CHRISTIAN CABROL : PROFESSEUR ET HOMME DE COEUR !

CHRISTIAN CABROL : PROFESSEUR ET HOMME DE COEUR !

En 1973, j’ai eu l’honneur de connaître le Professeur Christian Cabrol qui était un jeune Chef de Clinique âgé de 48 ans. Il occupait tout le 2ème étage du nouveau bâtiment de l’Hôpital de la Pitié, à Paris 13ème.
Le Groupe Hospitalier La Pitié-La Salpétrière était à la pointe du progrès et on y rencontrait des sommités de la médecine et de la chirurgie française comme les Professeurs Sarrazin, Facquet, Pertuiset, Sors et Kuss.

Chirurgien cardiaque de renommée mondiale, Christian Cabrol pratiquait déjà des greffes de coeur depuis un certain nombre d’années et il était même le pionnier de cette pratique... tant en France qu’en Europe. Sa technique était très au point et la réussite était totale. Seuls les phénomènes de rejets étaient à craindre, avant l’arrivée de la ciclosporine. Une équipe formidable, de Chirurgiens, d’Anesthésistes et d’Infirmières de bloc opératoire, entourait le Professeur Cabrol. Sa femme Annie exerçait ses talents d’Anesthésiste à ses côtés. Il n’était pas rare Madame Cabrol se retrouve enfermée, au fond d’un placard, par la volonté de son illustre mari.

C’est grâce au Patron du Laboratoire Central d’Anatomie-Pathologique, le Professeur Guy Chomette (homme attentif qui guida mes pas, comme l’aurait fait un père)... que je fis cette rencontre avec Christian Cabrol qui était, pour moi, le "Pape" des greffes cardiaques.

J’étais en train d’éviscérer un cadavre (sous le regard de mes Maîtres qu’étaient les Professeurs Chomette, Brochériou et Auriol), lorsque le "Grand Christian" arriva en salle d’autopsies. L’homme était aussi impressionnant par sa taille, que par sa dimension humaine et sa maîtrise parfaite de cette nouvelle chirurgie révolutionnaire.
Christian Cabrol venait, de temps à autre, rendre visite à son ami le Professeur Chomette et principalement lors de certaines vérifications anatomiques post mortem. Son regard était clair, son sourire franc et radieux, son visage lumineux et plein de générosité. Je regardais ses mains qui me paraissaient immenses, tout en me demandant comment d’aussi grandes mains pouvaient être autant précises lors des gestes délicats que nécessitait une intervention minutieuse comme une greffe de coeur.

Christian Cabrol aurait pu se prendre pour Dieu lui-même, mais il n’en était rien ! Il aurait pu aussi être prétentieux, écrasant et méprisant, comme certains petits trous du cul qui se croient grands... mais non ! Lui n’était qu’un homme particulièrement accessible et toujours à l’écoute des autres et de ses étudiants... un être extraordinairement humble, un vrai modèle à suivre ! Il était aussi Professeur d’Anatomie à l’Université de Médecine Paris VI.

Devenu Maître à son tour, il n’avait jamais oublié ses Maîtres qu’étaient les Professeurs Shumway (pour la greffe de coeur) et Kuss (pour la greffe de rein). Cabrol et son ami Chris Barnard s’étaient longuement entraînés sur des chiens... avant de passer à l’Homme.
Souvenez-vous que la toute première greffe du coeur, pratiquée en France par le Professeur Christian Cabrol... date d’avril 1968, soit un mois avant la révolution estudiantine et ouvrière qui changea la face du monde.

Quinze ans plus tard, Christian Cabrol réalisa la toute première greffe de bloc coeur-poumons... et encore 15 ans après, Cabrol innova avec la première implantation d’un coeur artificiel.
Comme Alain Delon et Mireille Darc, j’ai beaucoup d’admiration et de respect pour le Professeur Cabrol qui sauva la belle Mireille d’une mort certaine et prématurée.
J’aime aussi cet homme qui sort de l’ordinaire et qui n’hésite jamais à dire qu’il faut boire et manger moins, tout en buvant et en mangeant mieux... ce que je m’efforce de faire au cours de mes escapades gourmandes.

Christian Cabrol précise que "le vin est un nectar qui se déguste avec respect et amour" (sic). Il est vrai que boire un bon vin rouge (avec passion et modération), tout en ne mangeant pas trop richement, est loin de nuire à la santé... il éviterait même certains problèmes d’artères qui se bouchent en s’encrassant, à la condition de ne pas en boire des barriques entières.
Merci et encore bravo pour tout... Monsieur le Professeur !