Daniel Gapin, artiste engagé fraternel humaniste et naturiste ! (2)

Daniel Gapin, artiste engagé fraternel humaniste et naturiste ! (2)

Difficile d’interviewer Daniel Gapin, tant la palette de ses talents d’infatigable militant l’électrisent dans un enthousiasme communicatif. D’où cette interview fleuve en deux parties où je vous propose de découvrir le sacré bonhomme qui crèche à l’année dans un grand centre naturiste dans le Médoc.
A la fois communiste, chrétien, franc-maçon, naturiste et artiste, j’avoue que le mélange pour le moins hétéroclite des genres, avait de quoi m’attirer, pardi !
Dans cette seconde partie, nous avons discuté de son parcours naturiste d’hier et d’aujourd’hui, puis de l’artiste toujours survolté dans toutes ses expressions visuelles et sensuelles qui se projette dans l’avenir, sa joie de vivre, son amour des femmes et enfin, de l’homme révolté qu’il demeure toujours.

Le Mague : Tu vis à l’année à Euronat, le plus grand centre naturiste de la côte aquitaine. Qu’est-ce que ça t’apporte de vivre nu ?

Daniel Gapin : J’ai découvert le naturisme et le nudisme il y a longtemps en Croatie en 1967, puis au CHM de Montalivet, suite à mon activité dans une entreprise de Bordeaux. Nous vivons actuellement à Euronat, à Grayan et l’Hôpital, dans un chalet acquis depuis 17 ans. Je rêvais d’une totale liberté vestimentaire selon le temps, les activités, les lieux mais cette pratique reste enfermée dans des espaces bien définis. Je n’ai jamais été là aussi un intégriste qui recherche une vie communautaire dans un rejet de l’ordre social et dans une sorte de religion autour du "sacré sauvage". Où l’osmose dans la nature guérirait tous les mots. Je constate les effets dans notre centre naturiste, de la société du "veau d’or" de la consommation. Le statut capitaliste de l’entreprise qui gère ce lieu ne permet pas d’imaginer créer ce petit paradis rêvé par certains d’entre nous. Pour moi, il s’agit par la voie d’associations naturistes, de freiner les excès d’une textilisation qui perturbe les valeurs de tolérance et respect engendrée par une nudité éduquée. Je ne veux pas m’isoler, et je vis ici dans un lieu favorable à la méditation, aux ballades comme à des pratiques sportives et ludiques. Lesquelles favorisent la nécessité de se ressourcer dans un rapport permanent avec la nature et surtout avec la lumière. Observer le ciel étoilé l’hiver ou l’été est une merveille difficile à vivre en ville. Cela s’inscrit dans ma spiritualité. Lorsque j’enlève mes vêtements je pense à François d’ Assise lorsqu’ il s’est mis nu pour fuir la richesse dont il était l’héritier et ainsi épouser la pauvreté.

Le Mague : Les naturistes ont-ils une éthique qui leur permette de lutter en solidarité pour d’autres rapports humains cultivés et respectueux à nu, afin de viser une autre société, que celle du déclin du capitalisme décadent et si méprisant ?

Daniel Gapin : Etre enfermé reste supportable dans la surface d’Euronat. Même si je déplore des clôtures en proliférations du fait de l’individualisme, non conforme d’ailleurs aux contrats liés à des droits de jouissance. Puisque nous ne sommes pas propriétaires des sols. Les courants anarchistes, écologistes, féministes, progressistes sont en difficulté ici aussi et leur rassemblement pour contribuer à rejoindre les luttes anticapitalistes n’est pas envisageable. La révolution ne viendra pas des "culs nus" à mon avis. Puisque nous avons vécu après la guerre durant 40 ans dans une perspective politique socialisante et progressiste Mais la sociale démocratie s’est adonnée aux thèses libérales. De fait, nos sociétés se désagrègent, ce qui se traduit ici aussi, mais comme je dis souvent : "la lutte continue" et fort heureusement des résistances apparaissent.

Le Mague : Tu es artiste et dans ton art, on peut y déceler toutes les riches palettes de ta personnalité affirmée dans tous tes engagements. Quels sentiments te procurent l’exercice de ton art (peinture, sculpture, arts plastiques….)

