Amélie Nothomb, éliminée par la REAL-TV

Amélie Nothomb, éliminée par la REAL-TV

Le thème du dernier roman d’Amélie Nothomb est celui de la télé-réalité. L’histoire ? Dans un pays devenu fou, des gens sont déportés dans un camp de la mort analogue aux camps d’extermination nazis pour les seuls besoins d’une émission de télé-réalité. Face à ces pauvres hères, d’autres citoyens, sélectionnés sur casting, jouent aux kapos. Principe du "jeu" : chaque matin, les kapos envoient à la mort ceux des prisonniers qu’ils n’estiment plus être en état de travailler. Le public s’indigne mais l’audimat continue de monter...de même que l’exaspération du lecteur d’ailleurs...

Chez Nothomb, depuis quelques années, il y a deux types de romans : les romans beaux, et les romans fiscaux. Les premiers sont bien écrits, multiplient les savoureuses digressions, virevoltent de fantaisie baroque, et le lecteur est saisi de fièvre à la simple idée d’arriver à la dernière page, tout comdamné qu’il est à les tourner pour s’enivrer de la douce folie emportant le texte de la dame aux chapeaux exotiques.

Les seconds romans :

1/ ont contribué à la déforestation de la planète à cause de la taille 16 des caractères- à croire que c’est écrit pour les malades du glaucome - ;

2/ font preuve parfois de tant de faiblesse de style qu’on se demande bien si c’est Amélie Nothomb, l’auteur du génial "Hygiène de l’assassin" et du désopilant "Peplum" (et j’en oublie ) qui a écrit ce texte à peine digne d’un bon point de cours élémentaire ;

3/ ne donnent pas l’impression d’avoir été même relus tant l’histoire souffre d’incohérence, est décousue, ou sombre dans les facilités grossières,

4/ ont des dialogues qui feraient passer les babillages d’un sitcom pour du Shakespeare.

5/ présentent des personnages caricaturaux ayant autant de personnalité qu’une machine à laver.

6/ et ne servent donc qu’à faire du blé tant le lectorat de Nothomb est prêt tout acheter et lire de leur idôle.

Hélas, ô grand hélas - c’est que je l’aime bien Amélie - ce nouveau roman d’Amélie nothomb relève de la deuxième catégorie. Mais le pire n’est pas là : Le rapprochement entre la télé-réalité et Auschwitz est juste lourd dingue. Qu’Amélie Nothomb puisse croire que le parallèle entre les camps de la mort nazis et la télé-réalité a la plus petite pertinence, est le signe d’un singulière faiblesse mentale et d’une méconnaissance grave de l’Histoire car, pour ce qui est des camps de la mort, les nazis ne cherchèrent jamais à rendre leur « œuvre » publique ou télégénique. Ils ont au contraire cherché à masquer toute trace de leurs ignobles forfaits. A faire disparaître le crime de six millions de personnes. Nacht und nebel.
Nuit et brouillard dans la cervelle de Mlle Nothomb.

On ne peut pas tout montrer. C’est ce que les nazis eux-même pensaient.
Alors que dire de la télé-réalité ? Qu’elle serait prête à mettre en scène les camps de la mort ? On aurait beau jeu de croire que Mlle Nothomb cherchait à donner de la force à sa parabole, il n’empêche que Nothomb s’est trompé lourdement, la télé-réalité est peut-être la preuve que nous sommes dans une société du spectacle et du mépris. Mais n’en déplaise à Mlle Nothomb, nous ne sommes pas dans une société de mort. Et qu’était ce qu’Auschwitz si ce n’est une société de la mort et de l’oubli ?

Nothomb a sombré elle même dans le mépris qu’elle dénonçait. Pathétique ! Celle qui méprise les autres et leur fascination pour le mauvais goût, et qui fait elle-même preuve du pire des mauvais goûts.

Dénoncer une horreur en renversant dessus l’image d’un crime de masse aussi fort que la Shoah, quelle erreur ! Quelle faute de goût ! Qu’Amélie mêle son univers gothique à ça ! Comparer la Shoah à la télé-réalité, désolée mais c’est désarmant d’idiotie ! C’est bafouer le sens de l’histoire. Le retourner à seule fin d’écrire un livre indigne. De ce fait, quelques puissent être les défauts de la télé-réalité que Nothomb honnit tant, elle a d’entrée de jeu déconsidéré, désarmé toute sa critique de la plus atroce des manières.
Et je vous fais gràce de la justification débile du titre...
Telle est prise qui croyait prendre. C’est comme ça. Depuis quelques années, je me dis qu’avec Mlle Nothomb, c’est pile ou face, génial ou très mauvais.

L’année dernière, c’était "Biographie de la faim", très bon livre, et avant "Antechrista", minable règlement de compte romancé à peine digne d’une nouvelle de gare. Et là, cette année, 60 ans après la libération des camps de la mort, le pire de Nothomb. Pendant qu’on y est, à quand le romancier qui me comparera les émissions de télé achat avec la traite des esclaves ?

Et que dire de ce clin d’oeil grotesque à Primo Levi à la fin ? A vomir.

Le dernier roman de Nothomb ? Koh-Lanta, finalement, ce n’est pas si mal...


Acide sulfurique, Amélie Nothomb, Albin Michel


Acide sulfurique, Amélie Nothomb, Albin Michel