Xavier Fortin condamné pour la Forme et son Mode de Vie

Xavier Fortin condamné pour la Forme et son Mode de Vie

Le regard dur et les cheveux d’un noir de jais tirés en arrière en une queue-de-cheval, Xavier Fortin s’est vu condamné pour non-représentation d’enfants depuis les onze années où il a pris la fuite avec les siens, les arrachant à leur demande à la garde de leur mère.

La justice a ouvert les yeux et l’a condamné comme il le fallait, sans excès, et c’est l’essentiel, ont-ils à la presse à l’annonce de la décision. Leur père, qui a déjà passé 2 mois derrière les barreaux, a pu sortir libre du tribunal de Draguignan, mais il ne s’est pas montré très expansif devant les reporters qui guettaient une déclaration de soulagement : merci, merci, je suis fatigué… s’est-il contenté de dire avant de disparaître en voiture avec ses deux garçons, âgés aujourd’hui de 18 et 17 ans. Un procès hors norme dont la justice française a de nouveau fait les frais, mais cette fois-ci seulement du point de vue de l’ordre et de la morale publics.

Catherine Martin, à l’origine des poursuites, s’est séparée de Xavier Fortin en 1996 parce qu’elle ne supportait plus la vie nomade et en marge de la société. Titulaire d’une maîtrise de Sciences, l’homme exerçait le métier d’instituteur itinérant, mais préférait à la bagnole et aux cités-dortoirs une roulotte et la compagnie des animaux en pleine nature. Les enfants, Okwari et Shahi’yena, qui sont partis avec leur mère parce qu’elle en a obtenu la garde, n’ont vraisemblablement pas supporté le changement brutal de mode de vie. Quand je les ai enlevés, j’étais en situation de légitime défense de mes enfants. À chaque fois que je les récupérais chez leur mère, je les trouvais dans un état épouvantable, chaque fois j’avais de plus en plus de mal à les retaper, a dit Xavier Fortin au tribunal.

Dans le box des accusés, Xavier Fortin a plaidé la bonne foi et a défendu la légitimité de son acte. Ses 2 enfants l’ont défendu. Mais ce n’est pas le procès des qualités paternelles de Xavier Fortin, on peut être impressionné et admiratif face à l’attachement qu’il a vis-à-vis de ses enfants et l’engagement qu’il a eu pour les éduquer, a estimé le procureur, lors des plaidoiries. Mais on peut aussi être scandalisé par ses actes de désobéissance civile, ses actes de résistance. Les 6 mois de prison qu’il a requis contre leur père n’étaient pas fondés sur sa conduite à l’égard des enfants, mais parce qu’il s’est soustrait à une décision de justice. Catherine Martin au demeurant, ne s’est pas présentée à l’audience, renonçant aux poursuites.

Une fois de plus, la machine judiciaire s’est emballée, sans craindre de s’enfermer dans les contradictions d’une société policée. En réalité, elle apparaît bien aveugle en face des questions de société, qu’il s’agisse d’euthanasie ou d’un dilemme comme celui-ci : si je n’avais pas pris la décision de partir avec eux, j’aurais pu être poursuivi pour non-assistance à enfants en danger, a prétendu Xavier Fortin devant le juge. L’homme est raide et campe une posture plus stricte encore que la justice qui semble dérisoire : moi, je suis un père de famille. J’avais une obligation d’éducation de mes enfants, notre cavale, ce n’était pas un choix délibéré, il n’y avait aucun plan, aucune préméditation. Je l’ai fait parce qu’il y avait un risque d’aliénation évident de mes enfants s’ils restaient chez leur mère.

En ce qui concerne les enfants Fortin, ils paraissent équilibrés, bien plus débrouillards et armés face à la vie que la plupart des gamins de leur génération. Ils ont déjà gagné leur argent de poche en élevant des lapins ou des poussins, et en raison des conditions particulières qu’a commandées leur fuite, exempt de la naïveté qui anime tant d’êtres humains. En ce sens, la justice a refusé de voir l’exemplarité de l’éducation qu’ils ont reçue, et se borne à trancher dans le vif une situation inextricable. Heureusement, elle s’est retenue de forcer la dose.

 

 


Qu’il vive encore en marge avec plein d’animaux
Loin des soucis d’argent des gens et du chômage,
Plus de retraite à prendre et rien ne l’endommage,
Les vrais dossiers du jour ne sont pas de ses maux.

Qu’il vive aussi selon son gré, hors des hameaux,
Mais nous ne pouvons pas fabriquer du fromage,
Les prompts conseils ont des retards à l’allumage
Et ses enfants tous deux hardis, ont l’air normaux.

Il faut consommer plus et que tourne à l’exemple
Notre art de vivre et de râler comme en ce temple
Où des marchands se sont assis pour faire un prêt.

Ses enfants n’ont pas pris des gamins de leur âge
Les tics et les desseins, mais ils ont trait pour trait
Pour leur père un remords absent de tout mirage…