LA GRIPPE COLONIALE (t2) : grippe raciste

LA GRIPPE COLONIALE (t2) : grippe raciste

Retour sur l’île de la Réunion, les « poilus » insulaires sont revenus depuis la France métropolitaine, mais la grippe espagnole a fait le voyage jusqu’au port, et a pris place dans l’île. La contagion se propage, les cadavres s’accumulent dans les rues. Il faut désigner un coupable à tout ça : les héros de guerre ou les étrangers ?! Certainement pas les colonisateurs. La grippe propage le racisme sur l’île.

L’île de la Réunion a peur, la grippe s’est propagée parmi les habitants, les corps commencent à joncher sur les trottoirs, le docteur et le soldat Évariste parcourent en moto side-car des quartiers, pour apporter au mieux des soins aux malades, mais rien n’y fait. Tous s’écroulent les un après les autres. Marie, la fiancée de Grondin meurt sur son lieu de travail où elle officiait comme gouvernante. Les mesures deviennent de plus en plus restrictives surtout pour les Réunionnais d’origine. La police coloniale française n’hésite pas à frapper ceux qui n’obéissent pas ces divers décrets.
Cette grippe entraîne les pires soupçons, les articles les plus dangereux sont écrit, il faut trouver un coupable à cette épidémie, et comme ça ne peut être les colons français venus de métropole : les chinois sont mis en cause ! Les locaux de l’île ne tarde pas à faire parler la lame , le feu et la poudre. Mais les colons sont de plus en plus sévères, même l’église catholique ne protège ni ne rejoint ses ouailles pris au piège d’une fosse, car eux aussi, issues des quartiers les plus pauvres, se retrouvent coupables de cette épidémie. Les riches français restent bien chez eux, ils ne sont pas fautifs, ils sont supérieurs... Nos héros de guerre n’y peuvent plus rien, la police française tabasse même Voltaire au geste héroïque de guerre face à un officier allemand, sur cette première partie de la 1ière guerre mondiale. Sa couleur de peau ne convient pas, il fait parti des coupable. Grondin est en rage, après avoir avalé une dose d’un ’rit punch bien corsé au rhum, plus rien ne lui fait peur, il cogne, ni même de se retrouver au milieu d’un amas de cadavres, tous décédés de la grippe. Cette maladie donne un mauvais tournant à l’histoire de France, à travers sa colonie.
Fuir la grippe, la violence de l’île pour terminer la guerre ...Même le cyclone ne pourra rien.


il y a huit, le premier tome !

Huit voir même neuf ans d’attente ! Après un prix à Angoulême, c’est ’tit punch à gogo ! On avait même cru à un changement de dessinateur tellement c’était long ! Mais du côté de l’Océan indien, on prend son temps ! Rassurez vous, le dessinateur Huo Chao Si n’a pas eu de grippe contagieuse. Son graphisme est resté à l’égal du premier tome.Le trait fin , tremblant, des visages abîmés, ridés sur ses personnages de guerre, de révolte, sans oublier la moustache fournit pour le chef de la police coloniale.Le dessin prend une allure de caricature pour certains, des regards d’hallucinés, de rage, de folie, de doute se croisent au fil des cases. Les décors sont classiques dans la mise en perspective d’une rue, avec ce petit plus au fur et à mesure des cases, cette impression de recul, pour s’éloigner d’un endroit où la grippe est censée plus frappée. Les différences entre les maisons du peuple réunionnais , face à celles de colons plus importantes, plus imposantes, un bel intérieur, et le meilleur rhum de l’île en cave.
Le découpage s’amorce plus précis sur des dialogues, des rencontres, plus de case, avec des intentions selon le scénario, comme une page avec un brin d’humour autour de ce drame, avec deux paysans réunionnais devant l’amas de corps.

Appolo a bouclé sa grippe, il l’a vaincue, au bout de ces longues années, et pourtant c’était prêt, mais il l’a aussi bien caché que le script d’un blockbuster du cinéma ! ( les producteurs américains devraient prendre exemple sur ce brillant scénariste de bande dessinée). Du désert de jour, à la nuit en feu, où le noir se cache pour mieux taper, le racisme ambiant au fil de cette histoire, devient aussi dangereux que la grippe. Qu’il vienne de la politique coloniale avec ce décret pour séparer les pauvres des riches, des réunionnais n’hésitent pas à faire parler les armes et le feu envers les chinois, montrés coupable de l’épidémie par la presse dirigée par les colons !
Sombre suite, où tout ce qui devait apporter du bonheur, du réconfort, de l’ovation à des Évariste, Grondin, Voltaire ou Camille, se voit absorber par cette grippe.
Les dialogues gardent bien sur l’authenticité de la langue locale, en plus du parler « colonial » de métropole.
Appolo place Évariste comme grand témoin, croisant ses amis de guerre, ses camarades de voyage depuis cet allé-retour vers la guerre des tranchées. Évariste se veut rassurant, il tente de calmer les plus durs, mais ne peut empêcher les actes de folies : incendie, ou la violence policière.
La 1ere guerre mondiale, les tranchées, ne sont qu’un souvenir de fierté pour certains, mais pour la grippe, il n’en est rien. Les allemands ne sont pas sur l’île, Ils n’ont pas voyagé jusque là . Pourtant quand sonne le rappel à nouveau des troupes, le brave Voltaire, natif de la Réunion, a toujours vécu à St Denis, est rappelé parmi les « tirailleurs sénégalais » ! Grondin reste la force de ce groupe de soldats, il ne craint plus rien, même pas cette maladie qui tue sa fiancée. Il donne un coup de « justice », un ras le bol sur cette folie causée par la grippe.

Second volet attendu et réussit pour le duo de la Grippe Coloniale ! Huit ans pour dévoiler un coin sombre de l’histoire coloniale de la France, dans une ambiance de ségrégation, de racisme, où on entraîne les citadins a se battre entre eux, des insulaires contre les chinois, et les ordres de la république pour parquer cette population « pauvre » loin des riches, dans des tranchées. Un coup d’histoire réaliste, avec ses drames, et sa patience avec Évariste, la colère de Grondin, le courage de Voltaire. La grippe coloniale peut vivre un second succès, on l’attendra dans les essentiels d’Angoulême.
Oté ! Et buvez le ’tit punch avec modération pour la lecture.

LA GRIPPE COLONIALE (t2 ) Cyclone la peste / Appolo (scénario) et Huo Chao Si (dessin) / Vents d’ouest