Une mare de sang...(2/2)

Au fait, la gauche, où te trouves-tu pour défendre tes amis artistes ? A défaut d’attendre l’arlésienne, les intermittents du spectacles prennent les choses en main et sont allés manifester mardi dernier pour la conservation de leur statut. Malgré les propos sciemment rassurants de Jean-Jacques Aillagon, le MEDEF aimerait bien réduire les privilèges conférés à cette profession, au risque de la mettre en danger. Entre fatalisme et position de combat, ces mêmes intermittents attendent une prochaine réforme dans la crainte d’un avenir fragile. Leur cause mérite amplement d’être soutenue.

Au sein de l’univers culinaire, c’est un autre drame qui a touché nos maitres cuistots de plein fouet : la mort de Bernard Loiseau (1), gastronome généreux de la grande tradition française. Très vite, les larmes ont cédé la place à un opportunisme de mauvais aloi. Ainsi, certains chefs réputés ont effectué le parallèle franchement douteux entre le décès de Loiseau et le fait que ce dernier ait perdu quelques points au sein du fameux guide Gault-Millau. Au nom de sa mémoire, ils auraient mieux fait de se taire, quitte à remettre la polémique à plus tard.

Sur le cyclone entourant la sortie du bouquin de Péan et Cohen sur la "face cachée" du quotidien le Monde, Frédéric Viniale a écrit l’essentiel (2) mais quand même, on attendait une autre défense de la part de ce journal. A l’exception de Daniel Schneidermann, Plenel et compagnie ont préféré se réfugier dans le rôle de la vierge outragée. Et sur le fond, messieurs, vous n’avez vraiment rien à dire ? Comment s’étonner ensuite de la suspicion qui entraine de nombreux lecteurs à se poser de troublantes questions ? Des réponses, s’il vous plait, avant qu’on ne s’asseoit sur votre référence.

Nous avons commencé cette chronique par la guerre, nous finirons sur le même thème et ce, pour évoquer la rediffusion hier soir sur Arte du chef d’oeuvre de Peter Kominsky, Warriors : l’impossible mission.
Je me permets de reprendre ce que j’écrivais précédemment sur ce film qui vous colle à la peau comme un sursaut de conscience : commençant comme une chronique loachienne, Warriors se drape dans le réalisme cru, évite de surligner le pathos pour atteindre l’âme. Evoquant la guerre de Bosnie en 1992, si proche de nos frontières, Peter Kosminsky décrit le parcours de quelques casques bleus pris au piège de l’inaction et de l’incompétence onusienne dans un conflit où ce sont d’abord les salauds (peu importe qu’ils soient croates, serbes voire bosniaques) qui font la loi. Loin de la ligne grossièrement manichéenne du bien et du mal, des rivages flous se tracent où seuls le visage égaré de l’effroi et l’odeur putride de la mort l’emportent. C’est peu dire que les dernières images nous hantent comme un inévitable cauchemar qui a bousillé leur vie et nous fait hurler en pleine nuit.

Dans la perspective de nos pesants présents, souhaiter, en tout cas, que l’avenir ne se formate pas éternellement à l’aune du passé, dans une mare de sang...
On se donne rendez-vous au mois d’Avril pour en reparler.

(1) Lire à ce sujet, l’excellent article de Boucle d’Or

(1) Lire à ce sujet, l’excellent article de Boucle d’Or