E-terview choc d’Ange Rebelli, avec une déclaration d’amour dedans

E-terview choc d'Ange Rebelli, avec une déclaration d'amour dedans

Ange Rebelli dont le pseudonyme révèle les paradoxes est à la fois un petit
gars gentil un peu bourge malgré lui, un rebelle provoquant des ruelles, un
homme qui aime les femmes ; un homme que le sexe fascine, mélange d’attraction et
de dégoût. Il vient d’écrire "Sexreporter" aux éditions Tabou, un livre
indispensable, d’abord parce qu’il se lit remarquablement bien (je l’ai emporté
en vacances mais l’ai malencontreusement fini le premier jour au grand dam de
mon amant qui espérait que je fasse autre chose de ma première journée), ensuite
parce qu’il montre tout ce qu’on ne voit pas dans le monde du sexe, sans parti
pris, sans misérabilisme, sans grosse condamnation mais sans naïveté ni
concession non plus.

Ange Rebelli Bonjour,

1) Vous venez d’écrire un livre auto-fictionnel qui fait autant fantasmer que
vomir, c’est le paradoxe du sexe d’être à la fois "le meilleur et le pire" ?

Oui, le sexe est "divin" et "maléfique", c’est le paradoxe. La première des religions, la religion-mère était celle du sexe élevé au rang d’une divinité. Aujourd’hui, on en a fait un objet de consommation courant, voir industriel, par exemple la pornographie. La pornographie est elle aussi objet de paradoxe, elle explore le continent noir du sexe, elle repousse les limites, c’est positif, en même temps, elle dé-divinise le sexe, c’est dommage. Le sexe est aussi dégoutant que fascinant, c’est ce qui est intéressant.

Derrière les dorures, l’ordure… et vice versa. La saloperie est bandante !
(à lire ici une intéressante et violente polémique à propos de mon "indispensable livre" qui "fait autant fantasmer que vomir…" intitulée joliment : "pornographie, saoulographie et férocité : où va la satyre sociale…" )

2) Vous vous décrivez comme "sex reporter", c’est quoi un "Sex Reporter" ?

Un reporter spécialisé dans les reportages sur le monde du cul pour des journaux pornos ou masculins. Mais pour moi, c’est une philosophie de vie. Un sexreporter, un pornographe donc, est un "en-dehors". En même temps il vit dans le monde réel caractérisé par une hypocrisie extraordinaire. Tout le monde phantasme sur le sexe mais beaucoup ne l’assument pas. La confrontation d’un monde du sexe où les choses sont explicites et d’un monde ou le non dit est roi crée un choc, une perturbation… C’est ce que j’ai voulu raconter. J’ai crée pour cela en parallèle du récit gonzo de mon activité, un personnage, mon frère (mort) qui appartient au monde dit normal et avec qui je m’engueule. Je le traite de petit bourgeois et il me traite de pornocrate, on a tous les deux raison et tous les deux torts, une parabole sur un monde hard-core…

3) Quand vous décrivez le "white meat business", le rôle des flics dans certains
lieux, les techniques d’arnaque à Pigalle... Vous n’avez pas peur des
conséquences potentielles d’un livre témoignage comme celui-là ?

N’exagérons rien, je ne fais pas de révélations fracassantes. Tout ce que je dis est plus ou moins connu. La corruption des flics, l’arnaque, l’esclavage de la prostitution dans les pays de l’est (white meat business), ce n’est pas nouveau, mais il n’est pas vain de le rappeler !
Et de le re-situer. Conséquence ? Des personnages cités sous pseudonymes dans le livre m’ont déjà menacé d’un "contrat", il a fallu pour que ça se calme (pour l’instant) que je leur précise de ne pas me louper, parce que moi je ne les louperai pas, vendetta oblige. J’attends les autres ! Ce qui est marrant (et flatteur), c’est que c’est autant la manière dont je raconte que ce que je révèle qui choque les gens. Ça a été fait pour ça, tant mieux.

4) Parler de tout ce côté "sombre" de la production, c’est une façon de vous
racheter après y avoir participé ? C’est au contraire pour montrer que rien n’est
"noir ou blanc" ?

Je suis un gonzo journaliste. Gonzo, c’est une forme de porno, tourné "à l’arrache", c’est une forme de journalisme (cf Hunter Thompson— paix à ses cendres, il s’est mis une balle dans la tête il y a exactement un an !) où l’on est au cœur de l’action. Contrairement au journalisme qui se place à distance et qui juge selon des critères moraux. Le gonzo reporter, lui, réagit, raconte avec sa sensibilité. Il en prend plein la gueule, il passe ça comme il peut à la moulinette de son cerveau détraqué et il recrache le tout. Brut…
Nota : je parle du côté sombre du sexe mais aussi de son côté lumineux même si c’est illuminé de lumière noire… Pour moi le monde normal est sombre et froid. Plein de tueurs/snipers qui errent dans les couloirs d’une société technocratique et inhumaine. Le monde du sexe et du porno est chaud, plein de vie paradoxalement, car les gens sont au contact direct. Ce sont des décalés. Ils ne sont pas si sûr d’eux et ils y gagnent une humanité nécessaire, essentielle.
Rédemption ? Pourquoi faire… dans la vie tout se paye cash tôt ou tard.

