Interview de Frédéric Vignale à propos de son livre "Métro de Paris, Station Liberté"

Interview de Frédéric Vignale à propos de son livre "Métro de Paris, Station Liberté"

Un auteur : Frédéric Vignale. Un Editeur : Patrick Lowie (P.a.t). Une interview surprenante entre les deux où l’Editeur interroge l’auteur sur son ouvrage, livre qu’il connait mieux que n’importe quel journaliste puisqu’il l’édite, en a assuré lui-même la mise en page et les dernières corrections.
Nous inventons ainsi un nouveau Concept car il est, finalement, très intéressant d’avoir les questions de l’Editeur car il est le lien "physique", métaphorique et intellectuel entre l’Auteur et le Public.

Voici donc sept questions étonnantes et pertinentes sur "Métro de Paris, Station Liberté", édité chez P.a.t... Allez, c’est parti mon kiki...

1°/ A la lecture de ton livre, on a l’impression que tu vis des choses incroyables à chaque instant. Est-ce que tu vis des choses incroyables à chaque instant ? Est-ce que tu n’exagères pas un peu ? Est-ce que ça s’étale sur une semaine ou sur dix ans ? Pire : est-ce qu’il y a d’autres histoires pour faire une suite ?

C’est toujours intéressant la réception d’un travail littéraire. Je suis ravi que ce livre donne cette impression-là, bien évidemment, même si c’est totalement non prémédité, sinon ce serait terrible, il me semble.

Je ne me suis pas dit, « tiens, je vais raconter des choses incroyables car j’ai une vie incroyable ». Je pense, c’est vrai, avoir une vie un peu plus libre et iconoclaste et drôle que les autres mais ça s’arrête là, je n’ai pas conscience de cet « incroyable-là » qui je dois l’avouer me flatte terriblement. Il faut dire que j’aime m’autoriser l’incongru, j’ai mon oeil partout et je pense tout le temps.

L’important pour moi c’est que ce n’est pas de la fiction, c’est pour ainsi dire une sorte de retranscription vignalesque d’une vision d’un monde qui existe et que je côtoie et que je traduis en temps réel sans beaucoup de travail, de manière très innée. Alors c’est sûr l’écriture enjolive, sublime et met en scène, mais je pars vraiment de la réalité, du quotidien, du métro, boulot, dodo d’un artiste parisien qui assume ses différences, ses audaces et ses provocations. Il y a aussi une volonté sociologique de photographier une époque avec les mots, j’aime bien l’idée que les gens soient heureux d’apprendre des choses sur un milieu grâce à ces petites histoires pas comme les autres.

Les récits courts qui sont dans mon livre sont une compilation sur plusieurs années, je pense que je vis ce genre de choses « racontables » au moins une fois par semaine. Je dois porter des signaux en moi, je dois dégager un truc, je dois avoir une gueule qui fait qu’il m’arrive des choses pas banales, souvent décalées, profondes, comiques, étonnantes et qui plaisent aux intellos comme aux prolo quand ils les lisent. Même si ça me parait assez écrit et très pensé, ça a quelque chose de populaire et d’universel, il me semble. Ca dépasse l’anecdote, ce sont de longs aphorismes ou de mini mini mini nouvelles ou des extraits de films qui n’existent pas encore, le film de ma vie plus ou moins rêvée en quelque sorte, mais jamais inventée en tout cas, car je le redis c’est le réel qui m’intéresse comme objet d’étude.

Pour répondre à ta questions finale oui, il y a de quoi écrire au moins deux suites par an pendant encore quelques années. J’ai une vie sociale et urbaine parfaitement adaptable en livres, en pièces, en films. J’ai assez vécu depuis vingt ans pour ne faire que me raconter sans trop me la raconter ces prochaines années si je suis encore de ce monde et si cette époque terrifiante de violence(s) et de bêtise(s) et aussi de joies me laisse quelques années de survie bienheureuse comme c’est le cas depuis 40 ans déjà.

2°/ Est-ce que tu es né drôle ou est-ce venu avec l’âge ?

C’est marrant cette question, bravo Patrick ! Sans fausse modestie, je ne me trouve pas particulièrement drôle et je ne pense jamais au rire, à l’effet comique, à la blague quand je rédige mes propres textes. Souvent on me dit que c’est drôle, mais ca n’est pas du tout écrit pour faire rire. A mon avis, le pire métier de la terre à part laver des Morts, être Assistant de Nicolas Sarkozy ou Homme pipi c’est « Humoriste ». Il y a quelques chose de sordide à vouloir chercher à faire rire, à recommencer ses phrases pour avoir tel ou tel effet rigolo, ça ne peut être que pathétique à force. Je n’ai pas écrit un livre drôle, si c’est drôle, si ça fait rire ou sourire les lecteurs, je suis ravi, mais ce n’est vraiment pas le but de la manoeuvre.

Après, ce que je suis intrinsèquement, drôle ou pas, je le porte depuis tout petit, même caractère, mêmes obsessions, même regard amusé sur le monde, même envie d’être hyper actif, sur-vivant, provocateur, énervant, poil à gratter et inventif (même si la plus part de mes inventions nourrissent d’autres que moi-même le plus souvent, il faut bien l’avouer).

