JE N’AI PAS DE COEUR

JE N'AI PAS DE COEUR

Moi, je ne fais pas dans la sensiblerie. Je ne distribue pas des caresses sentimentales mais des raclées mentales.

Je suis un sans-coeur. Un vrai, un dur, un tempérament tout de rigueur et d’acier.

A la place de cette guimauve émotive qui fait chialer les faibles et ramollit leur matière grise, j’ai un cerveau.

Un cerveau mes amis.

Une pierre qui médite. Un diamant cérébral. Un soleil glacé.

Une pure machine, une “mécanique cognitive” tournant à la perfection.

J’ai remplacé les larmes de la compassion stérile par l’impartiale, froide, souveraine et féconde raison.

Plus mon “palpitant” est dur, plus mes pensées sont éclatantes. Plus je le ferme aux implorations insistantes et indignes des souffrants, plus ma divine cervelle voit juste. L’accès à la vérité est au prix de la dureté de ce caillou battant dans ma poitrine.

J’ai éteint depuis longtemps la flamme de mon coeur pour allumer celle de mon esprit.

Et paradoxalement l’intellect est de glace : c’est ce qui fait sa supériorité sur la sotte ébullition du puits à haines et tendresses.

En devenant insensible par le bas, je suis devenu brillant par le haut. En abandonnant toute pitié, j’ai découvert l’olympienne réflexion.

La “limace à passions” est bête, grossière, injuste, aveugle, intéressée, mauvaise, égoïste, perverse, brutale et impure.

L’organe neuronal est efficace, équitable, noble, fraternel, altruiste, doux, vertueux, juste et bon.

Le “cognant” et ses tempêtes stupides est fatalement dans l’erreur. Le “crâne raisonnant”, qui est de marbre, ne fait jamais rien hors de la droiture, il demeure dans le vrai quelles que soient les saisons.

La “tripe affective” fonce comme une folle, la tête calcule sagement.

Celui qui écoute sa corde sensible brait comme un âne et trébuche car il lève les yeux au ciel en soupirant, celui qui pense se tait et marche droit car il regarde ses pieds sans état d’âme.

La “fleur qui bat” est une mauvaise herbe générant des fruits écoeurants -trop acides ou trop sucrés-, c’est un insatiable chardon engraissant sur les vomissures des éclopés, des cancéreux, des clochards, des moribonds et des malodorants orphelins.

Avec ses vains emballements, ses brûlures imbéciles et ses regards de myope, le “cloaque à bons sentiments” est un animal pouilleux. Alors que l’intelligence et ses justesses de vue est une statue évoluée.

Parce que la pompe à sang ne génère aucune idée mais plein de rêves poisseux, je la déclare définitivement infirme.

Moi, à la place de cette éponge à ordures sociales, j’ai un astre gelé qui illumine mon front impassible.