Devenus parents grâce à une mère porteuse !

Devenus parents grâce à une mère porteuse !

Fondé le 25 octobre 2006, le Comité de Soutien pour la Légalisation de la Gestation Pour Autrui (C.L.A.R.A.) se veut un lieu d’écoute, d’information, de conseil et d’expertise où des couples infertiles et notamment des experts réfléchissent aux aspects légaux de la Gestation Pour Autrui, pratique procréatrice interdite en France. Quels sont les objectifs de cette association ? Ses positions ? Ses revendications ? Ses arguments ? Ses actions… Telles sont les principales questions auxquelles ont répondu les principaux animateurs de C.L.A.R.A. qui viennent de lancer une pétition en faveur de la légalisation de la G.P.A. signée par plus de 400 personnes.

Le MAGue : Quels sont les objectifs de C.L.A.R.A. ?

C.L.A.R.A. : Ses objectifs sont multiples. A l’origine, aider le couple Clara et Doc (Sylvie et Dominique) dans leur défense contre l’action du Parquet qui voudrait annuler les actes de naissance de leurs deux filles de huit ans nées en Californie par G.P.A., ce qui aboutirait à ce qu’elles n’aient plus d’état civil en France. Puis agir pour la reconnaissance des droits de tous les enfants nés par G.P.A.. Ouvrir un débat démocratique sur la question des mères porteuses et aboutir à sa légalisation en France au titre de l’émancipation des femmes. Proposer la création d’un encadrement légal, médical et psychologique qui reconnaisse la G.P.A. comme un acte de don entre femmes ayant donné leur consentement éclairé. Sensibiliser l’opinion publique et faire évoluer le droit sur la G.P.A. en France et en Europe dans le sens d’une meilleure protection des enfants nés ou à naître, des parents intentionnels et des gestatrices.

Le MAGue : Quels sont vos arguments scientifiques à l’égard de la G.P.A. ?

C.L.A.R.A. : Nous pensons que l’infertilité est une maladie majeure pour notre société et source de souffrances silencieuses pour de nombreux couples et leur famille. Nous constatons que la G.P.A. improprement amalgamée avec « la procréation pour autrui » plus connue sous le qualificatif de « mères porteuses ») est la seule réponse médicale à de nombreuses formes d’infertilité, telles que les malformations utérines (congénitales telles que le syndrome MRKH ou consécutives à l’exposition au distilbène), les conséquences des cancers de l’utérus, l’impossibilité clinique de porter un enfant sans mettre en danger avéré la vie de sa mère, etc¦
Nous considérons la femme libre et responsable de son corps et qu’il lui appartient à elle seule de décider de venir en aide à une autre femme en portant un enfant avec lequel elle n’a aucun lien génétique. La G.P.A. ne doit pas être assimilée à de la « vente d’enfants » car son objet n’est pas l’enfant à naître, mais les conditions de développement in utero d’un embryon déjà existant, issu d’un projet parental autre que celle qui le porte.
La G.P.A. est éthique lorsqu’elle se déroule dans un cadre assurant toute précaution médicale, physique, juridique, psychologique. C’est un acte compassionnel en deux femmes.

Le MAGue : Et les arguments d’ordre juridique ?

C.L.A.R.A. : La société a évolué (le sondage IPSOS de décembre 2008, montre que 62 % des français sont favorables à la G.P.A. et que 17 % des femmes seraient prêtes à porter un enfant pour une autre femme) et les lois de bioéthique, auxquelles est rattachée la gestation pour autrui, et qui ont été discutées à la fin des années 80 sont largement dépassées et de plus, inapplicables car elles poussent les couples à se rendre à l’étranger, ou pire, dans la clandestinité en France. La loi actuelle est sans rapport avec le respect du corps humain. Dans la pratique, nous constatons l’inapplicabilité de cette loi qui ne protège en rien le respect du corps de la femme et conduit le Parquet à faire annuler des filiations reconnues légitimes en contradiction avec les lois internationales qui consacrent la primauté de l’intérêt de l’enfant. Nous demandons la modification de la loi dans le sens d’une autorisation et d’un encadrement de la G.P.A. dans des conditions strictes et humaines, qui protège tous les protagonistes, ce qui est possible dans le cadre de l’A.M.P. (Assistance Médicale à la Procréation).
Pour l’établissement de la filiation, le droit actuel français ne reconnaît en effet que la réalité biologique constitutive de la combinaison de l’accouchement maternel et de l’A.D.N. paternel. Plusieurs millions d’enfants naissent en dehors de ce cadre. C’est le cas des familles monoparentales sans reconnaissance par le père ou aussi des familles homoparentales, mais aussi de la plupart des P.M.A. (don de sperme, G.P.A.) ou encore de l’adoption et de l’accouchement sous X.

