Révélation : Bernard Quiriny (L’angoisse de la première phrase)

Révélation : Bernard Quiriny (L'angoisse de la première phrase)

Quel est le nom de l’auteur français, presque trentenaire, le plus prometteur de sa génération ? Sans aucun doute Bernard Quiriny. Retenez ce prénom et ce patronyme, lisez-le, faites-le découvrir à vos amis, volez son livre chez « Gibert Jeunes » et redistribuez-le aux pauvres âmes qui ne le connaissent pas encore, organisez des gangs nocturnes pour éliminer de la surface de la planète les librairies qui ne défendent pas sur leurs étals ce jeune écrivain génial. Vous ferez là oeuvre de salubrité culturelle publique.

Bernard Quiriny est notre héros, il peut, à lui seul, sortir la Littérature française de la morosité, entre bon dosage de l’humour, délicatesse ultime, érudition modeste et imagination originale. Il est l’outsider que l’on n’attendait plus en 2005 et qui fait un bien fou à notre cortex et nos zygomatiques malmenés par des rentrées littéraires commerciales et ennuyeuses qui ont désespéré notre sens critique.

Son premier livre « L’angoisse de la première phrase » (Phébus) est un petit bijou d’intelligence, de subtilité, de cynisme savamment mis en scène, de trouvailles, toujours d’une drôlerie extrême, une réflexion douce amère sur la société, sur l’insolite des vies, sur le pittoresque des situations.

La forme du livre : un fil conducteur, le mystérieux Pierre Gould qui s’insinue dans bon nombre d’histoires. Quinze nouvelles qui se suivent, se complètent et se ressemblent dans la même qualité d’un verbe haut et fort, incroyablement tenu et maîtrisé, le même souffle nouveau jubilatoire qui fait mouche à chaque fois. Des chroniques courtes, modernes, qui assassinent les préjugés, qui se jouent des lecteurs, qui nous content les vies énigmatiques de personnages étranges ou truculents. Mais toujours terriblement attachants.

Etonnante galerie de caractères, servie sur un joli plateau de mots justes, précis, d’une incroyablement rigueur sémantique et lexicale. « L’angoisse de la première phrase » est un microcosme d’une infinie richesse où se croisent des destins qui nous touchent ou nous divertissent sur plusieurs degrés de narration, qui se mêlent avec un grand sens de la mise en scène, du rythme, de la bonne formule qui interroge au-delà de la farce. En cela Bernard Quiriny est presque anachronique, se rapprochant ainsi de Marcel Aymé ou René Fallet, Italo Calvino, Borges, avec ce recueil de nouvelles où le rire prend tant de couleurs et de formes audacieuses.

« L’angoisse de la première phrase » met à jour les histoires factuelles, théâtralisées d’attachants archétypiques vraisemblables comme Gould l’apprenti écrivain qui se fait fort d’inventer une nouvelle référence en matière de « première phrase de roman », la rencontre improbable entre un propriétaire et un intrus féru de bricolage, les mésaventures d’un employé de "Pouise & Fontaine", un écrivain attiré par le néant et mille autres fantaisies réconfortantes, pertinentes et impertinentes qui nous accompagnent et nous ravissent bien au-delà du livre refermé.

Un livre qui nous démontre que l’on peut faire un ouvrage bien dans son époque sans parler outre mesure de sexe, des petits désagréments de sa libido ou de son ego.

Un régal à chaque interligne. A lire et à posséder absolument. L’auteur connaît visiblement bien la Musique, aussi bien celle des mots que celle des existences qui s’entrechoquent et donnent du sens au Beau, et de la légèreté sur l’immense théâtre de vie.

L’existence est un drame qu’il faut savoir regarder et conter avec talent. Bernard Quiriny est un observateur hors pair à suivre de très très près. Son Pierre Gould mérite une place de choix dans nos mémoires collectives. On manque, vraiment, de superlatifs pour bien parler de ce livre.

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"L’angoisse de la première phrase", Bernard Quiriny, Phébus, 187 pages, 14 euros 50

Bernard Quiriny a reçu le Prix 2005 de la Vocation
Merci à Gérard Oberlé pour m’avoir fait découvrir cet auteur.

"L’angoisse de la première phrase", Bernard Quiriny, Phébus, 187 pages, 14 euros 50

Bernard Quiriny a reçu le Prix 2005 de la Vocation
Merci à Gérard Oberlé pour m’avoir fait découvrir cet auteur.