Daniel Gapin : Depuis l’enfance avec mon frère Philippe nous aimions dessiner et avions créer de nombreux personnages qui se combattaient, étant sensibles à l’histoire, comme notre famille. Un Grand père pilote en 14-18 cela laisse des traces et a provoqué aussi des conflits (celui-ci ayant été pétainiste mais sans jamais dénoncer juifs et résistants...).
Plus tard avec mes études, j’ai été fortement attiré par divers peintres, dont surtout les surréalistes et expressionnistes. Je pense à Picasso, à Chagall qui me fascinent toujours dans une perception poétique, à van Gogh mais aussi à Rouault, Miro et Kandinsky. Mes parents étaient ouverts mais peu cultivés dans ce domaine. Etudiant à Paris je dévorai les musées et expos. J’ai aussi visité l’Hermitage à Leningrad (St Pétersbourg) lors de l’un de mes 2 voyages en URSS où mon passage à Stalingrad m’attacha fortement à ce pays et à son histoire.
Le fait d’avoir croisé Aragon, lu avec avidité ses romans et son œuvre poétique, m’embarqua dans une aventure liée aussi à ma quête d’amour. Mes muses féminines, amantes et compagnes furent des sources d’énergie et de créations. Je pense aussi à Goya et surtout à Bosch et Bruegel qui m’ont inspiré, que j’associe étrangement à Egon Schiele, tant j’aime la dérision, les caricaturistes et aussi l’incontournable Doisneau.

Le Mague : Quel sens tu donnes au terme artiste ?

Daniel Gapin : Le mot artiste s’est vulgarisé après la Renaissance et me gêne, je me dis " artiste-artisan" et je rappelle souvent l’époque des ateliers où se formaient apprentis et compagnons comme pour la construction des cathédrales. Le romantisme a accéléré l’individualisme et des égos se sont multipliés chez des artistes qui prolifèrent. Ils ont souvent une approche relative des mots art et culture. En dehors de mes recherches laborieuses, exigeantes de libre expression, j’aime les chantiers partagés, que je pratique encore. J’ai vécu aussi de fortes complicités avec des peintres et sculpteurs dont l’un m’initia à l’Art Brut et me permit de mieux ressentir la diversité de l’art des peuples d’Afrique.

Le Mague : Et « La vie d’artiste », comme la célèbre chanson de Léo Ferré, c’est quoi pour toi ?

Daniel Gapin : Il faut choisir tant la vie est courte pour un homme qui ignore l’ennui. Et, si le verbe et l’écriture font partie de moi, peindre et former laisseront des traces à des interprétations diverses, au-delà de mes intentions où la vie triomphe toujours par les couleurs. Je ne peux m’exprimer dans le gris et dans une esthétique souvent froide et trop calculée. Je stimule toujours la créativité au-delà de la technique et des proportions. Ces aspects intervenants au fur et à mesure sans devoir supplanter l’émotion, lorsque je suis sollicité pour accompagner des envies de dessiner, peindre ou façonner des volumes....

Le Mague : Dans le Médoc, existe-t-il des lieux et structures ouvertes qui peuvent accueillir des artistes accomplis et engagés comme toi ?

Daniel Gapin : Pour en venir sur mes incursions culturelles dans notre Médoc... brièvement ! L’artiste-artisan engagé que je suis a été plus sensible aux artistes qui épousaient les causes révolutionnaires et j’en ai rencontré, notamment lors de ces 30 présences à la Fête de l’Humanité, (pour l’ essentiel au salon du livre) qui reste la plus grande fête populaire, culturelle et politique malgré la censure des médias. Je n’ai jamais été stalinien et j’ai toujours combattu la bureaucratie et la prétention de certains technocrates à laisser croire qu’ils pouvaient penser à la place du peuple. L’idée d’un système autogestionnaire socialiste a fortement accompagné mes initiatives et recherches. Entre mes séjours en Touraine, en Isère et haute Savoie et ici en Gironde. Sans oublier la mise en séquences d’une pièce jouée au Nicaragua sur la révolution Française par 12 français devant des paysans armés.

Le Mague : Ploum ploum, ploum caribou, une fois de plus, tu te réfères à ton cher passé et tu ne réponds pas à ma question ! Mais présentement et concrètement dans le Médoc, Daniel où en es-tu de tes interventions culturelles ?

