La vie extraordinaire et trépidante de Louis Lanher

La vie extraordinaire et trépidante de Louis Lanher

Je viens d’achever la lecture de "Ma vie avec Louis Lanher", présenté par son auteur et son éditeur (l’excellent "Au diable Vauvert") comme un recueil de nouvelles mais qui, en réalité, est sans aucun doute le meilleur roman d’autofiction de l’année 2008.
Dès aujourd’hui, j’arrête mon mémoire dont le sujet était "Yann Moix est-il drôle ?" et mon essai de morphopsychologie qui proposait une analyse scrupuleuse et géopolitique de l’évolution de la coupe de cheveux de Nicolas Rey à travers les années, et consacre sans plus attendre une thèse sur ce livre-là.
Un ouvrage bien plus intéressant, qui deviendra vite la Bible du trentenaire parisien - ou provincial d’ailleurs - qui a assez de talent, de culture et de second degré pour rire de lui, même avec une jubilation non contenue et le faire partager avec un lectorat qui saura l’en remercier comme il se doit.
Oui je vous le dit sans détours, j’ai ADORÉ, sans aucun cynisme, ni aucune ironie ou restriction, le nouveau livre de Louis Lanher qui est finalement un écrivain rudement sympathique qu’on devrait voir plus à la télé... et que les filles devraient davantage désirer sexuellement, car il le vaut bien. Explications.

Un objet livre gonflé.

Je ne sais pas qui, chez "Le Diable Vauvert", a eu l’idée d’une couverture pareille mais, force est de constater, que rien que cette mise en bouche surréaliste mérite au moins un chapitre dans mon oeuvre de commentaire(s) sur ce livre épatant.
En effet, il fallait oser une telle entrée en matière qui représente, si je ne m’abuse, une cabine téléphonique presque fermée, de laquelle tente de s’échapper une cinquantaine de ballons gonflables de toutes les couleurs dont certains portent la photo digitalisée de Louis Lanher himself.

Une telle réunion d’air, de vide et de remplissage d’un espace confiné mais transparent doit avoir une série de symboliques qui échappent à mon sens inné de la critique, mais toujours est-il que l’effet de surprise est réussi.
On est carrément déconcerté par une couv’ aussi kitch signée Olivier Fontvieille, à partir d’une photographie de Jean-Marc Gourdon. Du coup on passe un temps anormalement long à chercher des messages subliminaux entre les ballons, ce qui offre un prélude charmant et coloré avant la consommation du texte lui-même.

Ma vie avec Louis Lanher

Louis Lanher est à la fois le sujet du "roman" autobiographique et l’auteur du dit livre. Le procédé n’est pas nouveau mais ce coup-ci l’effet d’énonciation, de narration est tout à fait pertinent et va au bout du concept.
L’auteur dit "je" à travers quatorze nouvelles qui forment une suite logique, cynique et drolatique sur la vie réelle et fantasmatique d’un jeune écrivain parisien qui ressemble à l’acteur Jocelyn Quivrin en plus poupon et frisottant, mais qui a une activité qui ne le mène pas à la télévision de Grande consommation et plaît moins aux filles super jolies et canons comme Alice Taglioni.

Louis Lanher est créatif, iconoclaste, provocateur, brillant, vraiment drôle et finit par nous intéresser de manière rythmée et bien menée à sa vie intime et extraordinaire de garçon trentenaire qui offre un constat désinvolte, impertinent et distancié sur le microcosme littéraire et médiatique français.

Louis Lanher, avocat de métier pour lequel le livre est un divertissement, une récréation, ballade son œil amusé ou désabusé dans les couloirs de la société du spectacle. On reconnaît quelques vedettes littéraires derrières les pseudos ou les portraits déformés ; on se marre, on se dit que c’est bien vu, aussi bien dans les thématiques politiques du début du livre que dans les scènes d’éloge à la fellation de la fin.
Un conseil : Louis, jette la robe et continue à taquiner le stylo de plus belle !

Lanher sait être attractif et profond à la fois, son style simple, efficace et inventif lui permet toutes les audaces, toutes les digressions, tous les délires.
Finalement Louis Lanher est typiquement le type de Droite modéré que tout type de Gauche un peu curieux et sympa rêverait de fréquenter pour aller boire des coups au Mathis, se faire un ciné ou disserter sur le monde.

"Ma vie avec Louis Lanher"est sans doute le livre que David Foenkinos aurait rêvé de signer à sa place. Un livre en phase avec son époque qui rit de manière politiquement incorrecte de soi-même sans se prendre au sérieux. Un rire intelligent et frais qui même en commençant à 29 ans par une citation d’Alain Finkelkraut, réussit la prouesse de rester marrant et crédible. Chapeau Bas monsieur l’Ecrivain.

Ma vie avec Louis Lanher, Louis Lanher, Nouvelles, Au diable Vauvert, 2008