Le "hallal sex" en vogue en Egypte !

Le "hallal sex" en vogue en Egypte !

Une première en Egypte et dans le monde arabe ! Une femme s’exprime publiquement sur la sexualité. Dans le respect strict de l’éthique musulmane.

Dans sa promotion du « hallal sex », elle ose parler de tout. De ce qui est haram (interdit) : la masturbation, la sodomie, l’homosexualité, la pénétration pendant les menstrues... Puis de ce qui est hallal (permis) : les relations sexuelles entre le couple « légitime », l’orgasme féminin, l’impuissance, la fellation... Et bien d’autres aspects qui évoquent un sujet qui relève du non-dit. Elle ? C’est la sexologue égyptienne Heba Gamal Kotb qui anime la célèbre émission « Kallam kebir » (parole importante), diffusée par la chaîne satellitaire « El Mehwar. Qui est cette femme qui se propose d’éduquer les hommes et les femmes dans leur vie sexuelle afin de les aider à re-trouver un équilibre et un épanouissement dans le cadre de la morale musulmane ? Quel le profil de celle qui a osé brisé un tabou qui pèse sur les sociétés arabes telle une chape de silence qui prend l’allure d’une hypocrisie « verticale » (entre générations) et « horizontale » (entre pairs) ?

Une femme qui brave les interdits

C’est pour la première fois qu’on parle ouvertement de la sexualité à la télévision. C’est la première fois que le sujet de la sexualité qui habituellement est relégué dans les confins de l’inconscient individuel et collectif s’introduit dans les foyers. Et cela, grâce à une femme qui s’obstine à afficher du courage malgré ses détracteurs qui l’accusent de pervertir les jeunes garçons et les jeunes filles et de les inciter à avoir des relations sexuelles avant le mariage.

Une femme qui montre de l’audace face aux esprits conservateurs et rigoristes parmi eux, Cheikh Youcel El Badri qui lui reproche d’être impudique, d’envahir les chambres à coucher des couples et de contribuer à l’augmentation des pervers.

Une femme qui se nourrit de détermination dans une société où le sexe fait partie du continent noir de la vie. Et qui poursuit le cheminement de sa voie professionnelle malgré les embûches de toutes sortes auxquelles elle se retrouve confrontée.

Courage ! Audace ! Volonté ! Détermination ! Autant de qualités qui se présentent comme des éléments constitutifs d’une personnalité forte et tenace qui viennent s’ajouter au fait d’appartenir à une frange de la société cairote qui lui permet de réaliser ses ambitions qui lui tiennent particulièrement à cœur : enseigner, diffuser et inculquer aux hommes et aux femmes mariés les fondements et les principes d’une sexualité « saine », « respectueuse » et « religieusement correcte ». Car tout en parlant, en expliquant, en cherchant à convaincre, Heba Kotb ne peut cacher l’amour inestimable qu’elle voue à sa profession et bien évidemment à son sujet de prédilection : la sexualité.

Cette sexologue que beaucoup ont tendance à comparer à la Canadienne Doct Ruth puise les fondamentaux de sa matière de la science mais également des préceptes moraux de sa religion, l’Islam et les « hadiths » (paroles du prophète Mohamed) qui ne conçoivent les relations sexuelles que dans une perspective « hallal », c’est-à-dire dans le cadre des liens du mariage.

Ainsi, cette femme qui est devenue célèbre à travers le monde arabe poursuit un objectif très clair : braver des interdits en prodiguant des conseils en matière de sexualité dans un cadre essentiellement normatif. Son but ? Améliorer les relations entre les hommes et les femmes, les aider à mener une vie sexuelle épanouie et éviter ainsi les maladies, les séparations et les divorces car de son point de vue, les problèmes liés à la sexualité sont très souvent à l’origine des crises matrimoniales. « Le sexe est toujours tabou dans les sociétés musulmanes et arabes, explique Heba Kotb. Il faut en parler librement et publiquement sans pour autant choquer.

