Rencontre avec David "serial striker" Minetti

Rencontre avec David "serial striker" Minetti

Alors que le Combat Libre vient tout juste d’être légalisé en France, les combattants français ont quitté l’Hexagone depuis longtemps. Entre la Thaïlande, le Canada, le Japon ou les Etats-Unis, la fuite des talents est largement entamée. Rencontre avec David Minetti, champion d’Europe de Vale Tudo, qui s’est installé au Vietnam…

Pourquoi et quand as-tu débuté les arts martiaux ?

David Minetti : À l’âge de 4 ans ; mon père était gendarme et ne pouvait me garder à la maison, il m’a donc inscrit au cours de Tae Kwon Do de son ami Pascal Russelo afin de m’occuper la journée.

Et qu’est-ce qui te pousse à continuer aujourd’hui ?

David Minetti : Nous vivons dans la jungle ! A vous de choisir quel animal vous voulez être : le lion ou la gazelle. Si vous voulez être un lion, alors vous devez vous entraînez dur pour ça !

Quelles sont les différentes formes de Combat Libre ?

David Minetti : On dénombre de nombreuses appellations : mixed martial arts ou MMA, pancrace, pancrase, vale tudo, lutta livre… Et les dérivés comme le pankido, le kempo et le karate daido juku. Mais il n’y a pas de grandes différences, seulement dans la tenue qui peut aller du kimono au short de MMA, avec l’obligation de port d’un casque dans certaines rencontres. En fait, sous des appellations différentes se cachent surtout des rivalités entre écoles et des variations dans les règles, avec autorisation ou interdiction de certaines techniques selon les disciplines. Par exemple, en pancrace, les coups sont interdits au sol, alors qu’ils sont autorisés en vale tudo.

Comment se fait le passage du Tae Kwon Do au Combat Libre ?

David Minetti : Difficilement, car le tae kwon do est a des années-lumière du MMA. Mais pour moi, cela s’est fait progressivement, en passant par le full contact , le kick boxing, la boxe thaï… Puis le combat au sol. Mais avant de combattre en free fight, j’ai quand même fait plus de 15 combats en full contact et kick-boxing... J’ai même été champion de France ! La transition ne s’est donc pas faite du jour au lendemain.

Que penses-tu de l’Ultimate Fighting Championship, véritable précurseur aux USA, et souhaites-tu y participer ?

David Minetti : Bien sûr ! Actuellement, l’UFC est au top car le Pride, qui était concurrent japonais, a mis la clé sous la porte. Du coup, c’est clairement la plus grosse organisation mondiale ! Et même si je suis en semi-retraite depuis quelques mois pour développer une activité commerciale, si on me propose un combat à l’UFC, je signe tout de suite et je me prépare comme un Jedi !

Une activité commerciale ? Justement : parlons argent. Qu’en est-il des revenus des combattants par rapport aux autres sportifs professionnels ?

David Minetti : Le MMA, c’est comme la boxe thaï à niveau national, même en international. Tu ne gagnes rien de bien conséquent... Il faut aller à l’UFC et être bien célèbre pour commencer à toucher des bourses intéressantes. Si tu fais ce job pour l’argent, tu t’es trompé de boulot !

As-tu eu un modèle qui a inspiré ta pratique ?

David Minetti : Wanderlei Silva ! Car il est agressif et puissant, et surtout parce qu’il fait partie de ce qu’on appelle les "strikers", c’est-à-dire les frappeurs, par opposition aux "grapplers", qui sont des lutteurs. Comme Wanderlei, je suis un striker... J’aime taper !

Quel est ton meilleur souvenir sur le ring ?

David Minetti : Ma victoire contre le champion d’Europe Jean-Antoine Santarreli en 2002. On m’avait donné perdant avant le match et ça m’a franchement agacé. Du coup, je me suis entraîné comme un fada et je l’ai atomisé en moins de 30 secondes… C’était trop bon : mon deuxième combat en free-fight et je devenais déjà champion d’Europe !

Ton adversaire le plus coriace ?

David Minetti : Hmm… L’Anglais Paul Sutherland, que je salue au passage ! C’était moi en black : mêmes gabarit, mêmes goût du strike… et qui aime aller à la guerre.

Ton mouvement préféré ?

David Minetti : Le slam ! En substance, tu soulèves ton adversaire d’un bras et tu le projettes de toute ta force contre le sol… C’est spectaculaire, et ça fait mal !

En quoi consiste ton entraînement ?

David Minetti : En préparation d’un combat, je m’entraîne 2 fois par jour, 5 jours par semaine. Le matin est réservé pour le cardio et la musculation, et je fais un travail plus spécifique le soir : boxe anglaise ou thaï, lutte, grappling et MMA. En muscu, je m’entraîne tout particulièrement à devenir performant malgré la création d’acide lactique dans les muscles pendant l’effort, afin de conserver vitesse et explosivité. En bref, quand tu sors d’une phase de lutte et que tu es complètement engorgé d’acide lactique, il faut encore avoir la pêche et secouer ton adversaire (rires).

A quoi ressemble la vie d’un combattant professionnel ?

David Minetti : Avant un combat, c’est l’enfer : tu ne sors pas, tu ne fais que t’entraîner, manger et dormir. Tu te tapes 8 heures d’entraînement par jour donc tu ne vois plus personne. Par contre, le soir de la victoire, tu rattrapes le temps perdu et la troisième mi-temps dure toute la nuit !

A quoi occupes-tu tes journées quand tu te n’entraînes pas ?

David Minetti : Actuellement, je passe beaucoup de temps à donner des cours dans ma salle de boxe, au Vietnam. J’y ai quelques champions du Monde, et ça fait bien plaisir ! En parallèle, j’ai créé ma marque de vêtement, "Serial Striker", que j’essaie de développer... Sinon, j’aime faire du trekking en jungle et passer du temps avec ma femme, tout simplement.

Peux-tu imaginer ta vie sans le sport ?

David Minetti : Y’a pas moyen, tu rigoles ! J’aime trop me dépenser pour arrêter de faire du sport.

Que réponds-tu aux détracteurs du Combat Libre ?

David Minetti : C’est bien dommage, car souvent, c’est juste qu’ils n’y comprennent rien et qu’ils n’essaient pas de comprendre. Ils imaginent qu’il n’y a aucune règle et qu’on est des barbares… Tant pis pour eux !

Qu’en est-il du dopage dans le milieu des MMA ?

David Minetti : Je ne vais pas mentir : le dopage est présent en MMA comme dans tous les sports. Mais nous sommes contrôlés… et pas impunis comme au football ou au tennis !

Quel est l’état actuel de la scène française en ce qui concerne le Combat Libre ?

David Minetti : Je crois que c’est maintenant que ça commence ! Depuis que c’est légal en France, les combattants de la nouvelle génération peuvent se faire les dents chez nous avant d’aller taquiner les Anglais... A mon époque, il fallait aller à l’étranger et ça coûtait bonbon.

Pourquoi avoir choisi de vivre au Vietnam ? L’Asie est-elle l’eldorado du free-fight ?

David Minetti : Du free fight, non, mais de la boxe pied-poing, peut-être... Je suis le pionnier de la boxe thaï, du kick boxing et du MMA au Vietnam… A tout juste 31 ans, c’est pas cool ??

Dernière question... Le Combat Libre devient de plus en plus un sport de grand spectacle : si, à l’instar d’un acteur, tu devais changer une ou plusieurs choses dans ton apparence physique ?

David Minetti : Nada ! Je m’aime comme ça.... (rires).