War(t)-Art , Un collage par jour contre la guerre

War(t)-Art , Un collage par jour contre la guerre

Mardi 11 septembre 2001, l’apocalypse frappe New-York et plonge du même coup le monde dans une terreur totalement improbable. Jusqu’alors... De ce vacarne infernal, ce qu’il est convenu d’appeler pudiquement les événements, un artiste, Frédéric Vignale, et une écrivaine, Carole Zalberg, s’unissent et lancent « Un collage par jour contre la guerre ».
Rencontre avec Frédéric Vignale...

Pouvez-vous présenter en quelques mots War(t)-Art ? Et préciser vos motivations ?

C’est une volonté bien réelle pour moi que War(t)-Art soit, dans un premier temps, une aventure uniquement virtuelle, une galerie sans murs et sans vernissage née sur le web pour le web : nous assistons à la première guerre moderne en direct sur ce nouveau média. War(t)-Art c’est la réunion sur un site internet à l’interface très simple d’un collage et un texte par jour faits dans l’urgence, dans l’instant par Carole Zalberg et moi-même.

J’ai vécu le 11 Septembre 2001 de manière très forte car j’étais en compagnie de mon ami l’écrivain Marc-Edouard Nabe dont la mère est née le 11 septembre, qui travaille sur l’Apocalypse de St-Jean depuis plus de 20 ans et qui est né, lui-même, à New-York. Nous avons suivi en direct sur les chaînes françaises les attentats de New-York et j’ai eu un déclic, il fallait que je témoigne avec "mes outils" à moi sur ce moment historique et dramatique. Les artistes ont toujours témoigné sur les joies et les peines, le minuscule et le majuscule, l’histoire personnelle et mondiale. La guerre fait partie de la vie d’une certaine manière. Nabe, dans la fièvre, sort le premier livre d’un écrivain français depuis le conflit, "Une lueur d’espoir" publié aux éditions du rocher le 7 Novembre 2001. Mon arme privilégiée depuis quatre ans c’est le collage, je fais donc des tableaux au quotidien pour témoigner modestement sur mon époque. Le collage étant l’art visuel le plus proche des mots (grâce au talent des surréalistes), j’ai parlé de mon projet à l’écrivain Carole Zalberg et nous sommes partis de concert dans cette aventure peu banale de binôme artistique. Le collage est idéal car ce n’est ni un dessin, ni une peinture, ni une photographie, mais un mix graphique de tout cela. Il y a déjà plus de 65 collages sur le site et je fais en sorte que tous soient très différents et complémentaires. Je lance des interprétations très intimes ou très engagées à la figure des internautes et c’est à eux d’y trouver, s’ils le souhaitent, les bases d’une réflexion.

Pouvez-vous nous décoder le titre : War(t)-Art ?

"Wart" en anglais signifie "vérue", le trou béant dans New York ressemblait, pour moi, à une énorme vérue venue tout droit de l’enfer. Avec un "t" entre parenthèses, il devient WAR donc "guerre" car il me semble que la guerre mondiale a commencé avant les bombardements en Afghanistan. De plus, Wart-art permet de mettre le mot "art" en miroir avec un "W" devant, c’est tout un symbole. L’art est une réaction, le reflet de l’Histoire avec un grand H.

Par rapport à votre approche, quelles sont, selon vous, les réponses que les artistes peuvent ou doivent apporter à ces évènements tragiques, comme il est maintenant convenu de les appeler ?

Un artiste ne donne pas de réponses, il témoigne, donne des pistes, traduit une réalité complexe avec des visions plus ou moins réussies. Les plus grands artistes ont anticipé le monde. Pour ma part je tente de réunir autour de moi d’autres artistes engagés pour ce combat pacifique de l’art contre la guerre. Si chacun avec son pouvoir, son talent, son savoir-faire et son énergie milite contre ce qui se passe en ce moment, "une sorte de guerre spectacle", l’opinion publique et les puissants changeront peut-être d’avis et ne massacreront plus les civils innocents.

L’art vous semble-t-il être plus propice à la générosité créatrice dont vous parlez à propos de votre collaboration avec Carole Zalberg ?

C’est une très bonne question. Il se passe dans l’art des choses qui ne se passent pas ailleurs. Carole et moi, nous nous sommes découverts dans cet exercice de style particulier qu’est War(t)-art. Je lui écris des images , elle me répond en mots, c’est très fort, très intense. Nous n’aurions jamais vécu de tels moments dans un autre contexte que celui-ci, c’est évident.

Certains artistes sont généreux et aiment travailler en équipe, Carole est tout cela et bien plus que moi qui suis très mégalomane et centré sur moi-même. Carole et moi sommes complémentaires et le projet wart-art n’aurait pas pu avoir le succès qu’il rencontre avec une seule personne, c’est un travail d’équipe intrinsèque. Cela instaure une réelle complicité et une belle émulation, on se soutient mutuellement. C’est mieux que faire l’amour ensemble, c’est communier intellectuellement et artistiquement , je vous assure.

Pour terminer, quelques mots sur vous et Carole ?

Je vous vois venir. Contrairement à ce que beaucoup de gens croient ou fantasment, il n’y a rien d’autre que de l’amitié et du respect entre Carole Zalberg et moi. Nous avons chacun de notre côté une petite famille. Nous sommes un faux couple ou alors un vrai binôme créatif ! J’espère que je réponds à votre question ! ce qui est sûr en tout cas c’est que nous sommes trouvés et que la réunion d’un homme et d’une femme, d’un catho et d’une juive, athées, donne quelque chose d’assez surprenant et d’unique.

Je peux juste rajouter que ce site va certainement devenir une exposition réelle à Paris et, on l’espère fortement, un livre. Avis aux éditeurs !

Propos recueillis par Patrick Herrmann, Axé libre

Propos recueillis par Patrick Herrmann, Axé libre