Lovecraft est mort, mais son cadavre bouge encore

Lovecraft est mort, mais son cadavre bouge encore

Le 15 mars 1937, soit il y a 70 ans, s’éteignait Howard Phillips Lovecraft, une des plus grandes plumes fantastiques de notre temps. Petite note en forme d’hommage effrayé.

Voilà un écrivain atypique.
Un écrivain qui compte des millions de fans dans le monde, notamment au travers du jeu de rôle inspiré de ses oeuvres (Call of Cthulhu).
Un écrivain qui conserve une influence sur de nombreux créateurs aussi bien dans les domaines littéraires (Houellebecq, King) que graphiques (Giger, le créateur d’Alien), cinématographiques ( John Carpenter, Guillermo del toro, Roger Corman), bédéistiques (Corbeyran, Noirel, Breccia) ou musicaux (Iron Maiden, Metallica, Joe Satriani...).
Un écrivain que la critique américaine, qui l’a redécouvert un peu grâce aux français (dont Jacques Bergier), n’hésite plus à placer au même rang qu’Edgar Poe, un de ses maîtres.

Voilà donc un écrivain "à succès", et pourtant toujours terriblement underground.

Pour les 70 ans de sa mort ? Rien. Que dalle. Nada. La presse littéraire l’ignore superbement.

Ah si, quelques échos nous parviennent, ici et là, suite à l’édition en DVD d’un documentaire primé, passé jadis sur France 3 dans "un siècle d’écrivains" (cf cet entrefilet du Monde).

Un silence impressionnant. Et pour cause. Le bonhomme sent le souffre. Son talent imaginatif et stylistique est certain. Mais il puise son génie dans la peur. La haine raciale. Une sorte de Céline wasp en quelque sorte. Ses défenseurs et admirateurs peuvent toujours tenter de se justifier : " ce n’est pas le raciste qu’on admire, mais l’écrivain", il pèsera toujours un soupçon de nauséabonitude sur HP Lovecraft, l’inventeur de mythologies, de cosmogonies, de frayeurs cosmiques. Mais on ne fait pas d’omelettes sans casser d’oeufs... Et on ne fait pas de bonne littérature avec de bons sentiments.

Alors ?

Alors rien. HPL, perché sur son étoile, n’a que faire des petites critiques terriennes. Il poursuit son voyage cosmique. Il est déjà dans d’autres dimensions.

Et nous, pauvres mortels, particules élémentaires sans but, vouées au chaos, pouvons continuer de découvrir ou redécouvrir le "Reclus de Providence", au travers de ses écrits, de ses nouvelles, de son impressionnante correspondance.

La collection Bouquins de Robert Laffont lui consacre 3 épais tomes, indispensables, pour ne pas risquer de se perdre dans la foultitude des "poches" ou "pocket" disponibles, et souvent redondants.

A ne pas rater également, "Démons et Merveilles", chez 10/18. Le meilleur de Lovecraft pour les puristes : des royaumes aussi grands et fragiles que l’imagination. La littérature du rêve, avec un grand L et un grand R.

Nous pouvons également nous perdre sur le web, à la découverte des milliers de sites francophones ou non qui lui rendent un unanime et mérité hommage. Citons comme points d’entrée francophones http://www.hplovecraft-fr.com, et aussi les éditions La clef d’argent http://clefargent.free.fr/.

Toujours pas d’hommage dans le monde littéraire ? Tant pis. Effectuons le plus bel hommage que des lecteurs puissent faire à un écrivain. Lisons, faisons lire et relisons Lovecraft.

Rest in Peace, Howard. Les éons passent. Les oeuvres restent.

"That is no death which can eternal lie, And with strange aeons even the death may die"