Florent Marchet, sous une lune musicale prometteuse

Florent Marchet, sous une lune musicale prometteuse

Florent Marchet est un garçon atypique. Né dans la musique, il rêvait de salles de concert philharmoniques, d’ovations gargantuesques dans l’auditorium Jacques Satie de Châteauroux ou encore de longues compositions classiques retranscrites par une armada de cordes jouées d’une estrade d’orchestre national. Et pourtant, c’est dans un village, dans un microcosme rural, tout simplement, qu’il a composé, enregistré puis sorti (de façon nationale tout de même) l’une des plus belles pièces en cette année 2004. Entre la déprime de Souchon et la pop lyrique des Beatles, vous pouvez retenir le nom de ce garçon mélomane et participer à son avenir radieux dans la chanson française.

1. Apparemment, Vous aviez très tôt la conviction de devenir musicien ?

Florent Marchet : « Mes parents sont propriétaires d’un théâtre donc très jeune j’étais attiré sur scène ou je mettais mes doigts sur les pianos. D’ailleurs j’ai commencé le piano dès l’âge de 5 ans. Pour sortir du terreau familial de la chanson française très pesant, je me suis penché rapidement sur la musique classique. Jusqu’à l’âge de 15-16 ans je n’ai du écouter que ça. Dans mes rêves les plus fous je voulais être concertiste…ou tennisman professionnel. »

2. Avec l’obligation de refouler au plus profond de vous cette pulsion créatrice pop ?

Florent Marchet : « Non je n’avais même pas de pulsion parce qu’en fait je ne connaissais pas grand chose en pop ou même en rock. J’étais vraiment uniquement attiré vers la musique classique. Après je suis passé par plein de stades : le jazz mais aussi une période où j’avais besoin d’intellectualiser la musique en refoulant mon émotivité et mes émotions. J’ai fait des musiques du monde pour vivre en temps que musicien. Je ne suis venu que sur le tard dans le monde du folk, de la pop et du rock. Par contre tout de suite cela m’a parlé avec tout ce que j’aimais dans les autres styles : que ce soit le classique ou les musiques traditionnelles. Amplifié par une émotion qui me parlait d’avantage. »

3. Dans vos textes on sent une désillusion face au monde moderne ?

Florent Marchet : « On vit dans un monde ultra-libéral qui est en train d’être poussé à son paroxysme, avec des fossés qui se creusent, avec des gens qui sont dépendants de la consommation, menottés également jusque dans leurs rêves. La pensée du monde se résume à l’argent. Alors soit on s’engage en souffrant beaucoup, soit on en parle en essayant, entre guillemets, de sublimer le pathétique. Je pense que c’est une bonne thérapie d’en rire. Même si le rire est jaune. »

4. Vous franchissez l’autodérision jusqu’à vous faire aimer pour vos tares ?

Florent Marchet : « Ce qui m’a toujours fasciné ce sont les marginaux et les mondes clos. J’ai travaillé dans des hôpitaux psychiatriques ou encore donné des concerts dans des prisons et là vous vous retrouvez dans un monde totalement différent du votre. Dans la chanson ’Je n’ai pensé qu’à Moi’ le truc qui m’intéressait c’était de parler de ces personnages de la société, ces gens qu’on essaye de cacher, qui font peur car ils sont l’échec d’un modèle. »

5. Votre musique est envolée, grandiloquente, est ce pour équilibrer votre poésie réaliste et crue ?

Florent Marchet : « La musique a toujours été pour moi un bonbon placebo. Quelque chose qui venait à moi pour me faire du bien. Mes parents n’ont jamais voulu avoir de chien quand j’étais jeune, j’ai découvert que mon meilleur animal de compagnie c’était le piano. »

6. Un piano à queue est un peu plus difficile à faire sortir le soir ?

Florent Marchet : « Oui mais c’est beaucoup plus propre et l’on se rend compte qu’on fait une économie dingue en croquette. »

7. Vous n’hésitez pas à mélanger un orgue, une guitare électrique, un clavecin, un cor ?

Florent Marchet : « Au départ je suis assez boulimique dans la vie. J’aime jouer de tous les instruments. Je viens de l’école multi-instrumentiste, le garçon qui a réussi à avoir un ordinateur à la maison, un mini-studio pour rapidement passer des journées à composer. »

8. Vous évoquez souvent les ordinateurs ? ils sont indispensables à vos compositions ?

Florent Marchet : « Avec un simple ordinateur, on peut assimiler une trompette et la coupler avec un orgue sans aucun problème. Par contre, l’effet inverse avec ce genre de technologie c’est que l’on peut facilement se laisser déborder. »

