"Welcome"… en Ariège

"Welcome"… en Ariège

Welcome, le film de Philippe Lioret qui se déroule à Calais vous a ému et tourmenté. L’histoire vraie de Claudine Louis, en Ariège, va vous achever.

Il n’y a pas si longtemps, l’Élysée et le ministère de l’Immigration affirmaient d’une même voix que l’article 622-1 du code CESEDA concernant « l’aide au séjour d’un étranger en situation irrégulière » ne menaçait que les passeurs et les trafics clandestins et rémunérés de personnes. Faux.

Pour la quatrième fois, après des affaires similaires à Marseille, à Calais et dans l’Aveyron, une personne est poursuivie en justice au titre de l’article 622-1 du code CESEDA. Le procureur de Foix a inculpé Claudine Louis, de Saint-Girons, « d’aide à un étranger en situation irrégulière » et devra comparaître devant le tribunal correctionnel de Foix le 21 juillet 2009.

Claudine Louis a raconté son incroyable histoire le 5 juin. « Informée de la présence depuis plusieurs mois, à Paris, dans un parc, d’une cinquantaine d’Afghans réfugiés, dont une famille, je m’y suis rendue cet hiver. La famille en question m’a précisé que sa situation s’était améliorée car la mairie du Xème arrondissement l’avait logée à l’hôtel. Au cours de la discussion avec d’autres Afghans, l’un d’eux m’a émue : jeune et malade. J’ai proposé de l’héberger chez moi pour le préserver du froid, le soigner et l’aider à régulariser sa situation. Dans un premier temps donc, il a été soigné (médecin, radios), puis nous avons effectué les démarches nécessaires à l’obtention de ses papiers d’identité (taskéra) et à la rédaction de son parcours (en dari et en français). »

Munie de ces papiers, Claudine Louis s’est rendue à la préfecture de Foix qui l’a orientée vers un commissariat. « Au commissariat, après avoir joint par téléphone la préfecture, conseil nous a été donné de faire traduire par un traducteur agréé auprès du tribunal cette taskéra et de nous rendre ensuite à la sous-préfecture de Saint-Girons. Ce que nous avons fait. Dans ladite sous-préfecture, après avoir joint par téléphone la préfecture de Foix, on nous a orientés vers le Tribunal de Saint-Girons où on nous a assuré que celui-ci n’était pas compétent et qu’il était préférable d’attendre une réponse de monsieur le Procureur (à qui j’avais envoyé un courrier pour lui demander la nomination d’un administrateur ad hoc). »

Ne perdant pas patience, Claudine Louis a poursuivi les démarches, toujours au grand jour. « Par trois fois, en vain, j’ai joint le secrétariat du Procureur. Là, j’ai appris que ma lettre s’était « égarée ». J’ai donc envoyé un fax et demandé à pouvoir m’entretenir de vive voix ou par téléphone avec monsieur le Procureur ou son secrétariat. Refus. Aussi, face à cette situation ubuesque, j’ai déposé le jeune à la préfecture, sollicitant la protection de l’État français pour un jeune mineur. Suite à cela, j’ai été auditionnée à la gendarmerie de Saint-Girons (sur requête du Procureur) et récemment convoquée devant le Tribunal Correctionnel de Foix le 21 Juillet. »

On se pince pour être sûr de ne pas cauchemarder. Voilà une citoyenne exemplaire qui, depuis début 2009, frappe à toutes les portes imaginables (gendarmerie, préfecture, Conseil général, sous-préfecture, tribunal d’instance, procureur…) pour qu’un adolescent soit pris en charge dans le cadre de la protection de l’enfance et voilà qu’elle se retrouve assimilée à une délinquante ! Il faut un sacré toupet pour l’accuser d’avoir caché un clandestin alors que, avec une farouche insistance, elle alertait tout ce que la France peut compter d’administrations ? Administrations qui n’ont pas brillé par leur diligence...

Faut-il rappeler à tout ce petit monde que la Convention internationale des Droits de l’enfant (articles 1 et 20), que le code de l’action sociale (articles L 112-3 et L226-2-1) et que le code pénal (article 223-3) nous oblige à venir en aide aux mineurs isolés et égarés ? Obaïdullah Samari, jeune Afghan de 16 ans et demi, en errance pendant plusieurs semaines, entre pleinement dans ces critères.

Il est choquant que l’on puisse, en France, en 2009, être inquiété alors que, par simple humanité, on cherche simplement une solution institutionnelle à la détresse d’un adolescent.

Pour protester contre cette injustice insupportable, vous pouvez écrire au procureur de la République, Parquet de Foix, place du Palais de Justice 09000 Foix.

Envoyez vos réactions au Réseau Éducation sans frontières et à la Ligue des Droits de l’Homme en écrivant à morisse.christian[at]yahoo.fr (mettre Obaï en objet).