Enfin libres !

Enfin libres !

Après l’angoisse, les tortures, les geôles libyennes, les procès
interminables, enfin la libération. Les infirmières bulgares et le médecin
d’origine palestinienne sont enfin libres et chez eux, en Bulgarie. Ce
matin, un avion affrété par la république française atterri à 9h45 à Sofia,
8h45 heure française. Bouquets de fleurs, pleurs, empoignades, les
retrouvailles laissent place à l’émotion. Le président de la république
bulgare Guéorgui Parvanov les a tous graciés dès leur arrivée. Retour sur
une prise d’otage de 8 ans mettant face à face la Libye du colonel Kadhafi
et la petite nouvelle de l’union européenne, la Bulgarie.

En février 1999, le sida contamine 450 enfants d’un hôpital situé au
nord-est de la Libye à Benghazi. Selon les autorités libyennes, le mal ne
peut venir que de l’extérieur. Cinq infirmières bulgares et un médecin
palestinien sont alors jetés en prison, accusés d’être des émissaires de la
CIA ou du mossad israélien. Malgré l’insuffisance des preuves et le manque
de fondements scientifiques engagés par les autorités, l’équipe médicale est
condamnée à la peine capitale, même si tous les rapports scientifiques
internationaux les disculpent.

Leurs aveux auraient été arrachés sous la torture selon les infirmières :
électricité, morsures de chien et autres trouvailles moyenâgeuse leur font
avouer le pire. Le professeur Montagnier, co-découvreur du sida- sera même
entendu en septembre 2003 comme témoin au tribunal de Benghazi. Il avait
déclaré que l’épidémie était due à de mauvaises conditions hygiéniques. Mais
le mécanisme est déjà engagé : les infirmières sont en réalité pris en otage
par le colonel Kadhafi, négociant alors grossièrement sa réhabilitation
sur la scène internationale.

Durant 8 ans et demi, les tractations s’engageront pour tenter de les
libérer. Mais aucun compromis ne semble se dessiner. La peine capitale sera
prononcé une première fois, annulé puis de nouveau confirmer le 11 juillet
dernier. Les infirmières alors très faibles, sont anéanties par cette
décision. Mais voilà, l’union européenne décide de sortir la grosse
artillerie diplomatique. Une négociation semble alors prendre forme avec la
Lybie : la construction d’un hopital à Benghazi et un compromis avec les
familles dont les enfants ont été atteints par le sida est en pourparler.
Mais le chiffre annoncé est considérable : 1 million de dollars par enfants
contaminés doit être versés pour trouver une solution concernant la
libération des infirmières.

Le premier round s’engage et les acteurs sur le ring international ne vont
strictement rien lâcher. : La Libye, l’union européenne et tout
particulièrement la France vont s’engager dans combat qui va durer près de
deux semaines

Deuxième round, Cécilia Sarkozy se rend en Libye très discrètement en
compagnie du secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant. Aucun communiqué
n’est officiellement lancé par l’Elysée. La tension monte, la rumeur
populaire se fait entendre. La peine des infirmières bulgares qui devait les
conduire droit à la mort est commué en prison à vie. Certains laissent
entendre que Cécilia aura déjà rencontré le colonel Kadhafi à plusieurs
reprises et serait personnellement très engagé sur ce dossier.

Troisième round : Nicolas Sarkozy s’apprête à se rendre en Libye.
Auparavant, Cécilia se rend de nouveau en Libye dimanche dernier, cette fois
ci accompagné de la commissaire européenne chargée des relations exterieurs,
Benita Ferrero Waldner. On imagine l’impossible : cinq infirmières bulgares
et un médecin à bord d’un avion français en direction de Sofia, serait-il
possible ? Après une nuit de pourparlers, la dépêche tombe ce mardi matin :
l’impossible est devenu réalité. Après des tractations longues et
douloureuses selon les diplomates français, les praticiens sont enfin
libérées. Et ce matin, c’est l’explosion de joie. Et pendant que les
infirmières tombe dans les bras de leurs familles et amis dès leur sortie de
l’avion, émissaires et présidents prennent la parole sur les antennes pour
féliciter cette action européenne au dénouement heureux.

Mais une interrogation demeure. Quelles tractations ont réellement eu lieu ?
Le président du Quatar présent lors des cérémonies du 14 juillet en France
s’est vu félicité ce matin par les diplomates internationaux. On imagine
qu’une partie des fonds remis à la Libye proviennent des caisses de son
état.

Le président de la Commission européenne José Manuel Barroso a ainsi annoncé
peu après l’arrivée à Sofia des cinq infirmières et du médecin s’être engagé
auprès du numéro un libyen Mouammar Kadhafi à travailler à une normalisation
des relations entre Bruxelles et Tripoli.

Au cours d’une longue et "chaleureuse" conversation téléphonique, "j’ai dit
au président Mouammar Kadhafi notre souhait de normaliser davantage les
relations entre l’UE et la Libye", si la question des infirmières et du
médecin bulgares, accusés par les Libyens d’avoir inoculé le virus du sida à
des centaines d’enfants, était "réglée", a déclaré M. Barroso.

En ce qui concerne Nicolas Sarkozy, il a annoncé mardi qu’il effectuerait
mercredi un "déplacement politique" en Libye pour aider ce pays "à
réintégrer le concert des nations", affirmant par ailleurs que "ni l’Europe
ni la France" n’avaient "versé la moindre contribution financière à la
Libye" pour obtenir la libération des Bulgares. » . Le chef de la diplomatie
libyenne quant à lui, Abdelrahman Chalgham, a affirmé aujourd’hui à Tripoli,
que l’Union européenne et la France ont contribué aux compensations
financières versées aux familles des enfants libyens contaminés par le sida,
comme il l’était convenu sur la table des négociations.

Quant à la polémique française qui commence à grogner concernant le rôle de
Cécilia Sarkozy au détriment de celui de Bernard Kouchner, il va sans dire
que l’essentiel aujourd’hui est bien cette libération. Libération qui
deviendra peut-être le symbole d’une communauté européenne unie par
l’action, la solidarité et l’esprit de la justice.