Interview : Clarence Dutilleul

Interview : Clarence Dutilleul

Il est snob, apte et pas bon, il est hype, il est classe, il a créé un audio-blog hype subversif mais anti-sacrificiel... C’est Clarence Dutilleul !

Interview avec le responsable de la division Communication et Chips.

Cher Clarence Dutilleul,

Bonjour très chère Justine, c’est un réel plaisir cette entrevue en votre compagnie.

1) J’aime votre humour à trois SMIC, vos robes, vos mots et j’aimerai explorer vos voies mais je crains qu’elles ne soient impénétrables... quoique ?

Vous commencez très fort, très chère Justine ! La pénétration est précisément le concept des base de « Snobs, aptes et pas bons » : je représente la jet-set internationale, groupuscule influent et incrusté de diamants, désirant que le hype pénètre en profondeur dans les stratifications sociales de notre monde contemporain. En particulier, je propose des stages intensifs de trois jours dans un grand hôtel parisien pour apprendre le hype en accéléré. Porter une Rolex sans être vulgaire, garer son SUV dans un parking de centre commercial, s’y connaître en champagne et, vous le rappelez, porter des robes à trois SMIC lors de galas de charité sans mauvaise conscience sont autant d’étapes de la formation. Et « Snobs, aptes et pas bons » n’en est que l’introduction.

2) Je pense que nous partageons une passion : les hommes mais vous les préférez imberbes ou épilés ?

Tant qu’ils portent un boxer de couturier et qu’ils ne sont pas « bear » ( cf. numéro de novembre 2005 de TETU pour une analyse sociologique très précise, « Les Bears sont-ils le poil à gratter de la communauté ? » ), tous sont autorisés dans mon harem.

3) Deux questions existentielles qui me taraudent depuis quelques mois déjà, presqu’avant que vous ne soyez né : vous êtes plutôt Madonna ou Dalida ? Et si je dois vous fixer un rendez-vous, ce sera plutôt au Tango (la boite à frissons) ou au Queen ? Au fait, vous avez quel âge ?

Chérie, vous êtes vulgaire, le savoir-vivre possède des règles élémentaires. Non mais !
D’une part on ne demande jamais l’âge de quelqu’un de mon envergure.
D’autre part, l’égyptienne semi-queer style-genre Amanda Lear c’est juste de l’icône sous cellophane pour pétasse de banlieue, quant au Tango et ses soirées « Marine Nationale », c’est à peine du sous-Jacques-Perrin-dans-les-demoiselles-de-Rochefort pour les transsexuels MTF qui ne bandent plus que devant Christine Deviers-Joncourt.
Dans mon Porsche Cayenne, c’est simple, y’a la sellerie Vuitton, les porte-coupe pour le champagne, l’intégrale de Louise Veronica Ciccone et un ou deux jeunes éphèbes à peine vêtus : garé devant le Queen, l’effet est fantastique et exaltant.
L’évidence de la réponse à votre question ne vous semble-t-elle pas à présent frappante ?

Si si effectivement, je dois être un peu, comment dire... enfin... J’aime bien le Tango d’ailleurs.

4) Quels sont les bases du parler hype ? Pensez-vous, très chère Clarence, qu’un séjour à Versailles soit nécessaire ou les contrées marécageuses du centre de la capitale française suffiront à parfaire une culture confituresque (c’est à dire très étalée avec des mots supers compliqués) ?

Le parler hype reste l’Himalaya de tous les jet-setteurs de province certes, mais aussi des petites et grandes couronnes : l’entraînement est long et pénible - ne devient pas Paris Hilton qui veut. La sophistication, mais aussi la préciosité, les anglicismes ( quoi que mettre un poil d’espagnol dans vos diatribes fumeuses autour d’un blini au caviar soit très ultra en ces temps de maquiladoras et de Spanglish ), les pincettes, les guillemets, les mots en « -itude », les références culturelles croisées, le principe de l’accumulation ( « cette voiture est définitivement Robbie-Williams-smooth-&-super-jinxy-cristal-Swarovski-techno-pop » ) sont des critères essentiels pour juger de la qualité strass-et-paillettes de vos propos. Vous pensez qu’il n’est encore une fois que question de superficialité et de vanité sociale ? Erreur ! Bernard Pivot a été lofteur et Marguerite Yourcenar a fait un single ( « Lesbiennes en puissance ! » ) dans les années 30 : être style-genre nécessite une certaine crédibilité dans le vocable.

