Lettre ouverte du Collectif Dom à M. Jacques Chirac,
Monsieur le Président de la République,
La France, décidément, semble avoir perdu quelques repères et il y aurait, à notre avis, urgence que vous rappeliez à nos compatriotes un les principes fondamentaux de la République.
Un animateur de télévision, M. Pascal Sevran, se croyant visiblement au-dessus de nos lois, vient d’affirmer publiquement et cyniquement non seulement son racisme, mais également son goût pour l’eugénisme. Les propos indignes qu’il a tenus accusent « les noirs » d’être responsables, par une supposée bestialité qui les caractériserait, du malheur de l’Afrique. Par cet amalgame, puisqu’il parle « des noirs », M. Sevran accuse ainsi non seulement les Africains subsahariens mais aussi une partie de l’outre-mer. C’est pourquoi le collectif Dom vient de déposer plainte et s’est immédiatement adressé à M. Patrick de Carolis pour que l’animateur eugéniste et négrophobe soit interdit d’antenne.
Malheureusement, il ne s’agit pas d’un « dérapage ». Ces déclarations intolérables - et qui font honte à la France - ne sont pas isolées. Elles s’inscrivent dans un contexte qui ne fait qu’empirer depuis très exactement un an. Nous avons ainsi vu M. Alain Finkielkraut, qui dispose d’une tribune à Polytechnique et d’une autre à France Culture, exprimer tranquillement son catéchisme raciste ; nous avons vu M. Georges Frêche reprendre le même refrain sans être pour autant exclu (pour le moment) de son parti. Nous avons vu aussi, malheureusement, les conséquences des ces professions de foi puisqu’il y a eu récemment violences et mort d’homme sur un stade. Et les choses ne peuvent qu’empirer si vous ne veillez personnellement à y mettre un terme. Mais cette libération de la parole raciste n’est pas seulement imputable aux prêcheurs de haine infiltrés dans l’establishment ni aux hooligans. À lire la presse, plus personne ne mettrait aujourd’hui en doute qu’il y a bien une « communauté noire » en France, donc une « question noire ». La nature ayant horreur du vide, un organisme a été mis en place pour justifier médiatiquement ce communautarisme et, de fait, provoquer, en retour, des attaques négrophobes sans précédent puisque désormais libérées de toute réserve. Voici tantôt un an, a surgi mystérieusement du néant une curieuse entité - le Cran (conseil représentatif des associations noires) - qui prétend s’exprimer au nom des « noirs » de France.
À peine créé (et malgré les dénonciations indignées de tous les Français d’outre mer ou originaires d’outre mer vivant en Métropole) ce groupuscule, qui ne représente en fait qu’une poignée de petites associations d’Africains ou de Franco-Africains a aussitôt mobilisé la parole et occupé l’espace médiatique - en particulier dans le cadre du service public de la radio et de la télévision - à un point tel qu’il est permis de penser que la stratégie de communication du Cran est savamment orchestrée. Vous ne pouvez l’ignorer puisque nous avons eu la désagréable surprise de vous voir, sur une demi page de Libération, le 30 janvier dernier, apparaître (très involontairement sans doute) aux côtés du président de cette association, M. Patrick Lozès, qui se réclame ouvertement du concept de race (voir l’interview de son porte-parole, M. Georges Tin dans Le Monde du 29 novembre 2005). On peut s’interroger sur l’opportunité de la présence du Cran à une réception visant à rendre hommage à la mémoire des esclaves tandis que beaucoup d’Ultramarins pourtant actifs et compétents dans ces domaines n’avaient pas eu l’honneur d’être invités.
Dans la mouvance du Cran est apparu un autre groupuscule, la tribu Ka. Alors que le Collectif Dom, le premier, avait alerté les pouvoirs publics contre toutes ces dérives racistes, nous observons qu’il a fallu attendre la provocation de la rue des Rosiers pour le la tribu Ka soit enfin dissoute en conseil des ministres. Nous observons également qu’à cette occasion une véritable tribune a été offerte par tous les médias à M. Capochichi, alias Kémi Seba, pour propager sa doctrine de haine raciale. Aujourd’hui encore, M. Kémi Seba annonce sur internet qu’il va aller mettre le feu à Sarcelles (où vit une importante communauté israélite aux côtés d’une importante communauté antillaise) en se présentant aux élections. Bien évidemment, lorsque les médias accréditent l’idée qu’il existerait des « noirs » en France et donnent une tribune à de tels « porte-parole » il ne faut pas s’étonner que le discours raciste se libère contre ces « noirs » qui appellent à brûler les dictionnaires et à s’en prendre aux « blancs » réputés responsables du racisme et coupables de tous les crimes coloniaux et esclavagistes.
J’ose à présent vous dire, Monsieur le Président, que les Ultramarins sont fatigués de ce mépris et de ces amalgames. Ils sont fatigués des réactions frileuses des pouvoirs publics lorsque les vraies questions d’histoire sont posées (ainsi la glorification quasi-officielle de Napoléon jusqu’à ce que j’y mette, par ma seule plume, un point d’orgue il y a un an) ; ils sont déçus de voir que les légitimes demandes permettant de rendre hommage aux descendants d’esclaves prestigieux, fédérateurs et emblématiques, tels que le général Dumas, finissent systématiquement à la corbeille lorsqu’on s’adresse à un ministre, à un Premier ministre, voire au Président. Ils sont inquiets de constater que lorsqu’il est question d’introduire un critère « ethno-racial » dans les statistiques publiques, le gouvernement, au lieu de rappeler systématiquement nos principes, s’en remet à de prétendus experts.
C’est pourquoi nous vous demandons d’adresser à la Nation un message clair indiquant que dans votre esprit, il n’est pas question de « noirs » et de « blancs », mais seulement de Français, dans la tradition de l’admirable loi du 16 octobre 1791 qui porte qu’il n’y a pas, dans notre pays, de distinction de couleur entre citoyens. C’est à vous, à présent, et à vous seul, Monsieur le Président de la République, de rappeler tout cela et de dire aussi d’une voix forte que ceux qui ont oublié nos fondamentaux et qui méprisent nos lois doivent être sanctionnés.
Nous vous demandons également d’appuyer auprès de M. de Carolis notre demande visant à interdire d’antenne M. Pascal Sevran qui n’est manifestement pas digne de figurer parmi les animateurs du service public.
Enfin, nous vous prions instamment d’adresser aujourd’hui même à M. le Grand Chancelier une demande visant à suspendre M. Pascal Sevran de l’Ordre national de la Légion d’Honneur.
Il nous semble en effet très inconvenant de voir un bateleur sans mérite, un raciste déclaré, un eugéniste content de lui, plastronner sur les plateaux de télévision en arborant fièrement l’emblème d’un ordre dont vous êtes le grand maître et qui n’a pas été décerné, même à titre posthume, à un général Dumas.
Persuadés que vous partagerez notre point de vue et agirez en conséquence, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de notre considération très respectueuse.