Une vedette dans le monde arabe

Derrière l’écran de télévision. Face aux téléspectateurs, hommes et femmes qui semblent apprécier « Kallam kebir ». La tête et le corps couverts d’un voile qui durcit davantage les traits de son visage, la sexologue Heba Kotb commence son émission par invoquer Allah et son prophète. Puis elle écoute, parle, répond aux questions, donne son opinion, propose des solutions. Et par cette attitude d’écoute et d’empathie, cette femme qui appartient à la bourgeoisie cairote, qui a été formée à la sexologie dans la fameuse université américaine, Maimonide en Floride ne finit pas d’être admirée, de plaire et de séduire. Des hommes. Des femmes. Et mêmes des jeunes car selon notre sexologue, « les jeunes sont très curieux. Dans leur quête, ils risquent d’avoir des informations erronées soit dans la rue ou à travers des sites Internet ou encore par le biais de films X ».

Heba ? s’exclame Tamer (25 ans). Oui, elle est extraordinaire. Je regarde son émission avec mes parents mais nous n’avons jamais parlé de sexe. Moi, je pense que j’en parlerai avec mes enfants », ajoute-t-il en esquissant un petite sourire réservé qui trahit l’existence d’une gêne qui ne dit pas son nom.

« Heba est notre héroïne, confie Faten en vacances à Paris. Entre nous, je dois avouer qu’elle m’a beaucoup aidée à surmonter mes difficultés sexuelles. Mon mari et moi, nous ne rations aucune de ses émissions. Et comme nous étions très intéressés, nous avons osé pousser la porte de son cabinet à Mohandissine ».


La sexualité est un « don de Dieu »

explique Heba Kotb qui exprime ouvertement sa fierté d’appartenir à l’Islam qui de son point de vue est une religion libérale et progressiste car elle accorde une place importante à la sexualité des couples mariés. Ce « message divin », Heba Kotb veut le propager à son tour en expliquant aux hommes et aux femmes avides d’apprendre et de comprendre ce qui est hallal et ce qui est haram .

C’est ainsi que lors de ses émissions télévisées au cours desquelles elle fait intervenir sur le plateau des religieux notamment, elle explique que la masturbation est une pratique qui n’est certes pas recommandée par la religion mais préférable à l’adultère. Pour la masturbation féminine, notre sexologue affirme que les femmes n’ont pas à recourir à cette pratique qu’elle estime d’ailleurs nuisible à leur sexualité pour deux raisons. D’une part, ces dernières sont contraintes de rester vierges jusqu’au moment du mariage. D’autre part, elles n’ont pas les mêmes besoins que ceux du sexe masculin. Ainsi, en prônant la chasteté féminine, Héba Kotb n’hésite pas à établir une différence entre les hommes et les femmes en matière de sexualité.

Dans sa thèse intitulée « Sexualité en Islam » soutenu à l’université Maimonides en 2004, elle soutient l’idée que l’homosexualité est un péché. Un acte contre nature. Et que par conséquent, l’Islam condamne ceux qui la pratiquent. Par ailleurs, elle compare les homosexuels à des alcooliques voire à des toxicomanes. Elle prétend même avoir « guéri » des hommes homosexuels en les aidant à avoir du désir pour des femmes, à se marier et à avoir des enfants.

D’un point de vue occidental, cette femme qui explique la sexualité par le prisme de la religion peut passer pour une sexologue qui adopte des positions essentiellement moralistes, rigoristes voire homophobes. Pourtant, il semble important de sortir de notre attitude ethnocentriste. Car en Egypte et dans les pays arabes, parler de sexualité relève d’un véritable parcours du combattant et requiert beaucoup de courage et d’audace. Pour la grande majorité des femmes et hommes téléspectateurs, Heba Gamal Kotb est considérée comme un agent de changement social qui vise la transformation des comportements et des mentalités relatives à la sexualité selon une orientation essentiellement religieuse. Et c’est justement la combinaison des deux qui, d’une part, séduit dans un pays qui se caractérise par une forte islamisation des comportements et des moeurs . Et d’autre part, donne à cette sexologue qui ose parler d’un sujet qui relève de l’intimité de tout un chacun, une légitimité aux yeux de beaucoup.

Et cela, Heba Gamal Kotb l’a bien compris :

le « hallal sex » est un facteur d’épanouissement, de stabilité et de paix sociale. Et la paix des ménages et la régulation sociales passent par la sexualité dans une perspective essentiellement religieuse !