Meurtres exquis chez les bouffeurs de curés

Meurtres exquis chez les bouffeurs de curés

Par le biais d’un nouveau polar truculent, Jean-Marc Raynaud nous emmène dans les coulisses de la Libre pensée, mouvement qui mêle athées, mécréants, anticléricaux, rationalistes, laïcs... Un livre qui n’a pas circulé pendant les messes des Journées mondiales de la jeunesse.

Jamais deux sans trois. Après des meurtres exquis qui eurent pour cadre la librairie du Monde libertaire pour l’un et l’île d’Oléron pour l’autre, Jean-Marc Raynaud vient cette fois poser ses cadavres dans les coulisses de la Libre pensée.

Le premier des macchabées surgit de la réserve d’une librairie libre penseuse (sise au 10-12 rue des Fossés-Saint-Jacques à Paris). Signe particulier : la victime brandit un membrum virile qui défie l’entendement. Le coït interrompu de cet athée américain un peu louche avec une camarade adepte de l’union libre se termine en public dans un gros dégueulis de sang. Consternation dans l’assemblée. Une macabre livraison complète peu après le tableau. Des caisses contenant un corps démembré surmonté d’une tête de cochon et des restes humains laissant supposer qu’il s’agit de religieux juif et musulman sont déposées devant le commissariat chargé de l’enquête.

A première vue, on peut supposer que c’est le congrès international de la Libre pensée qui est visé. Rien de mieux que de vilains faits-divers pour jeter le discrédit sur les ennemis des religions. Il n’y a pas de fumée sans feu. Etc. Air connu. Comme lors des précédents épisodes, Ted Chaucre, Ed Merlieux et Denis Saint, héros des services secrets de la Fédération anarchiste, vont énergiquement démêler les nœuds de l’énigme à coups de perceuse et de chalumeau.

Membre à la fois de la Fédération nationale de la Libre pensée et de l’Association des libres penseurs de France, le très unitaire Jean-Marc Raynaud connaît son sujet par cœur. Le roman est un prétexte original pour brosser l’histoire de la Libre pensée depuis 1848 jusqu’à aujourd’hui, en passant par la loi de 1905 (séparation des Eglises et de l’Etat), par les unions ponctuelles ou par les désunions fratricides.

Le résultat tient du livre d’histoire, du tract, du carnet d’adresses (librairies, éditions, viticulteurs…), de la pub pour les revues militantes, de l’essai, du catalogue littéraire (notamment pour la collection Propos mécréants des éditions Libertaires), du trombinoscope (superbement illustré par Jean-Charles Vincent), du lancement de scuds persos ni vu ni connu. Le tout est recouvert d’une belle couche d’humour, noir bien entendu.

A chaque page, la fiction fait des clins d’œil à la réalité. Les vivants (dotés parfois de noms codés transparents) côtoient les morts. On se balade entre Paris et Merlieux, village de l’Aisne où d’irréductibles anars marchent dans les pas de Kropotkine. On s’amuse en compagnie de Jean-Baptiste Botul. On croise des mafieux italiens, des curés pédophiles, des flics peu ordinaires, quelques copains zé copines, des anarchistes chrétiens hollandais, Geronimo et même l’ombre de DSK. Bref, ce patchwork est un fichu bordel, mais on se marre bien. Tudieu !

Jean-Marc Raynaud, Meurtres exquis à la Libre pensée, éditions Libertaires, 98 pages. 10 euros.

Du même auteur, aux mêmes éditions, Oui nous avons hébergé un terroriste... de trois ans (2006), Meurtres exquis à la librairie du Monde libertaire (2009), Meurtres exquis à l’île d’Oléron (2010). Le site des éditions Libertaires.

Des sites libres penseurs :

- Fédération nationale de la Libre pensée.

- Association des libres penseurs de France.

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- Oui, nous avons hébergé un terroriste... de trois ans