Plaidoyer pour la langue Amazigh

Plaidoyer pour la langue Amazigh

La langue Amazigh retrouvera-t-elle ses lettres de noblesse ? En effet, après d’acharnées luttes et de laborieux combats, l’Amazigh a enfin le droit d’être citée dans le paysage culturel et linguistique algérien. Qui ne se rappelle pas du printemps berbère de 1980 ? Qui ne se souvient pas du parcours et des revendications du mouvement culturel Amazigh porté par une grande partie de la jeunesse algérienne ?

D’aucun aujourd’hui ne peut contester que la langue berbère soit un véhicule culturel et un support identitaire puissant pour tout le peuple berbère du maghreb. Il faut préciser à ce sujet que le tamazight est dérivé du berbère ancien et séparé en deux branches : langues berbères du Nord et du Sud. Ces langues sont présentes depuis le Maroc jusqu’à l’Égypte, en passant par l’Algérie, la Tunisie, le Niger et le Mali. On dénombre une trentaine de variétés. Le berbère possède également son propre système d’écriture, celui que les Touaregs ont conservé : le tifinagh.

Soulignons encore que les langues berbères ont assimilé, selon les spécialistes plusieurs emprunts : à l’hébreu, au phénicien, au latin, au turc, à l’arabe, au français, ou encore à l’espagnol. S’il n’existe pas encore de chiffres officiels concernant le nombre de berbérophones, on estime tout de même le nombre de locuteurs à 20 millions.
En Algérie, malgré la création symbolique d’un Haut Commissariat à l’Amazighité (HCA) en 1995, et malgré la reconnaissance formelle (en 2002) du berbère comme langue nationale, la débat reste toujours ouvert et la question de l’officialisation de l’Amazigh suscite encore et toujours controverses et polémiques.

Si effectivement une grande partie des revendications culturelles et identitaires (Plat-forme d’El-Kseur) du mouvement citoyen qui a suivi le « Printemps noir » en 2001 ont été acceptées, l’officialisation de la langue Amazigh n’a pas par contre été suivie de mesures pratiques.

Dans ce contexte, le secrétaire général du Haut commissariat à l’amazighité (HCA), M. Youssef Merahi, a plaidé ce dimanche à Alger pour rendre "obligatoire" l’enseignement de tamazight à travers les wilayas du pays où l’apprentissage de cette langue est déjà prodigué.
"Nous appelons à rendre obligatoire cette langue au moins dans les wilayas où elle est enseignée", a déclaré par ailleurs M. Youssef Merahi sur les ondes de la radio algérienne.

En Algérie, l’enseignement de tamazight est suivi de manière facultative dans le système éducatif par quelque 100.000 élèves à travers une dizaine de wilayas du pays. Il a été aussi introduit en 1995, année durant laquelle a été créé le HCA.

Sur un autre registre, il est à signaler que l’article 1 de l’ordonnance de 1976 (relative à l’enseignement des langues) stipule qu’une matière devient obligatoire sitôt introduite dans le système éducatif, a indiqué M. Merahi pour appuyer sa revendication, regrettant au passage le fait que 92 % des effectifs (élèves et enseignants) se concentrent dans les wilayas de Tizi-Ouzou, Bejaïa et Bouira.

Quant à la promotion de cette langue, M. Merahi a affirmé avoir proposé l’organisation de stages de recyclage au profit des enseignants y compris ceux voulant se "convertir" dans l’enseignement de tamazight, ainsi que la création du poste d’instructeur en tamazight.
Concernant le problème de transcription de cette langue, le S.G du Haut commissariat à l’amazighité a estimé que cela "ne doit pas être l’apanage d’une décision scientifique" et qu’il est libre de la transcrire selon la convenance de ses usagers, admettant toutefois que les recherches effectuées par l’anthropologue et écrivain Mouloud Mammeri "doivent servir de base" en la matière.

Commentant enfin le bilan du HCA depuis sa création, il l’a qualifié de "positif" malgré "la multitude des contraintes rencontrées", rappelant que cette institution sera appelée à disparaître avec l’avènement du Conseil supérieur de langue amazighe.

Néanmoins, il faut reconnaître que cet appel à l’officialisation de l’Amazigh est un grand franchi. Mais sera-t-il entendu par l’Etat algérien ? Nombreux sont les berbérophones qui n’y croient pas trop car le pouvoir en Algérie a toujours excellé dans le mépris et l’indifférence.