9. La musique se rapproche des mathématiques tout comme les systèmes informatiques ?

Florent Marchet : « L’ordinateur m’aide vraiment sur le travail d’arrangement. Ce qui me fascinait, par exemple avec les Beatles, c’était le fait d’assembler les sons, de faire jouer plusieurs musiciens ensemble, l’ordinateur pour ça, m’apporte la rigueur que je n’avais pas toujours. Pour moi la musique représente l’ordre que je pourrais mettre dans ma vie. »

10. Pour votre album vous avez fait appel à de « véritables » musiciens charnels et très réputés, n’avez vous pas eu peur de vous retrouver face à eux ?

Florent Marchet : « Non car j’ai confiance en ce que je fais. J’essaye de m’exprimer le mieux possible à travers la musique car il se trouve que c’est l’élément de communication avec lequel je suis le plus à l’aise. J’ai simplement envie de me manifester à travers ce médiateur là. Après je travaille avec des gens qui seront au service d’une pensée que j’ai au départ et qui me la rende plus accessible à l’arrivée. »

11. C’est grâce à eux qu’une chanson comme ’Dimanche’ peut se retrouver, sur le fond, avec un titre plus pop comme ’Tous Pareils’ ?

Florent Marchet : « Il y a une part de leur travail dans ces chansons mais finalement je suis resté assez fidèle à ce que j’avais fait tout seul dans ma cuisine. »

12. Pouvez vous m’expliquer ce qui s’est passé à ICP lorsque vous avez débarqué au studio avec vos maquettes ?

Florent Marchet : « C’était juste que j’étais exigeant, avec une idée très précise de ce que je voulais faire et je crois ne pas avoir rencontré les bonnes personnes là bas pour réaliser mon projet. »

13. La résurrection est venue à Gargilesse, d’où le titre de l’album ?

Florent Marchet : « Ma rencontre avec Stéphane Prat aussi. Nous avons des goûts en commun, une idée du son similaire ce qui est essentiel pour moi. Je préfère travailler avec des gens qui sont moins techniciens peut être, moins virtuoses mais avec qui j’ai une réel entente et une vraie adéquation. Après Gargilesse est effectivement l’endroit où tout à recommencé. Je suis quelqu’un d’assez angoissé en général parce que je veux toujours aller au maximum des possibilités. Fouiller dans les extrêmes. En studio je me rendais compte que tout m’échappait. Les chansons ont été conçues dans une toute petite pièce, je ne voulais pas qu’on élargisse d’avantage le périmètre. Je n’avais pas envie de quelque chose avec un gros son, instauré par une grosse machine car c’était en totale rupture avec le postulat de départ. »

14. On a eu l’occasion de vous voir sur scène en première partie de Miossec notamment ?

Florent Marchet : « La scène est ma première école. J’ai commencé par là. Mon souhait le plus cher c’était de vivre de la musique, peu importe que ce soit en tant que chanteur, musicien ou back ligner. J’ai donc fait énormément de bars, de café-concerts. »

15. Avec une sacrée répartie face au public ?

Florent Marchet : « C’est ce que je garde du bar. Arriver à toucher le public pour communiquer avec lui c’est hyper-difficile. Donc je me mettais à raconter des histoires drôles avant d’amener, presque de force, le spectateur à écouter ma chanson. J’aime bien l’idée de partage. »

16. Vous souhaitiez sortir de l’ombre sur un titre de l’album, maintenant que c’est fait, est ce que la lumière a la saveur que vous vous en faisiez ?

Florent Marchet : « La chanson est à prendre au second degré. Au départ je voulais faire mon album à la maison sans forcément que l’on en arrive à parler de mon travail au grand public (même si cela fait toujours plaisir de le faire partager à un maximum de personnes). Je n’avais pas ce truc de me vendre pour arriver absolument à signer un album. Je ne voulais faire aucun compromis dans mon travail. Ce qui est arrivé. Par contre, après quand j’ai cherché à démarcher les maisons de disques, je me suis retrouvé dans des soirées avec des gens qui étaient prêts à tuer père et mère pour faire un disque. »

17. Freud disait que pour être entièrement libre il fallait exclure de soi la pitié, le dégoût et l’angoisse ?

Florent Marchet : « La liberté pour moi est quelque chose qui n’existe absolument pas. La liberté c’est le simple fait de pouvoir agir face à des règles fixées. On n’est pas libre, c’est impossible…. Heureusement peut être. »

Découvrez son disque

Découvrez son disque