La Madeleine Proust, la francomtoise qui comprend le mieux le béton

La Madeleine Proust, la francomtoise qui comprend le mieux le béton

Certains la croyaient ringarde, has been ou six pieds sous terre (francomtoise), morte et enterrée, son tablier vert rangé définitivement au placard des souvenirs de la gaudriole régionaliste, mais cette diable de femme est inusable et elle nous revient au Théâtre Rive-Gauche en pleine forme, en bonne grand-mère farfelue, bienveillante, totalement en phase avec son époque. La Madeleine Proust lors de la Première de son tout nouveau spectacle a causé, dansé, slamé, rapé, elle se porte à merveille malgré sa carte vermeille, elle parle en vers et contre tous les préjugés, son show atypique drivée par la talentueuse co-pilote Caroline Loeb (chère à ma mémoire musicale référentielle) nous offre la Madeleine qu’on préfère, pas dans le formol mais une belle ouate dégagée du superflu et qui la met bien en valeur comme dans un écrin confortable et rigolo.

Le décor sobre, car dans les petits villages comme ceux de "Derrière-les-gras", les gens vivent principalement dans une seule pièce, une table de cuisine où toute l’action se passe ou quasiment.
Des scènes du quotidien et quelques flash back, un truculent voyage d’enterrement à Marseille qui fera rire la bonne mère et quelques actions qui verront grandir les protagonistes.

La Madeleine Proust n’a rien perdu de son franc-parler, de son accent inimitable et elle vit avec son temps, même si se brancher à l’Internet n’est pas une sinécure ou avoir du réseau n’est pas chose facile lorsque sa maison se trouve en bout de champ de réseau magnétique.

Un peu par hasard, suite à une histoire de portemonnaie retrouvé, Kamel, 14 ans, un petit beur placé en famille dans le pays est devenu le nouveau compagnon d’aventures de la Madeleine. Un gamin du 9/3 passé au 2/5 du Dur au Doubs qui ne peut pas faire du stop à cause de sa figure basanée, mais dont la Madeleine se prend d’affection.
Un peu voyou, un peu voleur et menteur, la Madeleine fait son éducation en échange de quelques cours de philosophie du béton, d’apprentissage du céfran, de ritournelles en rap et slam. Avec passion et gentillesse elle lutte contre les idées reçues et donne sa chance au petit mec, à mauvaise réputation, de la téci.

Une belle fable moderne écrite sans pathos ni morale grossière, une spectacle plein de poésie, servie par un beau texte, une belle lumière et une comédienne/auteure qui est sur scène comme une danseuse d’un autre âge (le troisième sans doute) qui fait sa chorégraphie avec une grande justesse et précision suisse.

Cette création de la Madeleine représente parfaitement l’originalité et le talent hors norme de Lola Sémonin qui fait d’une représentation comique et humoristique un tableau social réussi.

Tout y passe, la Madeleine est une sociologue du temps présent, elle jongle entre l’actualité, le passé, le présent avec une belle assurance, un maîtrise rare.

Beaucoup d’humoristes se sont inspirés de la Madeleine et une fois de plus elle montre qu’elle a su se renouveller et offre un show unique. Bravo aux trois filles, Madeleine, Lola et Caroline pour ce beau moment d’Humanité plein de tableaux tendres, créatifs et qu’on garde dans le coeur.

A voir absolument.

Théâtre Rive-Gauche, 6, rue de la Gaîté, Paris XIV e . Du lundi au vendredi à 19 h 30, le samedi à 17 heures et 19 h 30. Places : de 25 à 35 €. Tél. 01.43.35.32.31.