3. On regrettera probablement le manque de sexe dans ce livre. Es-tu vraiment pudique ? Ou c’est une façon de faire croire que tu l’es ? Ou franchement, le métro c’est pas très sexy ? Je me souviens d’un film de Stephen Frears où un couple baisait dans le métro de Londres... jamais vu ? Ou l’époque a changé peut-être.

J’ai pourtant une vie très sexuelle, amoureuse et passionnée, c’est sans doute pour cela qu’il n’y a pas ou peu de sexe dans mon livre. Faut dire que le sexe dans le métro c’est souvent un peu glauque, des vieux ou jeunes « vicelards » qui se collent aux jolies filles ou femmes aux heures de pointe, des mains aux fesses, du harcèlement.. c’est pas ce que j’aime décrire de ce monde. Je suis aussi assez pudique et je trouve que bien écrire sur le sexe c’est tout un Art qui n’est pas ce que je fais le mieux. Le Taureau Buffle sensuel et physique que je suis préfère garder ses histoires sexuelles pour l’alcove ou pour une prochain recueil thématique là dessus qui c’est, je ne m’interdis rien.
Cela dit le Métro si je réfléchis bien c’est un grand grand lieu de fantasmes. je crois que beaucoup de gens ne voyagent pas pour aller d’une station à une autre mais pour espérer draguer, rencontrer l’âme soeur ou au pire mater des jambes, des seins, des fesses, des visages et des féminités. Pareil pour les filles, elles matent plus qu’on ne le croit. Je raconte plusieurs dragues avec des personnages âgées qui devraient plaire au plus grand nombre, j’ai fait des rencontres truculentes et très olé olé. Achetez le livre y’a quand même des trucs savoureux à ce niveau-là.
Il est bon mon teasing monsieur l’Editeur ???

4°/ Avec ce livre, on ne comprend toujours pas si tu es de Gauche ou de Droite. Alors, est-ce que tu es de Gauche ou de Droite ?

Voilà une question qu’elle est bonne ! Ca fait plus de 20 ans qu’on s’interroge sur mon idéologie politique, je laisse dubitatif les observateurs. On veut me mettre dans un camp ou un autre. Difficile de répondre car déjà c’est quelque chose d’intime, de personnel les idées politiques, et puis parce que ça change avec l’âge et puis surtout parce que chez moi c’est très complexe. Dire que je suis de Droite est une aberration mais dire que je suis de Gauche n’est pas vrai non plus. Evidemment je ne suis ni d’extrême gauche ni d’extrême droite. Quant au centre, il n’y a pas de centre intéressant en France où je pourrais me retrouver. J’aime beaucoup l’idée d’une Gauche mais avec l’Histoire de la Droite, en France il y a peu de clivages Droite/Gauche, donc je suis un anti sarkozyste primaire, peu séduit par la Gauche politique actuelle mais avec des vraies convictions de Gauche tout de même. Finalement je m’en fiche un peu même si la Politique m’intéresse beaucoup d’un point de vue intellectuel. Tout ça n’est pas très clair ni très intéressant. Je suis de Gauche pour le social, de droite pour l’histoire, l’important c’est que j’ai plutôt des proposes humanistes, tolérants, ouverts, curieux et plein d’empathie même si ce sont des voeux pieux. Finalement c’est une très mauvaise question (rires), je refuse d’être mis dans un camp, je suis mon propre parti, celui de la liberté, de l’amour et de la liberté d’expression et je suis consterné qu’on meurt de la mal-bouffe, de froid, que des gens soient à la rue dans ce pays… voilà la seule politique qui m’intéresse, celle qui se voit concrètement dans la vie des gens, des pauvres, des opprimés, des laissés pour compte et aussi les classes moyennes et les riches devenus précaires....

5°/ Tes réflexions sur la vie, ça ressemble parfois à du bouddhisme. Est-ce un livre à mettre entre les mains des athées et des laïcards ?

C’est surtout un livre à mettre entre les mains de qui le veut bien. Tout le monde peut l’acheter et le lire, les intelligents, les riches, les pauvres, les moches, les beaux, les curieux, les malins, les cultivés, les analphabètes et les gens de toutes les couleurs.

Je pense être un garçon très philosophe. Ce que j’aime dans la vie c’est les problématique, j’adore me poser des questions et confronter ces questionnement au monde et aux gens. Je suis totalement athées mais mystique, fasciné par le Sacré et ses représentations.
Si ça ressemble à du bouddhisme tant mieux, je fais du bouddhisme sans être un spécialiste, je suis le Monsieur Joudain du Bouddhisme, j’en fait sans m’en rendre compte, de manière totalement naturelle.

