La Belgique se débrouille très bien sans Gouvernement

La Belgique se débrouille très bien sans Gouvernement

Des voix se sont élevées lundi en France pour déplorer une vacance du pouvoir, les mêmes d’ailleurs qui se verraient bien aux affaires et ne cessent de se chamailler pour distinguer celle ou celui qui devrait y prétendre. Que n’ont-ils observé la situation belge, où la population s’habitue avec bonhomie à une instabilité gouvernementale chronique ? La vie suit son cours, et les affaires reprennent !

Le roi des Belges Albert II, à qui revient la décision de désigner un successeur à Yves Leterme, s’est contenté d’accepter la démission du chef de gouvernement, suspect d’avoir exercé des pressions sur la justice pour accélérer le démembrement de la banque Fortis. Le souverain a seulement confié dans la soirée à un ancien Premier ministre, Wilfried Martens, une mission d’exploration pour tenter de former le prochain cabinet. En pleine crise économique, la Belgique se dirige vers une vacance du pouvoir plus longue que prévue après la démission du gouvernement d’Yves Leterme, aucun nouveau Premier ministre n’ayant pu être désigné faute de candidat faisant consensus.

Le gouvernement Leterme a tenu juste 9 mois, après avoir été formé laborieusement au bout de 282 jours de crise, et les perspectives offertes par de nouvelles élections par anticipation ne paraissent pas meilleures que celles qui s’ouvrent au négociateur nommé par le roi. Elle est même pire, en ce sens que le chef de la coalition, Yves Leterme, personnalité haute en couleurs et suffisamment fédératrice dans le pays, exclut de participer à une autre coalition de transition. Tout comme au printemps 2007, un scrutin populaire ne devrait pas permettre de distinguer une majorité franche et apte à trancher les dossiers qui divisent Flamands et Wallons.

De surcroît se greffe la difficile le règlement de la question du plus gros établissement financier du pays, abattu par la crise des marchés de septembre dernier. Or, le gouvernement intérimaire qui devrait être désigné ne le serait que pour gérer les affaires courantes, comme le fut celui de Guy Verhofstadt, vaincu après les dernières élections législatives belges et jusqu’en mars 2008… Après l’hypothèse d’un retour à la tête du gouvernement d’un autre ancien Premier ministre, Jean-Luc Dehaene, d’autres noms ont été avancés pour reprendre le flambeau, parmi lesquels ceux de Guy Verhofstadt ou le libéral francophone Didier Reynders. Mais aucun de ces noms n’a réussi jusqu’ici à faire l’unanimité parmi les partis de la coalition hétéroclite sortante, allant des chrétiens-démocrates, aux libéraux, et jusqu’aux socialistes.

Malgré ces difficultés, les affaires ne sont pas mauvaises. Dynamique dès l’ouverture, la Bourse de Bruxelles affirme déjà ses prétentions haussières en cours de matinée, dépassant d’une bonne tête ses partenaires européens. À la mi-séance, l’indice national ne décélère pas la cadence, conservant toujours une avance raisonnable. Au sein de l’indice, beaucoup d’animation sur le front financier… Alors que Fortis Holding gagnait près de 5% en matinée, le titre n’avançait déjà plus que de 0,8% aux alentours de midi, et a clôturé les échanges sur un repli modéré de 0,29%. L’inflation a baissé au mois de décembre en Belgique, passant de 3,14% le mois dernier à 2,63%. Ce repli est à imputer à la forte diminution des prix de l’essence, du diesel et du mazout de chauffage. Les prix des produits pétroliers sont en recul pour le 5ème mois consécutif.

En revanche, la Bourse de Paris, comme la plupart des marchés d’actions européens, a effacé ses gains dans l’après-midi pour clôturer sur une note atone mardi, dernière séance complète avant Noël. Le CAC 40 a perdu 0,73%, à 3.128,41 points. La diminution des volumes des échanges, à 2 jours de Noël, accentue sensiblement la volatilité sur les marchés financiers. Le baril de pétrole brut aggrave ses pertes sous les 39 dollars. Au Royaume-Uni, le PIB a finalement signé une contraction de 0,6% au troisième trimestre, contre un recul de 0,5% initialement estimé. En Espagne, la contraction de l’activité s’est accentuée au 4ème trimestre, de 1,5% selon l’estimation initiale, et le pays est entré à son tour en récession.

Des esprits malicieux auront vite fait de noter que la tendance des affaires est inversement proportionnelle à la stabilité de la vie politique dans tel ou tel pays. Nous pourrions ainsi nous sentir rassurés, tout en souhaitant de bonnes vacances au bout du monde à l’ensemble des membres d’un gouvernement français qui n’a de cesse d’inventer de nouvelles mesures controversées pour maintenir la pression sur une population qui n’en a cure. Serait-il par nature anxiogène ?

 

 


Un peuple est-il fichu sans son gouvernement ?
Non ! La nation n’est pas en panne, à la dérive
Et ne s’en fait pas trop pour tout ce qui arrive :
Tant elle est sage et trouve aussi de l’agrément.

Le ciment du royaume est dans son châtiment !
Partager un destin, mais sans qu’on y souscrive
Est plus sûr que d’aller un jour sur l’autre rive,
Car là-bas c’est patent : le gouvernement ment.

En regard, nos tribuns n’ont pas eu d’autre idée,
Que de coller la trouille à ceux, dans l’embardée
D’un pouvoir fort qui se sont dits tous les valoir.

Vouloir être un chef montre un esprit de chicane
Et s’il l’est, le voilà qui s’endort comme un loir,
Mais son peuple est soudain dessaisi de sa canne.