Les crimes sexuels obsessionnels de Nagisa Oshima

 Les crimes sexuels obsessionnels de Nagisa Oshima

Le film : « L’obsédé en plein jour » donne la part de domination à l’homme qui prend corps plaisir dans les femmes qu’il viole. Dix ans plus tard, en 1976, Oshima inversera la vapeur et offrira à sa superbe héroïne « l’Empire des sens » au pays du soleil levant où décidément le réel évolue et se caresse à toutes les touches.

Lors d’un vertige catastrophique qui s’est abattu sur un village, des personages vont s’entrechoquer. Dans et un va et vient continu entre le présent d’un assassin joué avec le brio habituel par Kei Sato et deux femmes : son épouse l’institutrice Matsuko (l’actrice Akiko Koyama, la femme d’Oshima) et Shino exilée à la ville après un choc sexuel. L’Histoire du village et ses secrets suivent ces personnages dans leurs pérégrinations pour annihiler leurs liens existentiels difficiles à vivre dans un néant divergeant.

Il y a une scène époustouflante de la mise en scène du « double suicide », clin d’œil appuyé une fois encore à la tradition nippone qui consiste à se supprimer soi-même ou supprimer les autres. Un homme s’est pendu à la corde qu’il s’est confectionné avec un soin particulier. Il a les quinquets ouverts. Sous ses yeux, il assiste impuissant au viol de Shino qu’il aimait par l’assassin aux prémices des délices de ses crimes sexuels.
Adapté d’une nouvelle de Taijun Takeda, le titre « L’obsédé en plein jour » qualifie dans la presse un criminel en série qui commettait ses délits en plein jour. Sujet difficile à traiter sans tomber dans les travers d’une triviale poursuite entre les forces de police et le criminel. Issu d’une histoire vraie, celle d’un homme qui a violé et tué une bonne trentaine de femmes au Japon entre 1957 et 1958, Oshima construit son film magistral par le phénomène des retours en arrière. Il rive sa caméra au regard sans complexe du tueur, à la lueur de ce dépossédé de l’amour.
L’affrontement entre l’épouse et Shino dans le train pour éclairer les noirs desseins du mari de Matsuko, nous prolonge dans la verve de l’amour fou, foudroyé de la femme aimante pendue à la crémaillère de la réalité mortifère d’une nature humaine décomposée, est tout à fait stupéfiante de force et de conviction.

Encore une fois, comme souvent chez Oshima, la phrase de clôture juste avant le générique de fin, est ourlée par la bouche de Shino, héroïne malgré elle qui expose son fatal désarroi du tout est toujours à recommencer : « Une fois de plus j’ai survécu, je n’ai que vingt ans ».

L’obsédé en plein jour de Nagisa Oshima, 1966, avec Saeda Kawaguchi, Akiko Koyama, Kei Sato, DVD 9 – Nouveau master restauré, version originale, sous-titres français, format 2.35 respecté – 16 / 9 compatible 4 / 3, noir et blanc, durée du film 95 minutes, préface de Charles Tesson + bande annonce, prix 14,99 euros.

Sortie le 4 mars 2009 et distribué par Carlotta Films, ainsi que dans la verve du retour de la nouvelle vague japonaise :
Eté japonais : double suicide / A propos des chansons paillardes au Japon / Le retour des trois soudards