Interview : Candice à propos de son livre FETISH ART

Interview : Candice à propos de son livre FETISH ART

Candice est la nouvelle égérie fetish Française. En moins de deux ans ses photos ont fait la joie des initiés et gagnent chaque jour un public plus large amateur d’art et de mise à nu artistique de haute volée. Entre images érotiques, sensuelles et autres plus dérangeantes ou violentes, Candice s’offre totalement pour la Beauté de son Art Fetish et le tout donne un résultat des plus pertinent et empli de sens.
Rencontre avec la nouvelle Star Fetish du moment pour un ouvrage qui deviendra très vite Collector.

1. CANDICE, votre livre de photos fetish publié aux Editions RAGAGE est une vraie réussite, les photos sont admirables et votre postface très intéressante. Vous parlez notamment de votre démarche artistique de modèle qui dépasse la simple mise à nue physique. Vous considérez-vous comme une exhibitionniste qui nourrit son art grâce à cette envie de vous montrer perpétuellement aux autres ?

Une exhibitionniste non... en quelque sorte ?... ou alors une exhibitionniste de l’âme ! Je préfère me considérer comme un corps-outil... Je ne me montre pas perpétuellement aux autres ! Je suis là, je suis nue, ce corps est mon essence, je ne ressens pas cette pudeur maladive qui en gêne d’autres, et puis c’est tout. Vous seriez peut être surpris - Ou peut être pas... - d’apprendre que, dans la vraie vie, je suis très discrète !


2. Il y a un côté schizophrène à proposer autant de personnages et postures borderline à l’image, comment faites-vous pour rester vous-même après une séance photo et ne pas être marquée par cette recherche artistique extrême ?

(rires) Je suis moi-même pendant les séances photos tout simplement !! mais un moi-même qui ne peut et ne veut plus évoluer en plein jour. J’ai choisi, il y a peut être 2ans, de ne plus balancer à la face du monde et de mes proches mon mal-être, car je n’ai plus su dire si c’était l’époque, la société, ou moi-même, mon environnement, qui me faisait du mal. Mon automutilation (bras, ventre et seins, comme beaucoup de jeunes gens à ce jour) s’est arrêtée quand j’ai commencé la photo ; Elle a cessé de signifier un appel au secours, elle a cessé d’être dirigée vers l’extérieur. Alors de la schizophrénie, oui, borderline, peut-être aussi. Sentir que je vis tout simplement. Il y a plein de grandes thèses à ce sujet faites par des psys qui, plutôt que de causer à leur patients, passent à la télé... ce serait intéressant de savoir ce qu’ils en pensent !

Je ne suis pas la première, et ni la seule à vivre de cette façon. Il y a même des artistes qui en font un concept ! Je pense à Orlan, Gina Pane, l’actionnisme viennois... Sont-elles plus schizophrènes que je ne le suis ?

3. Qu’est-ce qui vous intéresse le plus dans l’expérimentation des univers sombres, de l’underground ou de l’alternatif ?

A vrai dire, je pensais y trouver plus de tolérance qu’ailleurs. Ailleurs c’est ou ? Petite précision : C’est tout autour de nous : de la maison jusqu’à l’ecole ou chez le boulanger... Ce monde-là ne semblait pas vouloir de moi. J’ai commencé à apprécier ses corps dénudés, ses corps mélancoliques, ses corps encordés... Dans ces univers je me suis sentie bien. De plus, j’en adore l’esthétisme érotique depuis mon adolescence. Bien que n’étant pas pratiquante de jeux SM ou adepte des soirées fetish, j’aime me vêtir à leur façon, il y a des sensations exceptionnelles apportées par les matières : j’adore me glisser dans du latex, j’adore la torture sensuelle des corsets, je suis folle des chaussures qui brisent la cheville. C’est d’une féminité extrême. Quitte à jouer la Femme, autant ne pas faire les choses à moitié !

4. Dans le livre Fetish Art vous ne posez qu’en compagnie de filles, pourquoi ce choix de ne pas poser avec des garçons ?

Sincèrement ? Le sexe masculin ne m’inspire rien. Mes thèmes avec les filles, je les propose je les mûris et je les vis. Leur caresse est douce, j’ai envie de les protéger. Un coté maternel, mélé à une passion charnelle pour ce corps fin typique au genre masculin. C’est au delà du saphisme... Je suis mon homme idéal ! C’est fragile, c’est gracieux une femme... Des thèmes avec des hommes, je n’en ai aucun, et ils ne m’apporteraient rien.

