Gorilles authentiques et intimes !

Gorilles authentiques et intimes !

Florence Perroux aiguise toute notre attention dans son ouvrage « Gorilles portraits intimes », à la gloire de ces grands singes. Elle détonne notre vision tronquée des gorilles à la fois si forts physiquement mais aussi doués des caractéristiques si particulières et partagées entre l’homme et le singe : la douceur et l’altruisme. Sébastien Meys photographe a joint son talent pour tirer au clair en noir et blanc des portraits tellement authentiques et intimes dans leur milieu naturel en Afrique et au zoo de la Palmyre, que l’on sort chaviré de cette lecture. Plaidoyer pour la sauvegarde des gorilles, un livre indispensable !

Florence Perroux éprouva un coup de foudre, lors de son premier contact en 2005 avec l’arrivée d’Ybana femelle gorille au zoo de la Palmyre où elle est responsable conservation et pédagogie.
King Kong peut bien aller jouer au ping pong avec notre vision étriquée des gorilles. On godille en aveugle au sujet des muscles et la force tranquille de ces « doux géants africains » comme elle aime les désigner. En effet : « contempler une masse de près de deux cents kilos s’ébattre délicatement avec un bébé à peine plus gros qu’un ballon de basket suscite généralement beaucoup d’étonnement chez le public non averti » (in « Gorilles portraits intimes  » page 71)

« Altruisme et empathie  »…. parmi deux traits de caractère de ces grands singes qui nous ouvrent leurs univers dans ce précieux livre.

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Soutenance ou non soutenance du regard dans le blanc des yeux avec un gorille. Qu’en pense Florence Perroux ? « Tout va dépendre de l’individu et du contexte de la situation. On peut soutenir le regard d’un dos argenté qui est paisible dans son activité. Après ça dépend de l’histoire de l’individu, suivant qu’il est sous tension ou pas. Il est clair que le regard est un élément important chez les gorilles, notamment chez les mâles adultes. Et donc le meilleur moyen de se faire accepter et bien voir, c’est de ne pas trop insister et de savoir regarder et quand regarder. Moi je peux avoir un contact avec un mâle reproducteur à 30 cm de la grille et le regarder dans les yeux sans que ça ne pose aucun problème. Parce qu’à ce moment-là il est détendu. S’il est sous tension, je n’irai pas chercher son regard de façon prolongé. » (Florence Perroux in In La marche des sciences par Aurélie Luneau : « les grands singes et nous  » avec Chris Herzfeld et Florence Perroux le 27/12/ 2012 sur France Culture)

Une fois compris cette interaction de la communication dans le respect des interlocuteurs en présence, Florence Perroux et son compagnon photographe Sébastien Meys ont voulu creuser la question au sein de l’univers en liberté ou en captivité des gorilles.
D’abord, au zoo de la Palmyre en présence d’Ybana jeune femelle gorille, aux côtés du mâle Bongo dos argenté et Yola autre femelle. Les joies de la vie familiale en quelque sorte ! Les noms donnés aux singes m’ont toujours étonnée. A commencer par le mien : Missdinguette la Singette…. Franchement !

« Au niveau des prénoms, c’est peut-être un aspect personnel puisque je me bats dans le parc où je travaille pour que les prénoms des animaux et en particulier les grands singes ne soient pas trop proches de ceux que l’on peut donner à des humains tout simplement. En même temps ils ont besoin d’être nommés par ce que ce sont des individus. On entretient des rapports proches avec eux  ». (Florence Perroux in In La marche des sciences par Aurélie Luneau  : « les grands singes et nous  » avec Chris Herzfeld et Florence Perroux le 27/12/ 2012 sur France Culture)

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Puis en 2009, ce fut le déclic. Les deux auteurs prennent leurs ailes à leur cou et atterrissent sur les plateaux d’un volcan rwandais à la rencontre des gorilles en liberté. Cet ouvrage ouvre à chaque page sur la magie des paysages où brillent des étincelles d’humanité dans les yeux de ces grands singes pacifiques et végétariens. Et comme pour Chris Herzfeld, Florence Perroux partage l’idée qu’il faut arrêter de scinder en deux catégories les singes captifs et les singes dans leur milieu naturel. « De nos jour, il y a une tendance dans le milieu où je travaille d’entendre de plus en plus dire : de toute façon les animaux que nous avons qui vivent en captivité n’ont plus rien à voir avec ceux qui vivent dans leur milieu naturel. Quasi génétiquement, ce ne sont plus les mêmes animaux. Je lutte contre cette idée-là. Effectivement peut-être qu’à une échelle génétique à une échelle très longue dans le temps, on pourra dire cela. Merci de l’avoir dit que ces animaux font preuves d’une flexibilité d’une plasticité et donc ils ne sont pas séparés. Le contexte dans lequel ils sont, fait qu’ils vont développer des facultés différentes nouvelles autres, mais similaires, par ce qu’ils sont curieux et inventifs ». (Florence Perroux in In La marche des sciences par Aurélie Luneau : « les grands singes et nous  » avec Chris Herzfeld et Florence Perroux le 27/12/ 2012 sur France Culture)

C’est tellement véridique, que les photos sont d’un tel naturel et d’une telle qualité, que l’on n’est plus en mesure de discerner celles prises au zoo et celles en Afrique. C’est stupéfiant ! Je l’avoue, malgré mon regard de Singette très sensible à mes condisciples, j’ai été bluffée. D’autant plus stupéfiant que les photos en lnoir et blanc accentuent d’avantage le contraste entre ces grands corps et la force fragile qu’ils recèlent en eux à se fondre dans le paysage pour être tranquille.

Cet ouvrage est dédié entre autre : « A ceux qui s’impliquent quotidiennement et courageusement pour la sauvegarde des gorilles  ». La postface de Delphine Roulet primatologue va aussi dans le sens du plaidoyer en faveur des gorilles. On a tout à apprendre d’eux et Florence Perroux, je l’avoue, m’a totalement convaincue. « Ce qu’on continue d’apprendre d’eux aujourd’hui c’est qu’ils ont une conscience de soi ainsi qu’une extrême richesse comportementale liée la finesse dont ils peuvent faire preuve chaque jour  ». (Florence Perroux in In La marche des sciences par Aurélie Luneau : « les grands singes et nous  » avec Chris Herzfeld et Florence Perroux le 27/12/ 2012 sur France Culture)

Les gorilles à cœur ouvert dans cet ouvrage de très grande qualité, tant dans la richesse des textes, que des visuels, ce livre est à mettre entre toutes les mains. C’était le conseil avisé de la Singette toujours aussi impressionnée par les gorilles et qui garde Gogo, un dos argenté en amour dans mes souvenirs les plus torrides, il y a déjà trop longtemps. Un très grand merci en tout cas à Florence Perroux et Sébastien Meys à propos de leur combat pour la sauvegarde des gorilles que je soutiens de toutes mes modestes tripes.

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Gorilles portraits intimes de Florence Perroux et Sébastien Meys, avec une postface de Delphine Roullet, éditions Le Pommier, 143 page, septembre 2012, 29 euros

La marche des sciences par Aurélie Luneau : « les grands singes et nous » avec Chris Herzfeld et Florence Perroux le 27/12/ 2012 sur France Culture : http://www.franceculture.fr/emission-la-marche-des-sciences-les-grands-singes-et-nous-2012-12-27

Visuels : copyright Sébastien Meys, éditions Le Pommier