Fanatisme littéraire : deux écrivains français mangés par leurs fans

Fanatisme littéraire : deux écrivains français mangés par leurs fans

Dans ce qu’on nomme habituellement la « nouvelle » littérature française, au moins deux écrivains, à ce jour, ont été et sont encore aujourd’hui les cruelles victimes de certains de leurs fans à travers des manifestations diverses et variées rendues largement publiques et qui oscillent entre le risible et l’inquiétant, le pathétique et l’absurde. Cette nouvelle donne médiatique et sociétale a été très peu commentée ou analysée.

Enquête sur les abus d’un fanatisme d’un nouveau genre qu’il convient de mettre à jour pour mieux le comprendre et peut-être le combattre. Du moins prendre conscience d’un danger latent.

Les fans étant par définition les lecteurs et des acheteurs plus que potentiels, les éditeurs et la Presse en général n’ont jamais cru bon se soucier des tenants et des aboutissants d’une certaine dérive idolâtre. Depuis la fin des années soixante la Musique a largement connu les hordes d’hystéries et on n’imaginait pas que les nouvelles Rock star deviendraient un jour les écrivains à la mode. Si le Film « Podium » de Yann Moix souffre de graves lacunes, le livre dont il a été tiré avait bien senti ce mécanisme nouveau d’identification extrême à son fétiche.

Le statut d’écrivain fait rêver. De l’animateur télé à succès (Thierry Ardisson en tête...) à la chroniqueuse à la mode, l’actrice, le journaliste, le pigiste, le candidat de la real TV, le sportif ou l’homme politique, ils ont tous comme projet secret de triompher en Littérature. Cela dépasse largement les perspectives pécuniaires. On vise une sorte de titre honorifique absolu. Quelque chose d’historiquement flatteur et indiscutable.

Depuis l’avènement de l’Internet, le fanatisme littéraire n’a cessé de s’amplifier et de gagner du terrain, les sites de fans, d’admirateurs et de groupies énamourées d’hommes de Lettres se sont ainsi multipliés comme les pains christiques dans un joyeux bordel laudatif savamment orchestré par des pseudo groupuscules sectaires ou des individus isolés cherchent une caution, un faire-valoir ou tentant de sortir de l’anonymat. Pis encore de dangereux manipulateurs pervers.

Le phénomène a commencé aux alentours de l’an 2000 avec la création de « L’Association des amis de Michel Houellebecq » (AMH), fondée par Josette dit « Michelle » (en hommage à son héraut) Levy, traductrice en italien qui s’est vite autoproclamée gardienne du temple de son écrivain favori pour lequel elle a décidé de consacrer une grande partie de sa vie, vouant un véritable culte d’amour (sic) à celui-ci.

Dès cette époque de nombreux forums de discussions autour d’écrivains furent mis en place et donnèrent lieu à des échanges animés, à des batailles tout azimut entre les « pour » ou les « contre ». Entre prosélytisme passionné et admiration aveugle, entre simple respect pour les œuvres et les hommes et étrange dévotion disproportionnée ou dramatiquement piteuse et indécente.

Les idéologues politiques n’étaient pas loin - souvent issus de partis extrémistes à droite ou à l’extrême gauche, récupérant au passage de nouveaux sympathisants sensibles à leurs discours très étudiés.
Se cachant derrière les salauds personnages des livres avec le leitmotiv commode : "ce n’est pas moi le sale type raciste, homophobe, antisémite c’est le héros du roman qui n’est que fiction.

Le dernier objet de toutes les dévotions est sans nul doute l’écrivain exilé Maurice G. Dantec qui, n’étant relié à l’Europe depuis son domicile canadien que par le réseau Internet a choisi de se faire représenter par des internautes se revendiquant de lui et manipulant son image de manière fort peu heureuse et affligeante, selon la plupart des observateurs.
Or le problème c’est que les fanatiques affiliés à l’écrivain sont bien souvent plus dangereux, virulents et tendancieux que l’auteur lui-même. D’où de terribles confusions lorsque tel ou tel proche de celui-ci rédige des communiqués à la place de l’homme de mots ou lance des polémiques en quasi porte parole .. mais sans accord préalable du principal intéressé.

Houellebecq et Dantec ont-ils gagné en notoriété, en légitimité, en lisibilité, en proximité ou compréhension depuis cette prise d’assaut fanatique de leurs personnes, de leurs œuvres et de leurs images ou ne sont-ils pas pris en otages par des personnes mal intentionnées tentant d’exister dans leurs ombres et opérant un curieux transfert affectif ou mental ?

C’est la simple question que nous soulevons ici.

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L’AMH

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