Les cadres supérieurs des sociétés technologiques et des médias du monde se sont rassemblés près de San Diego la semaine dernière pour élaborer les stratégies d’avenir de leurs entreprises et pour détecter les outils pour rendre Internet plus social et plus mobile encore. Mais de Hulu à Twitter en passant par Microsoft, de palpitants entretiens sur les innovations du Web et les nouvelles technologies ont été marqués par la même incapacité de la plupart des leaders de l’informatique à gagner enfin de l’argent grâce à leurs créations, quelle que soit leur popularité.

C’est le consommateur qui décide où il va aller, il nous appartient désormais d’imaginer quel en sera le modèle économique, a déclaré Raj Kapoor, le directeur général du fonds de capital-risque Mayfield, au cours d’une allocution à la conférence All Things Digital. Lui qui a fondé Snapfish, un site Internet de partage d’images acquis par Hewlett-Packard en2005, estime raisonnable pour les start-up qui élaborent de nouveaux modèles de services sur Internet de se concentrer sur la fidélisation des utilisateurs afin de les impliquer dans leurs projets. Si vous n’en avez aucun, qui se posera la question de votre modèle économique, a-t-il conclu.

Pour les plus grandes entreprises, dont les opportunités d’affaires ont évolué avec Internet, l’absence de modèle économique est un sujet de préoccupation devenu majeur. Les réseaux sociaux comme Twitter et Facebook sont passés de services d’avant-garde sur le Web en phénomènes médiatiques, et concurrencent les acteurs établis de longue date en attirant l’attention du consommateur potentiel. L’iPhone d’Apple, avec ses applications logicielles mobiles ont par ailleurs ouvert de nouvelles voies pour Internet et de nouveaux besoins chez les consommateurs.

Facebook a maintenant plus de 200 millions d’utilisateurs actifs, le double de ce qu’il avait en août 2008, alors que le trafic au site Web Twitter a augmenté d’à peu près 83% en un mois, pour atteindre 17 millions de visiteurs uniques en avril, selon comScore. Jeff Zucker, le président de NBC Universal, a confirmé à l’assistance que sa chaîne de télévision est prête à diffuser ses contenus sur les sites de partage de vidéo les plus populaires, voire à ouvrir un espace dédié sur un réseau social tel que Facebook. Mais il soutient que le Web ne peut accueillir la télévision de façon viable, avec des productions professionnelles, seulement dans le cas où le modèle économique sur Internet évolue de manière à couvrir les coûts de programmation.

Nos programmes seront vus à la télévision, en ligne et sur beaucoup de plates-formes différentes, mais la question est de savoir comment ils vont nous rémunérer, a déclaré Jeff Zucker. Ses craintes expriment le souhait de NBC de ne pas se fourvoyer, ce qui la retient d’investir en ce moment sur Internet. Hulu, le site Internet de vidéos coproduit par NBC, News Corp et Walt Disney, révèle une croissance rapide. Il offre aux utilisateurs de nouveaux outils en ligne, comme un moteur de recommandation et une application à partir d’un ordinateur de bureau. À la question quand Hulu pourra-t-il générer du profit ? Jeff Zucker a répondu bientôt.

Le champion de la nouvelle catégorie des entreprises sur Internet, Twitter, a fait le plus d’étincelles à la conférence. Les nouvelles fonctions décrites par les cofondateurs Evan Williams et Biz Stone en ce qui concerne les innovations et les possibilités de faire de l’argent ont été très appréciées, mais ils ont reconnu qu’ils ne savent toujours pas quelle sera la principale source de revenu de leur société dans les deux ou trois ans qui viennent : il nous faut intégrer à notre programme le fait que nous ne savons pas, a bien voulu dire Biz Stone.

De leur côté, Twitter et Facebook sont tellement intégrés au paysage actuel sur Internet que d’autres produits plus récents sont considérés comme des évolutions de leurs propres applications. Palm devrait incorporer un dispositif intégré de recherche universelle qui permettra des requêtes approfondies au moyen de messages Twitter à partir de l’appareil. Yahoo est en train de moderniser sa gamme de produits en ligne et ses services en intégrant la dimension sociale des réseaux modernes.

Georges Nahon, président de la division Orange Lab, chez France Telecom, estime que la plupart des produits exposés dans cette conférence sont des adaptations aux tendances existantes, plutôt que de véritables innovations. Il prévoit que des percées technologiques interviendraient sous 12 à 18 mois, grâce à des étudiants qui ne sont pas encore sur le marché du travail. Pour les entreprises qui tentent de craquer le code du modèle économique profitable sur Internet, cela suppose de retourner à l’écriture de nouvelles lignes de code.