5) On vous sent blasé, vous diriez que "trop de sexe tue le sexe" ou si je vous
montre mes bas, j’arriverai encore à sentir à quelque chose ? (à moins que vous
ne soyez exclusivement adepte du haut et là je suis fichue)

J’adore les femmes qui portent des bas. Hier encore dans le métro, une ravissante jeune femme, très stricte (chignon, petites lunettes, bouche en cul-de-poule) décroisait ses jambes en face de moi et j’ai vu qu’elle portait des bas. C’était foutrement excitant.
J’aurais du la brancher mais j’étais trop pressé ! Ou blasé ? Trop de sexe, tue le sexe ? Sans passion oui. Oui, en temps que Sexreporter je suis un peu blasé du sexe. Je vis dans un monde de sexe facile. Et tout ce qui devient trop facile a tendance à devenir ennuyeux. Mais le sexe est étrange, quand vous n’y croyez plus, il est là pour vous sauver, comme un instinct de survie et quand vous y croyez trop, il vous tue ! Pour en revenir aux bas, ce qui est bon, c’est que ça incite à la caresse, à franchir les frontières interdites, c’est la lente progression du désir et du plaisir. J’incite donc toutes les jolies salopes à mettre des bas, tu l’as compris jolie Justine, je prendrai vos chevilles à pleines mains et je jouerai avec vos jambes…

6) Mon grand jeu littéraire, veuillez compléter les phrases suivantes :
- Le réveil sonna et je l’éclatais contre un mur car le temps doit mourir, il faut le tuer avant qu’il ne nous tue. Le détruire. L’usine du temps, c’est de la folie industrielle en boîte.
- L’amour c’est la vie, c’est la mort, c’est de la comédie et de la tragédie.
- Jamais deux fois sans toi ni loi.
- Elle était maquillée et portait un habit de nonne que je savais fendu de bas en haut de derrière… ce qui laisse entrevoir son joli dos et ses fesses— nues— en goutte d’eau. Son beau visage doux et cruel devenait doux et sensible et une larme de sang perlait de son œil souligné de deux traits fins. Allez la voir sur dominatio.de ; les photos dans la rubrique "news" (malitia te devorant) sont de moi…Dites lui que je l’aime, elle n’y croit plus, n’en veut plus ! Que je bois pour la tuer en moi, que je bois pour la revoir, elle doit savoir !
- Le sexe n’est pas tout et l’amour est au long cours… Seule compte la passion dévorante, la passion comme un suicide quotidien.

7) Vous avez de jolis moments de poésie dans votre bouquin, vous m’écririez un
petit poème contenant les mots suivants : basse-cour pigeon poule caille
bestiale ?

Non. Aussi charmante et troublante que tu sois, jolie Justine, je ne joue pas à ces jeux-là. Autant le dire, je n’aime pas écrire. je n’écris que parce que je ne peux faire autrement par moment, quand une saloperie d’émotion s’empare de moi et me gratte comme un prurit.
Autant citer ce vers d’Appolinaire essentiel et éternel : "Comme la vie est lente et comme l’espérance est violente".

8) Ma question Vignale qui est génial, que pensez-vous des narcissiques et des
mégalos ?

Il en faut.

9) Ma question Luc DS : que pensez-vous de la pénétration linguo-nasale (de la
langue dans les naseaux) ?

Ça dépend si la personne est enrhumée…

10) Je vous laisse, cher Ange Rebelli, le mot de la fin.

Le mot de la fin, c’est la faim, l’éternelle faim…
Oubliez la télé, la radio, le cinéma ; retournez vers les livres. Bukowski, Fante, Palhaniuk, Baudelaire, Appolinaire, Edgar Alan Poe… Ça paraît con mais ça va vous aider à vivre alors que le reste (sauf exception) vous détruira.
Et écoutez la douce voix de Justine, une fille extraordinaire de sensibilité et de générosité, d’audace ! Y’en a pas deux comme elle, mais je ne vous apprends rien…

SEXREPORTER, Ed. Tabou, 15 €.
Le site de l’éditeur : http://www.tabou-editions.com/
Le site de Sex Reporter : http://sexreporter.free.fr

J’M.