Le MAGue : « La G.P.A. est une pratique contraire à l’intérêt de l’enfant et de la mère porteuse », entend on souvent dire ?

C.L.A.R.A. : C’est une assertion basée sur le principe séculaire selon lequel « la mère est celle qui accouche ». Ce qui est loin d’être vrai (car sinon le déni de grossesse n’existerait pas, ni l’accouchement sous X) l’intérêt de l’enfant est d’être élevé par des parents qui ont désiré sa venue au monde et qui s’engagent de manière irréfragable à l’élever, à l’aimer et le protéger. C’est le cas d’une famille construite à l’aide l’A.M.P. comme la G.P.A. L’intérêt de la mère porteuse réside dans la réalisation de sa motivation : aider une famille qui ne peut pas avoir d’enfant à se construire. Penser qu’une femme ne peut choisir d’aider une autre femme sur la base d’un consentement libre et éclairé rappelle les assertions passéistes qui ont dénié aux femmes le droit d’accéder à certaines professions, ou le droit à l’avortement ou le droit de voter ici celui de décider de mener à terme ou non une grossesse. Ceux qui affirment le contraire ont une profonde méconnaissance des pratiques éthiques de G.P.A. à l’étranger. Quant à la mère porteuse, il est important de prévoir dans le dispositif le fait qu’elle puisse continuer à avoir des liens avec les parents et avec l’enfant qu’elle a porté (comme un droit de visite par exemple).
Ce qui dérange surtout les détracteurs de la G.P.A., c’est l’impossibilité de l’anonymat du don de gestation, alors que le don de gamètes repose, en France, sur ce principe, et sur lequel le législateur réfléchit d’ailleurs également actuellement et est susceptible de revenir.

Le MAGue : La révision de la loi bioéthique est prévue en 2010. Que préconisez-vous afin que les législateurs légalisent la G.P.A. ?

C.L.A.R.A. : Continuer l’excellent travail commencé par le Sénat et remis en juin 2008, rapport très étayé, pragmatique et très bien documenté. http://www.senat.fr/rap/r07-421/r07-421.html
Il faut que le législateur mette en phase le droit avec la réalité, dans un cadre légal et strict défini ci-dessus. Nous préconisons donc que l’ensemble des institutions qui actuellement réfléchissent sur cette question fassent comme l’a fait le Sénat en 2008, à savoir étudier ce qui se passe ailleurs, dans les pays démocratiques où ça marche, s’appuyer sur les experts et sur les études existantes au lieu de dire « qu’on n’a pas assez de recul ». Nous suggérons que la Mission d’Information Parlementaire créée à cet effet auditionne tous les experts du sujet, notamment ceux de notre association certes (seulement 4 sur 30 l’ont été à ce jour) mais aussi de tous ceux qui ont signé l’APPEL que nous avons lancé le 31 mars dernier et auquel près de 400 personnes ont déjà signé http://claradoc.gpa.free.fr, qu’elle rencontre les acteurs de la G.P.A. dans les pays qui ont légalisée et encadré cette pratique comme la Grèce, l’Angleterre pour ne citer que l’Europe mais aussi le Canada ou les Etats-Unis. Nous avons le sentiment que le rapport de la révision de la loi de bioéthique est déjà écrit à l’avance. Madame la Ministre de la Santé, dont dépend la révision de ces lois, s’est prononcée CONTRE la G.P.A. avant même que les travaux aient commencé !