GAZA MEURT SOUS LES "BOMBES" DE NOTRE SILENCE

GAZA MEURT SOUS LES "BOMBES" DE NOTRE SILENCE

Dix huitième jour de l’offensive israélienne contre Gaza où il pleut des balles et des bombes ; où des enfants, des femmes et des hommes disparaissent dans les ténèbres de la folie d’une poignée d’hommes qui ouvrent la porte à la mort rampante. Avec la complicité et la bénédiction des dominants de ce monde qui cautionnent les faits de guerre perpétrés par l’armée israélienne.

Ce matin, comme tous les autres jours, elle broie du noir. Elle étouffe. Elle crie. Elle hurle. Elle maudit cette fatigue de soi qui ne cesse de la narguer, de la taquiner… Et dans son huis-clos intimiste, elle ne prête aucune attention aux news qui racontent la violence et empestent la mort. Non. Elle est trop centrée sur son être qui s’en va à la dérive, dans le flot des larmes qui envahi son corps. Et inonde son coeur. Elle pleure. Elle pleure. Elle pleure. Oh, elle est sur le point de s’engloutir dans les eaux troubles du malheur. Et au moment où elle va disparaître dans la vague de la Mort, cette grande machine qui broie soudainement les destinés, l’image du corps d’un enfant enveloppé dans un keffieh blanc taché de sang vient s’agripper aux rives de son radeau mortuaire.

Un garçon ? Une fille ? Qu’importe ! Un corps. Celui d’un enfant qui gît à même le sol. Le visage ensanglanté. Les yeux troués. Les joues déchiquetées. Le nez arraché. Les lèvres déchirées. Les griffes de la mort ont ravagé son visage. A l’image de ces milliers d’enfants palestiniens qu’Israël assassine et qui pourtant renaissent de leur sang rouge et glacé de peur et de terreur. Oh, ce décor macabre ! Là, sur les corps mutilés de ces enfants innocents, les traces de l’inhumanité israélienne ! Les preuves de la barbarie israélienne ! Les empreintes de la sauvagerie israélienne. Dans toute leur splendeur. Les voyez-vous ? Sentez-vous l’odeur cramoisie du sang qui coule, coule, coule sans arrêt sur cette terre usurpée, volée, subtilisée, violée, assassinée depuis la Nakba ? Entendez-vous les gémissements qui se tordent de douleur de ces voix juvéniles fauchées prématurément ? Ensevelies dans la tombe d’un monde désolé et sans espoir de soulagement ni de bonheur ? Enterrées dans la terre d’un pays détourné de son Histoire qui ne cesse de bégayer devant l’aveuglement du Monde qui a fermé les portes de son humanité aux souffrances et aux douleurs de tout un peuple contraint à l’exil, à la misère, à la pauvreté, à la précarité, aux privations, aux… aux… aux… ? Jusqu’à quand ?

Et dans le silence qui inonde l’immensité de l’espace, dans le bruit infernal des martèlements de l’indifférence collective, la voix de l’enfant ni féminin ni masculin s’élève dans les airs. La voilà qu’elle crie haut et fort son indignation ! La voilà qu’elle se met en colère et s’échappe de ce cauchemar vieux de plus de soixante ans. Puis éclate en mille et une voix qui crient leur indignation, leur ras-le bol, leur refus de l’injustice, des compromissions, et des complicités :

« Nous, enfants de la Palestine, terre de paix, symbole de l’olivier, du keffieh, des enfants de la Pierre, chez nous à Gaza, il neige des bombes, du sang, des cris, des larmes. Le malheur est notre lot quotidien. Nos ventres sont vides. Nos corps sont criblés de balles. Nous sommes prisonniers dans l’antichambre de la mort qui s’acharne à voler notre vie dans un mouvement de va et vient dans les sinuosités d’une existence devenue un vaste lieu abandonné lourd en mémoire de vol et de violence.

Nous, enfants de Gaza déclarons mourir à chaque minute, à chaque seconde, à chaque silence du monde qui se cache pour respirer l’air impur et pollué de cette planète qui a oublié de renouer les fils d’une vieille croyance qui chante l’épopée d’une vie éternelle qui respire l’Amour et la Paix.