Mais c’est vrai que ce livre est un peu un guide de vie, je suis un petit gourou sympa et pas trop cher qui prend plaisir à donner des petits trucs pour voir la vie avec plus de bienveillance, plus de poésie et d’humour.
Ta question indique que c’est un eu une bible et je t’en remercie, mes ennemis apprécieront, les pauvres. Déjà que je passe pour un narcissique, un égotiste et un mégalomane, ce livre va participer à ma mauvaise réputation…
Toujours est-il que j’aime à penser que ce petit livre de 100 pages peut et doit et va nourrir ceux qui le lisent. Sans prendre trop de risques, je rembourserai, le cas échéant, l’achat de tout exemplaire de gens qui ont lu cet ouvrage et qui n’ont été nourri de rien et regrette leur achat à la fin. Promesse tenue.

6°/ Puisque ce sont des statuts que tu écris sur Facebook, ce livre est-il nécessaire puisque plus personne n’achète de livres nous dit-on ?

C’est plus que nécessaire de l’acheter, de le posséder, car c’est un objet à part entière qui se garde, se prête s’offre, se relit et est mis en scène pour vraiment raconter le film d’une vie comme celle dans un roman ou celle d’une épopée romanesque, romantique et délirante à la fois.
C’est pas parce qu’on aime et utilise le net et les réseaux sociaux qu’on aime pas l’objet livre et qu’on n’aime pas s’y réfugier. J’adore l’outil informatique mais j’ai toujours eu une passion pour le livre et en faire un, à chaque fois, c’est un plaisir total. Ca tombe bien car ce livre-là, c’est de loin le projet écrit le plus complet, abouti et digne de l’image haute que j’ai de moi que j’ai pu produire.
Je suis très fier de cette composition, de cette compilation, de cette juxtaposition de mots, de récits, d’anecdotes, d’aphorismes. Je crois que c’est un livre livre, foisonnant, étonnant, décapant et vraiment vraiment indispensable en ces temps troublés. Aucune censure, aucun compromis, le meilleur of moi-même dans une grand jubilation créatrice d’échange et de partage avec l’autre.

7° et dernière question : Le baron Édouard-Jean « Wado » Empain, homme d’affaires belge, ex président-directeur-général du groupe Empain-Schneider, petit-fils du général baron Édouard Empain et fils de Jean (dit Johnny) Empain et de l’artiste américaine du burlesque Rozell Rowland a dit qu’il n’avait été qu’une seule fois dans le métro de sa vie : le dimanche 26 mars 1978, le jour de sa libération après 63 jours de captivité. Aurais-tu pu l’avoir croisé ce jour-là ?

Voilà une question bien singulière pour terminer cette interview, ce qui n’est pas pour me déplaire. J’étais assez jeune en 78 mais je peux mieux que quiconque comprendre ce baron car lorsqu’on a été captif dans sa vie, même une minute, même une heure, même quarante huit heures, on goûte ensuite à la liberté avec une joie extrême, une joie merveilleuse. Il est bien aussi que les plus fortunés, les aristocrates prennent le Métro et côtoient, au moins une fois dans leur life, la vraie vie, c’est riche d’enseignements. Mais la captivité est un sujet des plus passionnant. Il faut avoir été captif au moins une fois dans son existence pour aimer encore davantage la Liberté, avec des grandes ailes... comprenne qui pourra !

Contraindre la liberté physique de l’autre est la pire des punitions, elle est, la plupart du temps, d’une totale injustice. L’enfermement devrait être une solution extrême rare et exceptionnelle, malheureusement on enferme souvent les gens pour n’importe quoi par vengeance, par injustice, par bêtise, par erreur, par incompétence et vice(s) que ce soit en prison ou en hôpitaux psy. La Justice en France, en Belgique et ailleurs, trop souvent, est une vaste fumisterie régit par l’argent et le pouvoir, les lois sont poussiéreuses, les policiers et les magistrats dépassés par le Système. Le cas "Jacqueline Sauvage" par exemple est d’ailleurs tout à fait édifiant. Je vous donne un Scoop, un de mes prochains écrits traitera de ce sujet épineux, polémique et important...

On n’est jamais à l’abri d’un succès, on n’est jamais à l’abri de l’amour, on n’est jamais à l’abri d’un séisme magnifique, on n’est jamais à l’abri d’une belle surprise, on n’est jamais à l’abri d’un Bonheur, il ne faut jamais l’oublier. Cette société nous conditionne à l’échec, à la déprime, à la dépression, au renoncement. Il faut savoir dire non et s’autoriser l’exceptionnel. C’est ça surtout être libre !

En attendant, prenez ce Métro joyeux à grande vitesse avec ce livre-là « Métro de Paris, Station Liberté ». Ca parle de moi, de vous, de nous, de la Paix, de la Guerre, du Terrorisme, des gens perdus et bizarres, de l’Amour, de la Joie, du Présent, du Passé, de l’Avenir, ça regarde le monde sous terrain et urbain avec de drôles de lunettes….


(Crédit Photo ; Anne-Elise Barré)


METRO DE PARIS, STATION LIBERTE, Frédéric Vignale, 100 pages, 11 euros, P.a.t (2016)

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L’interview de Vignale sur La Libre Gazette : https://philippeldl.wordpress.com/2016/01/30/metro-de-paris-station-liberte-a-lire-absolument/