5. L’idée de la douleur physique est souvent associées à vos photos, est-ce une catharsis, une réflexion sociétale ?

Joker ! Comme je vous l’ai dit précédemment, j’ai besoin de me faire du mal oui, c’est très profond et très intime. C’est sociétale d’une part. Je ne crois pas être une originale : j’ai mal, mais je suis loin d’être la seule ! Mais j’ai la chance d’avoir des tas de moyens de me torturer via ces univers que j’ai choisis, et en plus de mettre ceci en image pour le partager ! Très positif n’est-ce pas ?

D’autre part, ce « beau corps » ne m’a jamais aidé à guérir l’Esprit. Aussi je lui en veux un peu. Ce fut ma première démarche en tant que modèle que de chercher à dénoncer ça : ces amours trompés, la fausseté des sentiments des hommes, quand ils mimaient s’intéresser à mon âme alors qu’ils n’aspiraient qu’à posséder mon corps. Je me suis détruite la foi auprès des hommes, et ce sont mes attributs féminins qui ont trinqué.

6. Vous êtes à la fois une jeune fille pure et innocente et une femme expérimentée et délurée sur vos photos, c’est sans doute l’expression de votre côté sombre et clair des forces, dans quel rôle jubliez-vous le plus ?

Sans aucun doute le coté clair ! La douce mélancolie qui va émaner de moi, de mes yeux, une tristesse profonde... Elle me touche comme si ce n’etait pas moi que je regardais... Ce reflet de ma personne est plus proche de la réalité voilà pourquoi je le préfère. Cependant, cet autre moi qui peut tout se permettre, je l’admire et l’envie ! Mais plus loin encore, cette métaphore est l’expression de ma vie : hors de la photo la jeune fille sage et bridée, pour la photo la folle délurée ! Je tiens à mon innocence, mais elle me coûte cher en désillusions sur l’Homme.

7. Comprenez-vous que votre démarche artistique choque le bourgeois ou la mère de la famille un peu catho, qu’avez-vous à dire à ceux qui refusent de comprendre votre Art et sont plein d’a priori ?

Bien sur que je le comprends ! Mes photos choquent ma mère ! Mais elle, elle a le savoir-vivre d’écouter mes explications sur le pourquoi d’une quelconque performance, et l’intelligence d’argumenter sa répulsion de mes images tout en gardant un oeil esthétique ! Elle est capable d’admettre les qualités de réalisations tout en détestant le contenu. Je ne tolèrerai jamais certaines critiques négatives qui se résument à des phrases telles que : « jusqu’où va aller la connerie ?! » On ne me traite plus de conne. Je ne le suis pas. Et pour moi la connerie, ce sont les aprioris.

8. Votre jeune et très beau corps est un outil dont vous vous servez sans modération. Continuerez-vous à poser lorsque vous aurez un âge avancé et que votre instrument corporel sera moins esthétique ?

Hum... tant que mon corps aura des choses à dire, je poserai je pense... j’aimerais ! Bien sûr, c’est plus agréable de se savoir fine et fraîche, rien que vis-à-vis de l’oeil qui vous jugera... mais j’espère bien bénéficier de cette allure générale encore longtemps ! Et puis je suis jeune comparée aux modèles que j’admire ! Ce sont en général de vraies femmes qui posent dans le style Fetish, incroyablement belles et déterminées, avec encore plus d’expérience, je ne suis encore qu’une gamine dans le milieu ! donc, je ne me fais pas de soucis.


9. Il y a souvent une dimension christique dans vos tableaux humains, vous êtes croyante et provocatrice ?

Je ne peux pas le nier. J’entretiens un rapport avec Jésus assez particulier mais bien présent ! Car je crois en un monde plus beau, je crois en un Amour, et je crois au pardon. Je crois en la nature, je crois en le déclin de notre espèce par la bêtise... Aussi ce besoin de me figurer en image presque biblique me rassure-t-il un peu. Je me vois tel que ce messie fut annoncé, avec de bonnes paroles, avec un désespoir serein sur ce qui va m’arriver. Je ne suis pas catho, mais je ne souhaite pas être irrespectueuse non plus. A condition qu’il puisse y avoir du respect dans la provocation, c’est là que je me situe.

10. Je vous laisse le mot de la fin chère Candice !!

C’est bien aimable mais j’ai cessé de m’exprimer avec des mots ! Pour dialoguer avec moi il faut regarder mes photos :) Merci pour cette interview pertinente.

Fetish Art, Candice, photos de Arno jaloin, Philippe Bréson, Patrick Wecksteen, Ultrarouge, Christphoto, PvonB, Editions Ragage, 2006

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