5) Z-y-va Clarence, on peut s’faire un deal ? J’t’apprends le parler de la banlieue (comme ça tu comprendras le jour où tu te fais insulter ta race par la darone d’un keum) et vous m’apprenez à passer inaperçue dans les milieux autorisés ?

A priori, le « pacte » ( puisque deal me parait définitivement trop médiocre comme vocable ) peut être intéressant. En ces temps de banlieues qui implosent, porter des TN, un sac-à-patates Bullrot, commercer du cannabis sur la Dalle et jeter des cailloux à Nico, le tout en se fondant dans la masse, c’est vraiment ce qu’on peut faire de mieux pour ne pas être inquiété par les prout-troup dopées à Skyrock. Mais ne vous en faites pas, si l’épidémie de violence progresse, si ma vie est en danger, je sais quoi faire. Je courrai ( enfin, c’est une image, vous l’aurez compris, je filerai en jet Falcon ) dans mon château en Suisse, vidéo-surveillé, circonscrit par une team de vigiles maghrébins accompagnés par leurs féroces molosses, pour éviter ce capharnaüm dantesque. Et je pourrai mater au poil les derniers épisodes de « Plus Belle La Vie » sur un des écrans plats et dans un fauteuil Vitra, en sirotant un Martini glacé.

6) "Snob" j’ai compris, "aptes" je me demande à quoi et "pas bon" c’est au pieu ? (excusez-moi, je suis blonde, je ne pense qu’à ça alors s’afficher comme "pas bon", ça me déçoit)

Vous savez, qui fait l’éloge des grands hôtels de luxe de Megève ? qui parle du bonheur d’enfiler un vison au prix d’une Twingo ? qui parle de l’extase vécue en mettant à son poignet une montre Philippe Patek avec bracelet en cuir de croco ? Personne ! Les nantis qui baignent chaque jours dans ces orgasmes matérialistes se gardent bien d’en diffuser le secret auprès de classes sociales moins aisées. Par pur snobisme. Eh bien, c’est pareil avec mon braquemart qui titille la praline comme pas deux.

7) Vos références cinématographiques, elles vous viennent de cinémastock (de Gotlieb, vous voyez moi aussi je connais des trucs) ou vous passez votre vie au cinéma en vrai ? Mais sinon, Clarence, c’est quoi votre vie ?

La vie de Clarence ? Si vous saviez ! Le marathon socio-culturel est permanent, je m’enfile sans cesse les dernières biographies Odile Jacob, les derniers albums à la mode et les films les plus ultimes, si possible en avant-première avec le réalisateur ( pour les petits fours à la sortie de l’UGC des Champs ). C’est pas évident. Parfois le soir, j’enchaîne quelques galas mondains, des soirées privées chez Jean-Roch et des vernissages arty : sans mon anti-cernes, je ne suis rien. Niveau vie pratique, c’est quand même plus facile. J’ai une suite réservée au Hyatt, deux gouvernantes pour le courrier des auditeurs, une noria de maquilleurs-coiffeurs pour un brushing sans cesse impeccable et un chauffeur pour le Porsche Cayenne. L’armada est sans cesse sur le qui-vive, et avec ça, je suis au top de la vogue pour mon public.

8) Votre meilleur amant préférait-il le rouge ou le noir ? Plutôt Julien Sorel ou Jeanne Mas ? (ouais, je sais elle est pas terrible cette blague mais si je n’affichais pas mes faiblesses, on pourrait me croire parfaite et cela nuirait à la modestie naturelle de mon ego)

Là, vous vous la tartinez sur du Stendhal et de la variété française bon marché. Je vous avais dit que pour être dans le vent, il ne fallait pas forcément courir au name-dropping m’as-tu-vu !

9)Vous m’avez parlé de verge, de verve et de lapsus... vous vouliez dire lape et suce c’est bien cela ?

C’est fou le nombre de manières qui existent pour manger un Esquimau.