Nous, enfants de Palestine, de Gaza, de Tal-al-Hawa, de Cheikh-Ajline, de Haïfa, de Chatila, de Sabra, de… de… ; de… Exilés de l’intérieur et de l’extérieur crions tous ensemble : Halte au Silence ! Car chez nous, on tue ! Car nos pères se meurent dans la solitude froide et cruelle ! Nos mères déambulent entre la vie et la mort dans le monde de l’informulé et de l’informulable ! Halte au Silence ! Et halte au silence ! Car nos enfants deviennent orphelins avant même leur naissance ! Car lorsque « la Palestine appelle, le monde sonne toujours occupé ».

Gens d’ici. Gens d’ailleurs, sortez de vos maisons. Ouvrez vos cœurs. Libérer vos esprits du poids de l’indifférence et de l’inertie. Et allez frapper aux portes de la Vie qui se meurt chez nous… A Gaza… Gaza encerclé. Gaza emprisonné. Gaza étranglé. Gaza étouffé. Gaza privé de ses enfants. Gaza ensanglanté. Gaza dépouillé de son humanité.
Gaza…Ce vaste « camp de concentration et d’extermination à ciel ouvert »… Oui. A Gaza, osez forcer les seuils de l’horreur … Oui. Osez… Osez… Oui. Osez encore et encore… afin que l’Histoire ne soit pas condamnée à se répéter.

Gens d’ici. Gens d’ailleurs, là, tout près de chez vous. A l’intérieur des vos maisons. Dans les interstices de vos cœurs, la violence a atteint son paroxysme. Car à Gaza, les balles israéliennes tuent et assassinent. Sous vos yeux, des meurtres collectifs sont perpétrés depuis la nuit des temps en toute impunité. Au vu et au su de tout le monde. En toute complicité. En toute tranquillité. En toute sérénité. La mort d’hommes, de femmes et d’enfants palestiniens serait-elle donc devenue insignifiante ? Des sous-femmes, ces Gazaouites ? Des sous-enfants, ces Gazaouis/tes ? Des sous-hommes, ces Gazaouis ?
A Gaza, des cerveaux israéliens enfermés dans un Moi collectif mentalement grotesque, répugnant et meurtrier planifient l’extermination d’un peuple. Les voilà qu’ils reproduisent aveuglement ce que des êtres innocents ont vécu sous le régime totalitaire de Hitler. Enfants de la Shoah, votre mémoire serait-elle donc si courte ? Opprimés d’hier, n’avez-vous donc aucun scrupule à devenir les oppresseurs d’aujourd’hui ?

Gens d’ici. Gens d’ailleurs, au nom de quoi sommes-nous le seul peuple qui devrait oublier le passé ? Pour qui se prennent ces gens qui s’arrogent le droit d’occulter ce qu’ils nous ont fait et, en même temps se drapent dans le manteau des victimes ? N’y a-t-il aucune limite, aucun sens du respect pour les victimes des victimes, aucune barrière pour empêcher Israël de continuer éternellement à revendiquer pour lui seul le privilège de l’innocence ? (Edward Saïd).
Alors que les bombes et les balles redoublent de férocité, notre Voix se meurt sous le…

Silence. Et dans son face à face à la mort qui avance d’un pas assuré, elle n’en peut plus de ces voix qui crient. Elle n’en peut plus du silence qui enveloppe l’immensité du monde. Elle n’en peut de son nombrilisme et de sa dépression qui ne cesse de creuser son inéluctable effondrement. Elle n’en peut plus…
C’est décidé. Demain, dès qu’elle ouvrira ses yeux sur la vie, elle répudiera la mort qui rôde autour de son corps et elle ira mêler sa voix à celle de ces milliers d’hommes, de femmes et d’enfants qui meurent sous les bombes de notre silence ! De notre indifférence ! De notre impuissance !

Cet article a été inspiré par les slogans des deux manifestations organisées à Paris pour dénoncer la politique israélienne et défendre le droit des Palestiniens à la Vie.