et une occasion pour se détendre au grand air, des formules d’abonnements sont étudiées pour contraindre les habitants à payer l’usage du domaine public. Une petite révolution dans Versailles. On comprend maintenant pourquoi Jean-Jacques Aillagon ne souhaite pas y voir prospérer des initiatives dont il n’aurait pas la gestion sur ses terres…

Jean-Jacques Aillagon s’est déjà fait remarquer lors des dernières Journées du Patrimoine en souhaitant la suppression du ministère de la Culture de son prédécesseur au Château de Versailles… Son action rue de Valois s’est distinguée par la pingrerie dont il a fait montre en ce qui concerne la restauration des monuments historiques, au point que leurs administrateurs ont craint des outrages irréparables. Le 30 décembre 2008, il donnait une interview au quotidien vespéral pour suggérer la remise en cause la légitimité du ministère dont il a eu la charge quelques années plus tôt. Il va sans dire qu’en affichant des ambitions mercantiles, il y a incompatibilité à promouvoir la culture.