Critique du Bourgeois Gentilhomme avec François MOREL

Critique du Bourgeois Gentilhomme avec François MOREL

Il n’y a rien d’incongru dans la présence de François Morel au sein de la célébrissime pièce de Jean-Baptiste Poquelin aka Molière : "LE BOURGEOIS GENTILHOMME". En effet la Farce de ce dernier est totalement de Gauche, elle dénonce avec humour, dérision et un art habile de caricature d’un Bourgeois qui se perd à vouloir devenir un Noble, d’un homme qui se ridiculise en vivant au dessus de sa classe en singeant les bonnes manières et le Bling Bling des bien nés. Un naif qui se fait surtout manipuler et voler son argent par quelqu’un qui le méprise socialement.
En cela la pièce a une intéressante résonance en cette période politique anti-Sarkozyste, en cette période pré-éléctorale, ce qui ne doit pas déplaire à François Morel.

Au théâtre de la Porte St Martin dirigé par Jean-Claude Camus, nous avons assisté à la Première de cette pièce fort ambitieuse qui s’est donnée les moyens de ses ambitions, c’est le moins qu’on puisse dire.
Les décors sont grandioses et inventifs, il y a cinq musiciens en permanence sur scène et au moins une vingtaine de comédiens autour de François Morel.
Une fort belle troupe de tous les âges, tous plus talentueux les uns que les autres, tous au service de la mécanique de Molière et d’un spectacle de qualité.

Le texte de celui-ci est fort bien respecté, la mise en scène de Catherine Hiegel ne manque pas d’idées et de trouvailles de toutes sortes et elle a porté une attention particulière à chacun. Il n’y a aucun flottement dans son travail. On regrettera juste quelques longueurs dans les scènes finales même si cette pièce dans l’ensemble offre des moments mordants typique de la comédie-ballet de Molière et Jean-Baptiste Lully.
A part ce petit bémol (qui concerne surtout la dernière partie autour des chants et danses du fils du Grand Turc), on ne peut que conseiller ce divertissement haut de gamme conçu comme un grand show, musical et de danse, à part entière.
La Bande son, en live, est superbe, les danseurs sont agiles et gracieux et le tout a une belle énergie très fédératrice qui donne encore plus de poids et de densité à la pièce.

François Morel, très bien entouré - une mention particulière au maître de Philosophie joué par le Très Grand comédien Alain Pralon - a une grande force comique, toujours authentique, une grande capacité à jouer la vraie naïveté lumineuse, l’étonnement permanent, la candeur magnifique, mais il a aussi une grand humanité intrinsèque, il est un Monsieur Jourdain rural, maladroit et sot, de belle facture.
François Morel donne beaucoup dans ce rôle titre. Il est corps et âme dévoué au rôle, en slip ou en habit ridicule de faux Noble il excelle de la même manière. Toujours juste, toujours attendrissant, toujours prompt à transmettre de l’émotion. Toujours au service du texte, expressif et convaincant.

Il faut voir ce Bourgeois gentilhomme moderne et audacieux, ce personnage a beaucoup à nous apprendre en ces temps où les thèmes de la lutte des classes, du paraître, de la fausseté et de l’arrivisme sont toujours autant d’actualité.

Il faut y voir un message caché, on ne peut pas tricher sur sa nature profonde sinon se ridiculise et on devient le dindon de la Farce.

On a tous rencontré des Monsieur Joudain dans les mondanités, les diners en ville... Allez voir cette version avec François Morel donnera du sens et enrichira votre regard sur la société actuelle. Molière a très bien vieilli et Morel lui rend un bel hommage en continuant à mettre en bouche ses vers et sa Prose... en le sachant (très) bien !

Le Bourgeois gentilhomme, de Molière, mise en scène de Catherine Hiegel,
Théâtre de la Porte Saint-Martin, à partir du 12 janvier, 01-42-08-96-52.