Il faudrait plagier davantage Alain Minc !

Il faudrait plagier davantage Alain Minc !

En ces temps troublés où les grands intellectuels français sont devenus désespérément réactionnaires, à part l’écrivain et philosophe Bernard-Henri Levy, seule voix assez couillue pour défendre un tant soit peu Daniel Lindenberg et son très pertinent « Rappel à l’ordre », il est un homme qui réjouit et enchante les humanistes et les modérés, les forces-vives, les honnêtes hommes et moi le premier. Un homme brillant, intelligent et bon, juste et engagé, un modèle de parcours en cette période répugnante d’idéologies nauséabondes reprises en cœur par les aigris de l’undergound littéraire comme par certains journalistes puissants du Figaro ou d’ailleurs : cet homme-là dont la probité et l’intégrité morales ne sont plus à démontrer, vous l’avez reconnu c’est Alain Minc, mon nouvel ami.

« Le capitalisme est un pari sur le mouvement : c’est de là que vient le progrès ». A. M.

Vous pouvez sourire, le tourner en dérision, lui ressortir des petites affaires mesquines de plagiats littéraires ô combien insignifiantes dont tous les grands hommes ont fait les frais avant lui (Thierry Ardisson, Elie Wiesel, Calixte Belaya, Tahar Ben Jelloun, B-HL…) mais Alain Minc a diablement raison sur à peu près tout et c’est pour cela qu’il a le don d’agacer les sans-grade, les affreux gauchos nostalgiques, les jaloux, les fachos, les voyéristes et autres jeunes et vieux cons. C’est un peu facile de taper sur Alain parce que tout lui réussit et qu’il est plus malin que les autres.

« Internet accélère l’avènement de la société de marché, avec une poussée violente de concurrence et de compétition » A. M.

Tous les constats de Minc sont lucides et ont rendez-vous avec leur siècle ; il exècre les communautés sexuelles ou religieuses et ne croit qu’au progrès et à un capitalisme qui ne peut passer que par une non-diabolisation imbécile de la mondialisation - qui peut être heureuse - et il a une vision des plus sereines des nouvelles technologies. Pour lui les nouvelles voies de l’égalité passent par le démantèlement contrôlé de la machine étatique, au profit d’une intégration progressive des lois du marché dans notre système social. Il faut, selon-lui renverser le modèle égalitaire : que l’on donne à tous les moyens d’être égaux au départ ; qu’on laisse jouer librement le jeu du marché là où l’Etat prétend tout codifier ; et que l’on cesse de niveler à l’arrivée les individus au moyen de la machine égalitaire. Le libéralisme de gauche a de beaux jours devant lui, et c’est tant mieux car c’est loin d’être idiot comme concept, bande d’ignares.

On a beau dire ce que l’on veut Alain Minc est un chic type qui a tout pour plaire. C’est une sorte de Jean-Pierre Chevènement qui n’aurait pas mal tourné, qui n’aurait pas vu la mort de près. Je crois que j’aime tout chez lui, son flegme, son humour, son énergie, la finesse de ses analyses et son pouvoir de dire « non » au milieu des consensus mous et des sales roquets réac qui aboient en exil depuis le Canada. Il y a fort à parier qu’Alain Minc ferait aimer son libéralisme amélioré et personnalisé à tout un chacun, sauf bien entendu à un sectaire ou un houellebecquien, mais heureusement ces deux groupuscules de pensée primaire ne pèsent pas bien lourds dans la population française, du moins j’ose l’espérer.

Si tous les Enarques étaient comme Alain Minc les institutions de notre pays auraient une autre allure, moi je vous le dis. Si tous les fielleux et les nullards de la pensée rageuse, pustuleuse et revendicatrice se choisissaient Alain Minc comme modèle, les choses changeraient davantage, c’est certain !

Il faut lire Alain Minc, il faut l’écouter, il faut l’admirer. Alors qu’on arrête une fois pour toute de schématiser sa pensée, de rire de lui bêtement. Rappelez-vous c’est Minc qui disait la citation ci-dessous au lendemain du 11 septembre 2001 et je demande à quiconque de me prouver que ce n’est pas là une vision des plus judicieuse et pertinente.

« Ce n’est pas une guerre qui a commencé le 11 septembre. Car qui dit guerre suppose un début et une fin. Or, il n’y aura pas de dénouement. Nous allons apprendre à vivre avec un mal endémique. C’est un phénomène auquel on finira par s’habituer comme nous nous sommes habitués à vivre avec les très nombreux accidents de la route qui fauchent la vie tous les ans à des milliers de civils innocents. Par exemple, en France il y a 9000 personnes qui meurent sur les routes chaque année. Neuf mille personnes tuées, c’est quand même trois fois le nombre de victimes qui ont péri dans les Twin Towers du World Trade Center. On finira par s’habituer à ce mal endémique ».

Dans son dernier livre que je vous recommande chaudement "Epître à nos nouveaux maîtres" ce très cher Alain fait la description d’une France dominée par ses minorités, et mal gouvernée par des chefs apeurés, qui découvrent leurs convictions dans les courbes statistiques, et sont depuis longtemps réduits à un immobilisme mièvre. C’est cela qu’il faut dénoncer, le nouveau pouvoir de ces intégristes (corporatistes) à la petite semaine qui ne voient, ne jurent et n’éructent que depuis les ghettos pathétiques dans lesquels ils se sont enfermés tous seuls.

Il faut plagier Alain Minc, le copier, le recopier, le mettre au programme dans les écoles et l’estimer enfin à sa juste valeur, sinon on risque d’avoir des lendemains qui déchantent dans le patronnat comme ailleurs.

Je suis "minciste" tendance "lindenberguien" et fier de l’être.
Allez, ravalez donc vos crachats les rampants !

Epître à nos nouveaux maîtres, Alain Minc, Grasset, 2003, 16 euros 15

Epître à nos nouveaux maîtres, Alain Minc, Grasset, 2003, 16 euros 15