10)Vous m’avez dit "je répondrai à toutes les questions sur la vie sexuelle intime de Clarence Dutilleul"... Clarence Dutilleul a donc une vie sexuelle intime ? Mais ça existe des dépravations pareilles ! Dire que ma maman ne m’a pas prévenue !

Doux-Jésus-Marie-Joseph ! Je suis sincèrement désolé. Et si je vous dis que le Père Noël, lui, il n’existe pas, je commets une bourde ? Ne vous en faites pas, Karl Lagerfeld, il est maigre comme un lombric tchétchène, et ça, c’est pas du pipeau.

11)La question Vignale (il est génial ; je rajoute ça à chaque interview, ça me permet d’assurer la parution de l’article ;-p [1] ), donc que pensez-vous des narcissiques et des mégalos ?

Je suis beau, je suis Dorian Gray, je suis le meilleur, je m’aime beaucoup, mon seul défaut, et parfois mon manque de vocabulaire. Dis Gredy, ça veut dire quoi « narcissique » et « mégalo » ?

12) Bon, c’est bon, on vient de parler de cul pendant suffisamment longtemps... Vous nous présentez rapidement votre podcast-blog audio qui a tout de même déclenché chez moi une impérieuse envie de vous (écrire).

Bon, alors « Snobs, aptes et pas bons », c’est un podcast. Le mot est à la mode, mais c’est juste un blog audio avec un nom ronflant. C’est à écouter via votre iPod ( point de salut aux baladeurs d’autres marques nipponisantes ) pour être tenu au courant, de façon amusante et plaisante, des dernières percées en matière de hype urbain et de concepts chals. Il y a de la culture, du cul, du Jacques Perrin, du vocabulaire modish et des astuces dance-floor pour vous la péter pendant au moins six mois. Le tout tient en dix minutes tout pile, exactement le temps mis par un métro entre la rue Etienne Marcel et Bastille. C’est rapide, discret et redoutablement efficace. Ca vous dit rien ? Et les gens qui ont écouté « Snobs, aptes et pas bons » forment ensuite une sorte de franc-maçonnerie invisible, qui se reconnaît à ses moindres gestes et mots dans le vent, et qui ne voudrait cependant pas ébruiter le secret du podcast ultime ... Ca fait vendre ce que je raconte ?

J’M : J’ai comme un doute mais ça m’amuse quand même et si je dois vous dire un secret, ce serait que je fais plus ça pour m’amuser que pour vendre un site gratuit.

13) Je saute la question, d’abord parce que je n’ai pas envie de vous sauter dessus (ce ne serait pas très hype) alors je me rabats sur la question, ensuite parce que dès fois que vous seriez supersticieux tout ça...

Alors sautons, sautons ...

14) La question LUC DS : que pensez-vous de la pénétration linguo-nasale (c’est à dire de la langue dans les narines) ? Est-ce une pratique courante ?

Qui est Luc DS ? Le « DS », c’est pour remplacer son patronyme à particule ? Si c’est le cas, je veux bien lui répondre. Sinon, c’est niet, c’est sans doute un commuter zéro-style de Gif-sur-Yvette. De toute façon, la langue dans le nez, c’est ni plus ni moins que de la spéléologie nasale vaguement lubrifiée à la salive. Et si ton partenaire, c’est un Golden Retriever ( petite allusion très, très pointue ... ), ça le fait pas du tout.

15) Cher, très chère Clarence, par quoi désirez-vous terminer cette e-terview ?

Vous êtes tous les plus beaux. Je vous aime énormément. Mettez du underwear couture mais seamless, écoutez « Snobs, aptes et pas bons » pour un re-briefing régulier et enfilez des mocassins Prada, même pour aller à l’épicerie des Galeries. Rendez chaque jour notre planète plus belle, plus hype, plus glamour. Les Américains, ni même les Chinois, n’auront notre peau si nous proclamons tous ensemble, sans la coupe au bol de Bernard Thibault, et comme pendant la libération queer : « Prolétaires de tous les pays, caressez-vous ! »

Je vous embrasse,
J’M.

J’ai énormément apprécié cette entrevue en votre compagnie, vous la si désirable et si élégante Justine. Au plaisir de vous revoir au bal des débutantes avec Marie De Villepin ?

Bons baisers,
Clarence Dutilleul.

Pour aller sur le Blog de Clarence Dutilleul

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