Le foulard rouge par qui le scandale est arrivé... (interview)

Le foulard rouge par qui le scandale est arrivé... (interview)

La manifestation des foulards rouges a rassemblé un peu plus de 10 000 personnes à Paris, le 27 janvier dernier, sans incidents ni casse. Les observateurs ont remarqué la présence de nombreux trolls venus perturber la manifestation avec de fausses banderoles pro Benalla ou pro CAC 40 par exemple, ou encore des personnes se présentant faussement comme foulards rouges pour tenir des discours extrêmes devant les médias afin de discréditer la manifestation.

C’est le cas par exemple d’un certain "Marwen", qui jetait son foulard au sol pour se désolidariser de prétendues violences des foulards rouges (il s’agissait en réalité d’un gilet jaune infiltré, comme l’ont montré d’autres photos du même individu dans des manifestations) ou d’une autre personne se présentant comme organisateur de la marche dans un reportage de la chaîne Russia Today. Une autre vidéo a aussi fait le buzz, celle-ci ne présentait pas un troll mais un vrai manifestant, filmé alors qu’il s’exprimait avec virulence face à des interlocuteurs que la vidéo ne montre pas. Devenue virale, relayée par la "fachosphère", cette vidéo a valu à Francis Pourbagher des torrents d’insultes et de menaces. Il nous a contactés pour nous livrer sa version des faits.

Qui êtes vous, tout d’abord ? Un politique ?

Je suis un citoyen, engagé en politique depuis longtemps, à l’UDF d’abord, puis au parti Libéral Démocrate, un petit parti de centre droit. J’ai aussi travaillé dans une mairie en région parisienne, mais depuis plus de dix ans je travaille dans le secteur privé.

Dans quel contexte a été tournée cette vidéo ?

En fin de manifestation je discutais avec des contradicteurs (NDLR : dont le fameux "Marwen", cité plus haut, un troll se faisant passer pour un foulard rouge "repenti"), sans aucune violence, et une personne en a profité pour réaliser une vidéo de cette conversation, sans se présenter comme journaliste. Dans le brouhaha, j’ai sûrement eu tort d’élever la voix de cette manière, ce qui a servi de prétexte pour me faire passer pour un extrémiste. Des extrapolations et des intox sur mon compte ont été massivement diffusées sur les réseaux sociaux. Ceux qui ont volontairement déformé mes propos l’ont fait à dessein pour faire de moi une cible idéale. Depuis j’ai reçu des milliers d’insultes et menaces de mort qui m’ont obligé à demander l’assistance de la police pour protéger ma famille. Heureusement j’ai aussi reçu un grand nombre de mots de soutien et de sympathie.

Vous avez tenu des propos peu nuancés...

J’ai parlé avec mes tripes, un "cri du cœur", face à une situation inédite de blocages et de violences dans le pays qui m’inquiète. Je comprends parfaitement certaines revendications sociales des citoyens Gilets Jaunes comme par exemple l’augmentation du SMIC et du pouvoir d’achat. Je regrette évidemment les blessures à déplorer autant chez les policiers que chez les manifestants, y compris M.Rodrigues. En revanche, je suis profondément choqué lorsque certains qui se réclament de ce mouvement appellent à instaurer un pouvoir militaire, à utiliser la force, à marcher sur les Institutions ou à rétablir la peine de mort. En effet, il ne s’agit plus du tout alors d’inégalités sociales mais bien d’une remise en cause du pacte républicain. Chacun constate que le mouvement des Gilets jaunes est récupéré et instrumentalisé par des personnes/groupes, qui recherchent l’affrontement et le chaos, c’est cela que j’ai dénoncé avec force.

Comprenez-vous l’indignation suscitée par votre prise de parole ?

Moi je n’ai menacé personne. J’ai seulement donné mon avis, avec conviction et peut-être de manière maladroite : on ne peut pas accepter les appels au soulèvement ou à l’insurrection. On ne peut pas tolérer les commerces pillés, les bâtiments publics incendiés, les journalistes lynchés, les symboles de la République attaqués. Cette crise risque in fine de coûter bien plus cher aux citoyens que les mesures d’urgences sociales obtenues. Les récents événements, notamment les scènes de destruction des biens publics comme privé, ont profondément marqué l’opinion publique, traumatisée par la violence des images. On ne peut pas rester muet quand nos institutions démocratiques, qu’on peut bien sûr toujours améliorer, sont remises en cause par des extrémistes politiques. Il y a eu plus de dix morts depuis le début de ce mouvement, ne l’oublions pas. J’ai voulu faire entendre ma voix, en tant que citoyen, sans imaginer être ensuite harcelé et menacer. Je n’ai fait d’ailleurs qu’exprimer le sentiment de très nombreux Français qui souhaitent que notre pays retrouve enfin le calme et la voix du dialogue plutôt que celui de la violence et de la haine.

Enfin, certains sites (Agoravox, RT, Le Salon beige etc) ont publié des infos sur votre parcours et ressorti une ancienne condamnation pour fausse dénonciation...

C’est un vieux litige avec un opposant politique local, à l’époque où je travaillais dans une mairie. Le climat était très tendu à cette époque dans cette ville. C’est du passé. J’ai lu sur différents sites complotistes beaucoup d’intox sur moi, par exemple que je serais un "agent provocateur de la mafia iranienne" ou que je détiendrais des secrets nucléaires. C’est si grotesque que c’est risible, je ne fabrique aucune bombe atomique, je suis juste un citoyen engagé. Ceux qui me diffament se couvrent de ridicule.

Lien de la fameuse vidéo :https://www.agoravox.tv/actualites/politique/article/un-foulard-rouge-ex-udf-pete-les-80307

Y.M