Daniel Gapin : Ici je me sens très isolé dans ma perception du rôle de la culture et des créations artistiques, qui ne sauraient être un supplément d’âme mais l’âme de toute vie. Bien sûr je mélange dans un égrégore la danse, la musique, la poésie et toutes les expressions .Je vais vivre une nouvelle expérience avec des enfants à Grayan et l’Hôpital à l’école et ma passion consistera de transmettre une joie de vivre et révéler des talents, tant le champ des possibles est immense pour notre futur à réinventer.

Le Mague : Les femmes ont eu et ont toujours une grande importance dans ton existence.

Daniel : Je me dois maintenant aussi de mentionner ma vie ici depuis 3 ans où j’ai rencontré une jeune femme qui m’a épousé dans une belle chapelle, pour mon premier mariage religieux. Elle a un cœur immense et celui-ci représente cette clef de voûte qui devrait conforter une construction, après un parcours agité socialement et sentimentalement. J’ai partagé mes engagements avec des femmes militantes dans une fidélité relative, (je suis resté plus fidèle à mes idées), mais dans le respect de l’amour vécu, reçu et donné. Cette vie m’a offert 4 enfants qui portent aussi des valeurs HUMANISTES dans leurs familles.

Le Mague : Dans ton discours et tes actes, tu parles souvent de joie et ton amour immodéré de la vie fraternelle.

Le Mague : Vivant dans un espace naturiste surtout habité en dehors de l’été par des retraités, je refuse toute forme de repli, pour moi mortifère. Je poursuivrai ma quête en continuant à démontrer le lien entre ma foi, mes choix politiques et cette franc-maçonnerie, contre le scepticisme, la misère sociale et l’égoïsme engendré par l’argent et la peur. Il nous faut ressusciter un autre monde, monter notre pierre et par le "pyramidion" se relier aux cieux, aux étoiles, à un univers qui nous appelle.... VIVE LA VIE !

Le Mague : Quels sont tes projets dans l’avenir proche à concrétiser ?

Daniel Gapin : Pour mes projets, il s’agit de reprendre l’offensive et réussir des projets culturels associant " ART-Culture et Résistances "... contre une pensée unique. Ce que je n’ai pu pleinement encore réaliser au sein du monde associatif dans le Médoc ! Je souhaite toujours les états généraux de la Culture dans le Médoc et j’envisage de réunir dans un esprit ouvert des écrivains, artistes, intellectuels et militant(e)s progressistes, tant la situation actuelle sociale et politique nous pousse à agir.

Le Mague : A toi le mot de la fin pour dire tout ce que tu as à dire et qui n’a pas encore été dit en toute liberté.

Daniel Gapin : J’aimerai exprimer un cri pour la fin... Je dirai que la chute de la composante "sociale libérale" va réveiller de nouveaux appétits opportunistes, tant nombreux sont ceux qui rêvent d’un gourou. Alors qu’il faudrait se rassembler sur un VRAI programme révolutionnaire qui mettrait fin à la bourse et condamnerait tous ces voleurs qui nous pillent, nous abrutissent et nous mènent vers le fascisme et multiplient des guerres hypocrites. Ils salissent notre histoire avec des discours trompeurs, alors qu’ils veulent créer des féodalités régionales pour mieux diviser et écraser les consciences... Le Medef et le pouvoir actuel veulent liquider tous les acquis mis en place par le Conseil National de la Résistance (CNR) dans la caricature du marxisme et mettre notre peuple à genoux.

Le Mague : Un grand merci à toi pour tes éclairages. « Les jours heureux » du CNR sont en périls, il ne tient qu’à nous de nous rassembler et résister par toutes les expressions culturelles sociales et politiques, dans le Médoc et partout ici et maintenant.

* Pour information, Daniel Gapin sera l’invité de l’émission « Le Médoc culturel » sur Aqui FM, 98 mhz, le mardi 21 octobre de 19 h 30 à 20 h 30, par le Franck dit Bart et ses acolytes. Alors, toutes et tous à vos postes et bonne écoute dans le prolongement de cette interview fraternelle.
Pour l’écouter en direct le jour J, où que vous soyez sur la planète, c’est ici : http://www.aquifm.fr/

Cliquez ici pour retrouver la première partie de l’interview de Daniel Gapin :
http://www.lemague.net/dyn/spip.php?article8770

Tous les visuels de l’article sont des œuvres de Daniel Gapin